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Le bras droit d'Erwin Sperisen débouté par le Tribunal fédéral

Javier Figueroa, l'ancien bras droit d'Erwin Sperisen, lors de son procès devant le Tribunal de grande instance de Ried im Innkreis, en Autriche, en 2013. [Keystone/EPA/Rubra]
Le bras droit d'Erwin Sperisen débouté par le Tribunal fédéral / Le Journal horaire / 33 sec. / le 6 mai 2020
Javier Figueroa estimait que son honneur avait été atteint par l’arrêt confirmant la condamnation d’Erwin Sperisen pour complicité d’assassinats. Les juges de Mon-Repos ne l’ont pas suivi, a appris la RTS.

La demande de révocation d'un arrêt du Tribunal fédéral (TF) par l’ancien bras droit d'Erwin Sperisen a été balayée. Ses avocats, Me Charles Poncet et Me Pierre Schifferli, l'ont indiqué à la RTS mardi. Ils se disent consternés et préoccupés.

Javier Figueroa avait saisi les juges de Mon-Repos le 24 janvier pour une atteinte à l’honneur. Un jugement du TF daté du 14 novembre 2019 le faisait passer pour le co-dirigeant d'un commando de tueurs alors qu'il a été acquitté en 2013 des crimes reprochés à Erwin Sperisen. L’ancien chef de la police guatémaltèque a été condamné à Genève à 15 ans de réclusion pour complicité d’assassinats sur sept détenus au Guatemala.

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Contraire aux règles de bonne foi

Les arguments de Javier Figueroa n'ont pas convaincu: le Tribunal fédéral a rendu le 27 avril dernier un arrêt d’irrecevabilité de la requête. Outre des considérations purement procédurales, les juges ont estimé que le requérant aurait dû saisir la justice plus tôt, vu le nombre de jugements publics rendus en Suisse depuis six ans où son nom apparaît. Ils évoquent trois dates: 2014, 2015 et 2017.

"Cela suffit à démontrer que Javier Figueroa a attendu l'issue (défavorable pour Erwin Sperisen) du dernier recours en matière pénale de celui-ci pour tenter d'ouvrir une procédure en faveur de ce dernier. Une telle manière de procéder est contraire aux règles de la bonne foi en procédure", affirme les trois magistrats de la Cour de droit pénal du TF.

Me Pierre Schifferli s’agace: "Nous sommes consternés par les arguments incohérents du Tribunal fédéral. Il maintient d’un côté que notre client est le chef d’un commando de tueurs et d’un autre, il reconnaît son acquittement. Notre recours a essentiellement été rejeté pour des questions de procédure, mais les juges étaient suffisamment embêtés pour estimer nécessaire de se justifier sur le fond." Avec Me Charles Poncet, il réfléchit à saisir la Cour européenne des droits de l’homme.

Leader du commando mais pas auteur principal

Le Tribunal fédéral avance encore un argument qui fait bondir bien au-delà des défenseurs de Javier Figueroa. Il explique que l’ancien bras droit d’Erwin Sperisen n’avait pas à se sentir diffamé ou calomnié par l’arrêt mis en cause puisqu’il n’y est pas considéré comme étant l’auteur principal des assassinats.

"S'il est apparu que Javier Figueroa avait donné des ordres au commando, qu'il l'avait tout au moins co-dirigé et que ce groupe d'hommes avait mis à exécution le plan criminel, il ne ressort pas de l'arrêt en question que le Tribunal fédéral en aurait conclu qu'il aurait été l'auteur principal des assassinats", écrivent les juges. "On ignore en effet concrètement quels ordres précis il a donnés et qui, parmi les membres du commando, a pu exécuter les détenus."

Stupéfaction des avocats de Sperisen

Des arguments qui laissent pantois les avocats d’Erwin Sperisen. "Après avoir condamné Erwin Sperisen comme complice d'un acquitté, le Tribunal fédéral en vient à le déclarer complice d'un auteur principal qui ne serait ni coupable ni auteur principal, assènent Me Giorgio Campá et Me Florian Baier. "Si Erwin Sperisen avait été jugé en Autriche, en Espagne ou n'importe où ailleurs, il aurait été acquitté."

Les contradictions des juges fédéraux sont d’autant plus criantes, selon eux, que Javier Figueroa est à nouveau décrit comme le "responsable" du commando de tueurs dans un autre arrêt, rendu le 23 avril dernier. Ce dernier rejette une demande de révision du jugement du 14 novembre 2019 pour des liens d’amitié entre une juge du TF et le père du procureur genevois chargé du dossier, par ailleurs membre fondateur de l’association Trial, à l’origine de la dénonciation pénale d’Erwin Sperisen.

Une plainte pénale pour diffamation et calomnie émanant de Javier Figueroa à l’encontre de cinq juges fédéraux est toujours pendante devant le Ministère public du canton de Vaud.

Raphaël Leroy

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