Au terme d'un net affrontement partisan, la majorité de gauche
du Conseil communal a largement approuvé l'installation d'un local
de consommation de drogues à la rue César-Roux 16, près de
l'ancienne Dolce Vita.
Ce dispositif comprendra également un bistrot social pour
marginaux, sur le modèle de ce qui existe à Bienne.
Toutes les villes sauf Lausanne
"Toutes les grandes villes suisses ont un local d'injection,
sauf Lausanne. Et partout, la création de cette structure a permis
de stabiliser la situation", a expliqué le syndic Daniel
Brélaz.
"Il ne faut pas laisser les toxicomanes se faire des injections
dans des conditions d'hygiène dégradantes et dangereuses.
L'abstinence reste l'objectif final. Mais en attendant, on ne peut
pas les abandonner", a déclaré l'écologiste Adèle Thorens.
Plus de Platzspitz
La socialiste Solange Peters a rappelé que l'aide à la survie
est le pilier le plus polémique de la politique suisse de la drogue
car il pose des problèmes éthiques. "Le dispositif lausannois a une
cohérence qu'il ne faut pas casser.
Dans plusieurs villes, il a montré son efficacité sur le plan
médical, social et sécuritaire". L'ouverture du local d'injection,
où il n'y aura pas de distribution de drogue, devrait apporter une
solution à la scène ouverte de la Riponne.
"Si le local s'ouvre, après quelques mois, nous prendrons des
mesures. Il n'y aura pas à la fois le local d'injection et un
Platzspitz Riponne", a déclaré Daniel Brélaz.
Droite opposée
La droite unanime a refusé l'entrée en matière. "Ce local n'est
pas une solution aux problèmes mais une fuite en avant", a déclaré
Tristan Gratier, de LausannEnsemble (PRD, PLS et PDC) qui a demandé
que la question soit posée aux citoyens lausannois par
référendum.
"En ville de Berne, ce local a généré une nouvelle offre. Les
structures ont été débordées par des consommateurs extérieurs à la
ville", a ajouté l'UDC Claude-Alain Voiblet, ancien ressortissant
du Jura bernois.
Il a regretté l'absence d'étude d'impact sur le quartier et le
recours à des vigiles privés pour sécuriser les abords immédiats
des locaux prévus, à César-Roux.
Référendum spontané
Devançant les menaces de la droite de lancer un référendum, les
trois partis de gauche (PS, Verts et AgT) ont demandé que la
question soit posée d'office au peuple lausannois. "Les roses, les
Verts et A Gauche Toute! ne passeront pas en force. Nous sommes
soucieux de l'opinion de la population", a relevé Jean-Michel
Dolivo (AgT).
"Ce projet soulève des questions éthiques et morales. Il suscite
un besoin de discussion et un besoin important de débat
démocratique", a ajouté le socialiste Grégoire Junod. Le référendum
a été soutenu à l'unanimité, moins une abstention.
ats/boi/tac
Huit locaux en Suisse
Le local d'injection, qui n'est qu'un espace de consommation, vise à réduire les risques d'infections VIH ou hépatiques et à offrir aux toxicomanes un encadrement médico-social, le but final restant l'abstinence.
Le projet lausannois s'inspire d'expériences similaires menées à Genève et en Suisse alémanique.
En mars dernier, les citoyens lucernois ont accepté l'ouverture prochaine d'un tel espace par 58,6 % des voix.
Au moins huit villes suisses abritent des locaux d'injection. Berne, la pionnière, a ouvert son espace d'accueil en 1986.
D'autres ont suivi comme Zurich, Bâle, Bienne, Olten, Schaffhouse ou encore Soleure. En Suisse romande, seule Genève possède une telle structure depuis 2001 avec son «Quai 9».
A Bienne, le local d'injection et la brasserie pour marginaux ont fêté leur cinq ans l'été dernier sur un bilan positif. Les partis politiques, de l'UDC aux Verts, sont convaincus du bien-fondé de ce projet qui a permis d'éviter l'émergence d'une scène ouverte de la drogue.
En revanche, lundi dernier, l'exécutif de Thoune a annoncé qu'il n'entendait pas mettre sur pied une telle structure dans sa ville. Il estime qu'un tel projet serait mal accepté par la population et que son exploitation, pour seulement 30 à 40 toxicomanes, coûterait cher.