Le nerf de la guerre dans les soins intensifs s'appelle propofol, midazolam ou curares. Les patients aux soins intensifs qu'il faut endormir, intuber et oxygéner en ont besoin. Or, leur disponibilité commence à poser problème, car les stocks n'étaient pas faits pour encaisser cette demande massive et imprévisible liée au Covid-19.
"L'approvisionnement en médicaments, aujourd'hui, nous inquiète. Avec l'augmentation du nombre de patients qui sont hospitalisés en soins intensifs, ça pose vraiment des défis très importants", témoigne Pascal Bonnabry, le pharmacien en chef des HUG, samedi dans le 19h30 de la RTS. "Notre souci premier toute la journée, c'est d'essayer d'avoir les médicaments pour lutter contre le Covid-19. Tout le monde ne fait pratiquement que ça", renchérit son homologue du CHUV Farshid Sadeghipour.
Notre souci premier toute la journée, c'est d'essayer d'avoir les médicaments pour lutter contre le Covid-19
Dans les pharmacies des hôpitaux, on essaie dans un premier temps de trouver des solutions à l'interne. "Les hôpitaux sont équipés pour fabriquer un certain nombre de médicaments injectables. Ce qui nous manque aujourd'hui, ce sont les substances actives pour pouvoir les fabriquer", détaille Pascal Bonnabry, qui évoque des fournisseurs à la fois en Suisse et à l'étranger.
La pharma suisse joue le jeu
Deux entreprises pharmaceutiques suisses se consacrent désormais uniquement à la fabrication des médicaments problématiques, Sintetica à Mendrisio (TI) et Bichsel à Interlaken. "On leur a fait des demandes. Ils y ont répondu et ont commencé à mettre en place un gros dispositif pour pouvoir produire nos besoins sur quelques médicaments essentiels pour le traitement du Covid-19", se félicite Farshid Sadeghipour.
Les hôpitaux sont équipés pour fabriquer un certain nombre de médicaments injectables. Ce qui nous manque aujourd'hui, ce sont les substances actives pour pouvoir les fabriquer
Des réserves pour encore deux semaines
Face à la gravité de la situation, la Confédération a mis en place une stratégie nationale: "un groupe va faire le contact entre tous ces hôpitaux afin de savoir s'il est possible d'organiser des échanges entre eux", a précisé le responsable de la division des maladies transmissibles à l'OFSP Daniel Koch. Aux HUG et au CHUV, il y a des réserves pour les deux prochaines semaines. Pour éviter cette pénurie annoncée et économiser les substances, les médecins ont déjà commencé à adapter les protocoles au niveau de la durée et des dosages.
En France, les réserves semblent plus problématiques. Plusieurs hôpitaux ont lancé vendredi des appels au secours, certains annonçant n'avoir de stock que pour deux jours et demi. Dans le monde entier, les établissements de soins se livrent une guerre pour avoir accès à davantage de médicaments.
Craintes de blocage aux USA
Problème supplémentaire, les médicaments qui manquent sont fabriqués avec des principes actifs qui viennent, pour la plupart, de Chine, d’Inde ou des Etats-Unis. Or, le 4 mars dernier, l'Inde a interdit l’exportation de 26 principes actifs. Certains craignent maintenant que les USA décident de réserver leur production de curares à leurs besoins internes.
Sujet TV: Delphine Gianora
Adaptation web: Vincent Cherpillod
Propofol, midazolam et curares?
Le propofol est un anesthésique général qui peut être utilisé dans l'induction et l'entretien de l'anesthésie générale et la sédation de patients ventilés dans les services de réanimation.
Le midazolam est une benzodiazépine aux propriétés, notamment, anxiolytiques, anticonvulsantes et sédatives.
Le curare est une substance naturelle extraite de certaines lianes d'Amazonie, qui provoque une paralysie musculaire. Par extension, les curares désignent une famille de médicaments utilisés en anesthésie pour provoquer un relâchement musculaire, ce qui permet notamment de faciliter l'intubation et la ventilation mécanique.