Semi-confinés chez eux, ou totalement confinés dans les EMS, les plus de 65 ans, plus souvent désignés ces dernières semaines comme la fameuse "population à risque", commencent à souffrir de la privation de liens sociaux.
"Il suffit !" gronde vendredi un éditorial du journal Le Temps, "rien ni personne ne doit les priver de décider qui l’emporte, de l’éventualité de la maladie ou de la certitude de la solitude", alors que "l’une comme l’autre peuvent conduire à la mort".
Une opinion partagée dans La Matinale par Roland Grunder, co-président du Conseil suisse des aînés. Selon lui, le "ras le bol" provient surtout du fait "de ne rien savoir". On ne s'adresse à eux qu'en tant que "population à risque", déplore-t-il, en les privant en partie de leur libre arbitre.
La question des petits-enfants
Alors que les éléments scientifiques tendent à montrer, avec prudence, que les enfants sont peu ou pas porteurs du virus, il voit un paradoxe dans le fait d'empêcher les contacts avec leurs grands-parents tout en rouvrant les écoles, et cela suscite de l'incompréhension chez les aînés, estime-t-il.
"Qu'est-ce qui peut arriver de plus pour des gens de 80 ans, si ce n'est de mourir ? On est tous appelés à mourir un jour où l'autre", argumente-t-il, "mais désormais le risque c'est de mourir seul". Aujourd'hui, même chez soi, "on a l'impression d'être en EMS".
Une large part de ces seniors ne sont pas "à risque", estime par ailleurs Roland Grunder, "l'âge seul n'est surtout pas un critère suffisant pour le définir".
S'il reconnaît la pertinence des mesures générales de protection "en période de pic", Roland Grunder estime qu'il faut désormais "définir des catégories" plus précises en vue du déconfinement et de la reprise de la vie. "Les seniors font partie de l'économie grise", souligne-t-il, "demandez à un bistrotier, ou au secteur du tourisme: il faut des 'vieux' pour relancer la machine".
Combattre la solitude
A l'instar d'un EMS à St-Gall, qui a installé un parloir pour permettre aux résidents de continuer à voir leurs proches malgré la crise sanitaire, des discussions sont en cours dans tous les cantons romands pour rétablir une forme de contact avec la famille.
Des situations deviennent parfois de plus en plus difficiles à gérer pour beaucoup de proches. Alors que le canton des Genève a prolongé l’interdiction des visites en EMS jusqu’au 8 juin, cette mesure n'est pas saluée par tout le monde, et certains témoignages révèlent des profonds crèves-coeur.
Le témoignage d’un Genevois de 76 ans séparé de sa femme dans le 12h30:
Valérie Hauert/jop