Un peu plus de 1,137 million de citoyens ont dit «oui» aux
nouvelles dispositions visant à créer un espace éducatif suisse
homogène et de qualité, de l'école primaire à l'université en
passant par les filières professionnelles et la formation
continue.
Ce projet s'inscrit dans les efforts en cours dans le domaine de
l'harmonisation scolaire (durée de la scolarité, objectifs des
niveaux d'enseignement, reconnaissance des diplômes).
Les quelque 191'600 voix exprimées par les opposants n'ont de loin
pas réussi à faire pencher la balance. En termes de cantons, tous
ont dit «oui», de surcroît à plus de 80% dans 20 cas sur 26. La
double majorité du peuple et des cantons était nécessaire étant
donné qu'il s'agissait d'une révision de la constitution
fédérale.
Bernois en tête
Les Bernois se sont montrés les plus enthousiastes avec 92,9% de
suffrages favorables. Ils sont suivis, dans un mouchoir de poche,
par les Neuchâtelois et les Vaudois, avec respectivement 92,6% et
92%. La barre des 90% a aussi été franchie à Bâle-Ville (92,1%),
Soleure (91,4%) et Bâle-Campagne (90,7%).
Au final, tous les cantons romands ont enregistré des taux
d'acceptation dépassant les 80%. Le Jura (89,4%), qui fait un petit
peu moins bien que Neuchâtel et Vaud, est talonné par Fribourg
(88,8%). Les Genevois ont donné leur aval par 85,1% et les
Valaisans par 82,7%.
Fort soutien alémanique
Le bel unanimisme
cache parfois des divergences fondamentales qui apparaîtront par la
suite. Nous ne sommes pas entièrement sûrs que nous aurons encore
notre mot à dire.
Joseph Zisyadis, au sujet
d'un éventuel dessaisissement démocratique.
La
plupart des cantons alémaniques, y compris ceux réputés
conservateurs et soucieux des prérogatives cantonales, ont apporté
leur soutien dans des proportions analogues. Outre-Sarine, Zoug
arrive en cinquième position, avec 86,7% d'avis positifs. Zurich
est sixième (86%). Suivent Glaris, Lucerne, St-Gall, Nidwald et
Obwald, avec des scores oscillant entre 85,7% et 84%.
Appenzell Rhodes-Extérieures (79,8%) et Schaffhouse (79,3%) ont
également frôlé les 80% de «oui». Les Uranais (75,6%) et les
Schwytzois (74,5%) se sont montrés légèrement plus réservés.
Opposition balayée
Le Tessin, où le camp rose-vert et les syndicats ont appelé à
voter «non», et Appenzell Rhodes-Intérieures se distinguent. Ils
sont lanterne rouge, avec seulement 59,7% et 59,2% de «oui».
Ce sont les seules régions où les adversaires de cette
modification de la constitution, en général isolés et peu
organisés, sont parvenus à se faire entendre dans une certaine
mesure.
En Suisse romande, l'opposition n'a en revanche pas eu l'ombre
d'une chance. Elle était soutenue par la Ligue vaudoise
(fédéraliste), l'extrême-gauche, ainsi que par les associations des
étudiants lausannois et genevois. Parmi les grands partis, l'UDC
était quelque peu divisée, mais cela n'a pas non plus suffi à faire
capoter le projet.
agences/st
QUASIMENT UN RECORD D'ABSTENTIONNISME
L'abstentionnisme a connu un nouveau pic. Seuls quelque 27,3%
des électeurs ont glissé un bulletin dans l'urne. Ce taux de
participation frôle le plancher historique de 26,7% atteint il y a
trente ans.
La forte abstention de tranche par rapport aux participations
honorables enregistrées lors des trois dernières votations: 42,3%
le 27 novembre 2005 (moratoire sur les OGM dans l'agriculture et
travail dominical), 53,8% le 25 septembre (extension de la libre
circulation) et 56% le 5 juin (Schengen/Dublin et partenariat pour
couples homosexuels).
Il faut revenir trois ans en arrière pour retrouver un résultat
aussi faible. Lors de la votation du 9 février 2003 sur l'extension
des droits populaires (initiative populaire générale) et la
participation des cantons aux coûts des traitements hospitaliers,
la participation n'avait atteint que 28,7%.
Le record remonte toutefois aux années 1970. Après le taux de
26,7% atteint le 4 juin 1972 (sauvegarde de la monnaie et
stabilisation du marché de la construction), 27,5% des électeurs
s'étaient déplacés le 4 mars 1973. Il était déjà alors question
d'enseignement et d'encouragement de la recherche
scientifique.
Le scrutin du 2 mars 1975 sur la politique conjoncturelle avait
enregistré un taux de participation de 28,6%. Ces planchers
s'inscrivaient dans un contexte d'abstentionnisme croissant. En
effet, depuis 1969, beaucoup de votations fédérales n'ont mobilisé
qu'entre 30% et 35% des électeurs.
ats/tsrinfo
Réactions positives
- Pour l'association faîtière des enseignants suisses, les nouveaux articles ne signifient pas seulement une harmonisation des structures de l'école, mais également une péréquation des ressources entre cantons et régions.
- Son président, Beat Zemp, a expliqué que certains cantons n'ont, par exemple, pas de "structures de jour" et qu'une harmonisation durable ne pourra se faire que par des compensations entre les régions. Les enseignants plaident pour la création d'un département fédéral de la formation, de la recherche et de l'innovation.
Unis satisfaites
-Pour la Conférence universitaire suisse, ce "oui" constitue une reconnaissance du travail qui a été fait en amont, a déclaré très satisfait Nivardo Ischi, secrétaire général de la Conférence universitaire suisse.
- Ce résultat est aussi une «preuve que nous sommes sur la bonne voie pour renforcer encore plus le fédéralisme coopératif dans le domaine des hautes écoles». On n'y parviendra que si les cantons et la Confédération travaillent mieux ensemble, a-t-il expliqué.
L'USAM se félicite
- La voie est maintenant libre pour procéder à des réformes urgentes au niveau de l'école obligatoire, selon L'Union suisse des arts et métiers. En outre, les filières de formation générale et les filières professionnelles doivent désormais trouver une reconnaissance sociale équivalente.
- Pour l'USAM, cela doit entraîner une nouvelle revalorisation de la formation professionnelle initiale et de la formation continue. L'organisation faîtière des petites et moyennes entreprises suivra donc avec la plus vive attention l'application concrète des nouvelles normes constitutionnelles.
Partis unanimes
- Les partis politiques se félicitent de ce résultat. Selon Martine Brunschwig Graf, membre du comité «oui à la formation», rassemblant sept partis, le souverain a non seulement manifesté une très forte volonté d'harmonisation au niveau national mais aussi sa confiance à l'égard des cantons.
- La conseillère nationale libérale genevoise souligne que «c'est la première fois depuis très longtemps qu'un article sur la formation et les universités passe la rampe, signe qu'il s'agit d'un projet équilibré mais aussi que les temps sont mûrs pour un fédéralisme plus coopératif».
Craintes des opposants
- Quelques voix discordantes se font tout de même entendre. «Ces articles permettent la mise en place d'organes hybrides entre les cantons et la Confédération; les élus et le peuple seront dessaisis des dossiers», a rappelé le conseiller national Josef Zisyadis (POP/VD).
- Autre crainte partagée par la Conférence universitaire des associations d'étudiants, membre du comité «non le 21 mai!»: la privatisation ultérieure du système scolaire et l'ouverture au privé.