Guide touristique spécialisé dans les tours Bollywood, Erwin Fässler est sans travail et sans revenu depuis le début de la crise. Depuis son appartement zurichois, il a lancé le mois dernier une pétition en ligne pour demander la création d'un revenu universel pour tous les Suisses pendant six mois.
"C'était à la veille de la décision du Conseil fédéral de tout fermer. J'ai compris que beaucoup de gens dans notre pays allaient se retrouver en grande difficulté financière", explique Erwin Fässler. Son appel a trouvé un certain écho au sein de la population. En un mois, le guide touristique a récolté près de 80'000 signatures en faveur du revenu de base inconditionnel (RBI).
Outil ponctuel ou changement de modèle?
Fin mars, deux professeurs d'économie romands proposaient eux aussi dans Le Temps un concept de "revenu universel de citoyenneté" pour faire face à la crise. Ce revenu, limité dans le temps, serait distribué sous forme de carte personnelle de paiement utilisable chez les prestataires de biens et services, qui serait débitée au fur et à mesure des dépenses.
"L'idée est de parer aux dépenses les plus urgentes, donc les dépenses alimentaires, mais aussi de donner la possibilité de payer les factures", explique Solène Morvant-Roux, professeure assitante à l'Institut de démographie et de socioéconomie de l'Université de Genève. Orienter l'argent sur ces dépenses-là permettrait aussi, selon elle, de "redynamiser la demande".
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Le revenu universel, outil ponctuel pour éviter la récession ou changement de modèle économique à plus long terme? La question agite d’autres pays, notamment les Etats-Unis, le Brésil, l'Allemagne ou encore l’Espagne, à bout touchant avec son projet de revenu universel.
Un acte II pour le RBI en Suisse?
En Suisse, les Verts aimeraient relancer le débat. Selon eux, la crise du coronavirus a révélé les limites du modèle social. "Le système qu'on connaît aujourd'hui tient la route, mais il est très lourd et très stigmatisant. Un revenu de base universel serait une alternative beaucoup plus simple et valorisante", explique le conseiller national Gerhard Andrey (Les Verts/FR).
Mais au sein de la classe politique, ceux qui s'y opposaient en 2016 n'ont pas changé d'avis, à l'instar du Valaisan Philippe Nantermod. "Actuellement, on est en train de dépenser des dizaines de milliards de francs en l'espace de quelques semaines pour aider les personne touchées par le coronavirus. On constate qu'on ne serait pas capables de porter cela pendant encore de nombreux mois", juge le vice-président du PLR.
En juin 2016, les citoyens avaient refusé le revenu de base inconditionnel à 76,9%. Y aura-t-il un acte II pour le RBI en Suisse? Jusqu'ici, cela n'aura été qu'un rêve lointain. La petite commune zurichoise de Rheinau aurait dû être la première à le tester, mais les artisans du projet n'ont jamais réussi à récolter les fonds pour financer l'expérience.
Valérie Gillioz/dk