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Aviation, PME, médias, crèches: les principales décisions prises par les Chambres

La question des aides au secteur aérien donne lieu à des affrontements politiques
La question des aides au secteur aérien donne lieu à des affrontements politiques / 19h30 / 1 min. / le 4 mai 2020
De retour aux affaires pour avaliser et adapter les décisions prises par le Conseil fédéral depuis le début de la crise sanitaire, les Chambres fédérales ont multiplié les votes lundi, adoptant notamment des aides au secteur aérien, aux PME, aux médias et aux crèches.

Les crédits urgents acceptés au National

Toute la journée, le Conseil national a passé en revue le supplément au budget 2020 demandé par le Conseil fédéral pour faire face au Covid-19. En soirée, il a donné son feu vert aux crédits urgents de 57 milliards de francs. Le dossier passe désormais au Conseil des Etats qui s'y attaquera mardi. Les sénateurs ont pour leur part adopté des aides aux médias et à l'armée, dossiers qui seront examinés ultérieurement au National.

A la Chambre basse, si les prêts aux PME et les crédits pour les assurances chômage et perte de gain ont passé la rampe facilement, l'aide au transport aérien a été discutée.

Jamais le Parlement n'avait eu à se prononcer sur un montant aussi élevé. Ces crédits représentent 84% des dépenses totales de la Confédération en 2019, a expliqué Olivier Feller (PLR/VD) au nom de la commission. Dans l'ensemble, les mesures prises par le Conseil fédéral se justifient, à l'aune de la situation extraordinaire.

Siégeant extra-muros dans les halles de Bernexpo, mesures de protection contre le coronavirus obligent, les Chambres fédérales doivent se prononcer sur plusieurs crédits, même si la Délégation des finances a déjà donné son feu vert à une grande partie d'entre eux.

Un tel train de mesures est "exceptionnel", a déclaré le ministre des Finances Ueli Maurer. Et il ne s'agit que d'un début; cette crise va occuper le Parlement encore longtemps. A fin 2020, le déficit de la Confédération pourrait atteindre de 30 à 50 milliards de francs.

Aide au secteur aérien

Le National a accepté par 116 voix contre 77 les garanties bancaires de 1,275 milliard de francs pour Swiss et Edelweiss. Les conditions auxquelles les compagnies aériennes devraient être soumises pour obtenir ces crédits ont été longuement débattues. Outre le soutien à Swiss et Edelweiss, le Conseil fédéral sollicite aussi un crédit d'engagement de 600 millions pour les entreprises connexes travaillant sur les aéroports nationaux.

Les conditions posées par le Conseil fédéral pour cette aide ont été considérées comme insuffisantes par le camp rose-vert. Le gouvernement propose qu'aucun dividende ne puisse être versé et que les fonds garantis par la Confédération ne soient utilisés que pour les infrastructures suisses. C'est un "bon compromis vu l'importance du secteur aérien pour l'économie suisse", a estimé le ministre des finances Ueli Maurer. "L'argent ne sera pas dépensé à l'étranger", a-t-il rassuré.

Par 130 voix contre 66, le National a néanmoins ajouté des exigences environnementales non contraignantes. Le versement des crédits devrait être subordonné au fait que les objectifs climatiques du Conseil fédéral fassent l'objet d'un contrôle et soient développés dans le cadre de la future collaboration avec les compagnies aériennes.

Pas convaincus, les Verts et le PS ont émis des propositions encore plus strictes. Le National n'a pas voulu d'un engagement formel des bénéficiaires en faveur d'une réduction des gaz à effet de serre, de l'introduction d'une taxe sur les billets d'avion, du développement de carburants synthétiques, d'une réduction des vols intérieurs ou de l'interdiction des licenciements.

Les Vert'libéraux ont tenté en vain de conditionner l'aide à des investissements permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre à zéro. L'UDC a fait passer par 98 voix – contre 89 et 8 abstentions – une demande visant à obliger les compagnies aériennes à rembourser les agences de voyage pour les vols annulés avant le 30 septembre.

Aide aux PME

L'aide aux PME a passé un premier cap. Le Conseil national a accepté le crédit d'engagement de 40 milliards de francs pour les prêts transitoires aux petites et moyennes entreprises touchées par la crise.

Ces prêts cautionnés par la Confédération représentent le principal poste du train de mesures de 57 milliards de francs pour atténuer les effets de la crise du coronavirus sur l'économie helvétique. Ils doivent permettre de garantir des liquidités aux PME et d'éviter des faillites.

Assurance-chômage et allocations perte de gain

L'enveloppe de 6 milliards pour l'assurance-chômage a elle aussi été acceptée. Ce soutien permet d'éviter une hausse des cotisations salariales et une révision de l'assurance-chômage.

Actuellement, un tiers des employés est au chômage partiel. Une partie de ces personnes va définitivement perdre son emploi et la situation va s'aggraver d'ici la fin de l'année, a estimé le ministre des Finances Ueli Maurer.

Le Conseil national a accepté tacitement les 5,3 milliards destinés au financement du régime des allocations pour perte de gain.

Soutien aux crèches

Les crèches devraient obtenir un soutien de 100 millions de francs pour faire face à la crise du coronavirus. Contre l'avis du Conseil fédéral, le National a ajouté par 130 voix contre 60 cette aide aux crédits destinés à atténuer les effets de la pandémie.

Les crèches et les structures d'accueil extrafamilial devraient bénéficier de cette aide en compensation des contributions que les parents n'ont pas versées durant la période de semi-confinement, a expliqué Céline Widmer (PS/ZH).

Pour le Conseil fédéral, le soutien des structures d'accueil extrafamilial est de la compétence des cantons et des communes. Un avis partagé par l'UDC pour qui des mesures supplémentaires sont superflues.

Aide aux médias

Les médias doivent être soutenus face à la crise du coronavirus, estime le Conseil des Etats, qui a approuvé à une large majorité deux motions qui demandent une aide totale de 65 millions. Le Conseil fédéral s'y est opposé, car il a proposé un paquet pour le long terme.

Les médias jouent un rôle irremplaçable en temps de crise et leur apport est indispensable. Mais la pandémie a aggravé leur situation économique déjà difficile. Les revenus publicitaires ont chuté de 60 à 95% dans un délai très court. Sans aide immédiate, un dommage irréparable est inévitable, a expliqué Stefan Engler (PDC/GR) au nom de la commission.

L'agence Keystone-SDA-ATS doit recevoir des moyens financiers supplémentaires, afin de pouvoir proposer gratuitement son service de base en trois langues. En outre, La Poste doit distribuer gratuitement les journaux locaux et régionaux afin d'assurer leur survie. Le Conseil fédéral doit créer la base légale nécessaire et mettre 25 millions de francs à disposition.

Pour les autres journaux quotidiens, La Poste doit prévoir un tarif avantageux. Les journaux ne devraient bénéficier de cette aide que s'ils renoncent à verser des dividendes à leurs actionnaires pour l'exercice 2020. La mesure pourrait coûter 10 millions.

Via la deuxième motion, la commission veut verser une aide immédiate de 30 millions de francs supplémentaires pour les radios et télévisions locales. Celles-ci ont perdu environ 80% des entrées publicitaires pour la période de mars à mai, selon Stefan Engler. La somme provient de la réserve de fluctuation de la redevance de radio-télévision.

>> Ecouter l'émission Médialogues :

Philippe Zahno, président des "RRR", les radios régionales romandes. [Keystone - Christian Merz]Keystone - Christian Merz
Les radios régionales romandes sauvées par le Parlement? / Médialogues / 19 min. / le 2 mai 2020

Aide au sport et à la culture

Le National a donné son aval aux 280 millions de francs destinés à soulager le monde de la culture (arts du spectacle, design, cinéma, arts visuels, littérature, musique et musées) par des aides immédiates et des indemnités.

Pour l'UDC, ce montant n'est pas justifié. Les milieux culturels n'ont aucune raison d'être traités différemment des autres secteurs économiques, comme les coiffeurs, les hôteliers, les restaurateurs ou les physiothérapeutes, a fait valoir Lars Guggisberg (UDC/BE), proposant de réduire de 45 millions le montant des compensations.

La Chambre du peuple ne l'a pas suivi et l'a maintenu à 145 millions. Elle a aussi refusé de supprimer les 25 millions de francs d'aide d'urgence à la culture.

L'aide de 100 millions pour le sport a passé la rampe sans opposition au National.

Aide à l'armée, au service civil et à la protection civile

L'engagement de l'armée pour aider les autorités civiles dans la lutte contre le Covid-19 est nécessaire, estime le Conseil des Etats, qui a approuvé sans opposition le déploiement maximal de 8000 militaires jusqu'au 30 juin.

Au final, quelque 5000 soldats ont été appelés en service d'assistance. Et quelque 3800 militaires sont encore engagés dans 19 cantons.

Les autres ont déjà pu rentrer à la maison grâce au ralentissement des contaminations en avril. Mais ils restent "mobilisables en 24 heures en cas de besoin, notamment en cas de deuxième vague d'infection", a précisé la ministre de la défense Viola Amherd.

L'enveloppe de 23,4 millions de francs destinée au service de la protection civile a été acceptée sans opposition par le National.

Achat de matériel sanitaire

Le National a accepté le crédit pour l'achat de matériel sanitaire. Le Conseil fédéral prévoit 2,59 milliards de francs pour l'acquisition de masques, gants, désinfectants, kits de prélèvement d'échantillons, kits de tests et appareils de respiration. Par 136 voix contre 57, le conseil a rejeté une proposition de l'UDC de réduire le montant de 600 millions.

Les 130 millions pour l'achat de médicaments difficiles à se procurer et les 10 millions en faveur de la recherche pour un vaccin ont aussi passé la rampe sans problème.

Flotte en haute mer

Les prêts bancaires garantis par cautionnement de 28,3 millions de francs pour la flotte de haute mer ont été controversés, mais ont finalement été acceptés par 128 voix contre 60. Ils font eux aussi partie du supplément au bugdet 2020.

Il s'agit de prêts bancaires garantis par cautionnement servant à financer deux navires. Les deux propriétaires ne sont pas en mesure de remplir leurs obligations contractuelles d'amortissement et il existe en outre des retards dans les amortissements effectués.

Application du traçage

Une application de traçage de contact Covid-19 ne doit pas être introduite sans base légale. Le Conseil des Etats l'exige par 32 voix contre 10 dans une motion, le National se prononce mardi. Pour le Conseil fédéral, cette demande est déjà remplie.

L'application suisse DP-3T devrait être mise sur le marché d'ici au 11 mai. Elle doit permettre de retracer les personnes étant entrées en contact avec une personne testée positive au SARS-CoV-2 et de les avertir du risque auquel elles ont été exposées.

Les sénateurs sont préoccupés des conséquences qu'une application de ce type pourrait avoir sur la sphère privée. Ils ont donc insisté afin que cette application se fonde sur une base légale solide. Par ailleurs, l'utilisation doit se faire sur une base volontaire. Seules les solutions techniques qui ne stockent pas les données personnelles de manière centralisée doivent être utilisées.

Le ministre de l'Intérieur Alain Berset s'est opposé en vain à la motion. Toutes les demandes formulées sont déjà satisfaites, avait indiqué le gouvernement dans sa réponse à la motion

>> Lire aussi : Le Parlement reprend la main sur la gestion de la crise du Covid-19 et Le National veut 100 millions de francs d'aide pour les crèches

boi avec ats

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Organisation de la session

Après le National, le Conseil des Etats a adopté le règlement temporaire pour la session extraordinaire à Bernexpo consacrée à la crise du Covid-19.

A la Chambre basse, l'UDC a proposé de couper dans l'enveloppe budgétaire allouée à l'organisation de la session extraordinaire. Pirmin Schwander (UDC/SZ) aurait voulu le faire passer de 3,7 millions de francs à 3,2 millions. Il s'en est notamment pris au montant de la location de Bernexpo (plus de 2 millions de francs) où se déroule la session afin de respecter les règles d'hygiène et de distanciation exigées par la situation actuelle. Le conseil ne l'a pas suivi.

Aux Etats, les modifications des dispositions pour les votes ont donné lieu à quelques résistances. Faute d'un tableau électronique comme au Palais fédéral, les votes des sénateurs ne sont pas visibles. Et contrairement au National, les votes nominaux ne sont pas connus pour toute une série de votations.

Les sénateurs ont finalement adopté la solution de Daniel Jositsch (PS/ZH). L'idée consiste à revenir au système d'avant l'introduction du vote électronique à la Chambre des cantons en 2014, lorsque les sénateurs votaient à main levée.

Sauf qu'à Bernexpo, les représentants des cantons se lèveront ou resteront assis pour donner une meilleure visibilité. Le vote à l'appel nominal reste possible si dix sénateurs en font la demande.

Le règlement prévoit par ailleurs qu'aucun document papier ne soit distribué pendant les séances afin d'éviter la propagation du coronavirus. Pendant cette session, les interventions, les initiatives parlementaires et les propositions devront être déposées exclusivement par courrier électronique.