Certains parents ont décidé qu'ils n'enverraient pas leurs enfants en classe. "C'est brutal, sans beaucoup d'explications", s'est ainsi exclamée une maman jeudi dans La Matinale.
"On se retrouve un jour où la pandémie est encore dangereuse, et tout à coup il n'y a plus de risque, notamment pour les enfants. On se sent un peu pris de court". Et d'ajouter: "Après tous les efforts d'adaptation des familles, c'est un peu étrange de reprendre pour quelques semaines."
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Nombreuses demandes de conseils
Cette maman est loin d’être seule à partager ce point de vue. Entre groupes Facebook qui se créent et pétitions en ligne qui se lancent, la grogne monte. Alors que d’autres parents sont moins déterminés, mais doutent, beaucoup demandent alors conseils, notamment aux associations de parents d’élèves.
"Nous recevons régulièrement des appels sur notre ligne et des questions par Facebook de parents qui sont vraiment inquiets de renvoyer leurs enfants à l'école et qui nous interpellent sur les possibilités qu'ils ont d'éventuellement ne pas le faire", explique Marie-Pierre Van Mullem, présidente de la section vaudoise.
"Nous essayons de les rassurer autant que possible et de les écouter, mais au final, il y a une règle fédérale qui est tombée: l'école reprend et, ma foi, il faut y aller", conclut Marie-Pierre Van Mullem.
Quant aux établissements scolaires de Suisse romande, nombre d'entre eux ont aussi été sollicités pour répondre à l'inquiétude des parents. Mais ils l'affirment: généralement, ces cas de figure restent une minorité.
Des beaux moments en famille aussi
Dans le 12h30, Alexandre Follonier témoigne aussi de son vécu durant cette période: "On a des moments de tensions évidemment, de doutes, de désaccord. Mais on a surtout des moments de partage, de complicité. Et là, tout s'est intensifié. On a eu des discussions, comme si on était entre adultes". Cet habitant de Haute-Nendaz vit avec son épouse et leurs deux garçons de 12 et 14 ans. Sa famille, soudée, l'est encore plus depuis le début du confinement. "Ce ne sont pas deux garçons qui écoutent ce que leur dit, à qui on donne des consignes. C'est deux personnes qui parlent, qui existent."
Il explique avoir ressenti que ses enfants ont "vraiment grandi": "nos enfants, qu'on croyait connaître, on les a vraiment découverts. Ils décident de faire des choses, ils développent des trucs qu'ils ne faisaient pas avant. Ils vont vers d'autres directions. Pas parce qu'on leur a imposé, mais parce qu'ils ont choisi."
Pas vraiment de peur de la reprise pour ce Nendard, mais il avoue s'en réjouir "moyennement". "J'ai peur que ça, ça s'arrête. (...) J'espère qu'on aura l'intelligence de garder ces moments en mémoire et de les revivre: prendre le temps de ne rien faire, prendre le temps d'être ensemble et de partager, simplement."
Anne Emery-Torracinta se veut rassurante
"Je comprends les inquiétudes des parents et je les encourage à discuter aussi avec le pédiatre de l'enfant s'ils ont des craintes", a réagi la conseillère d'Etat genevoise Anne Emery-Torracinta, en charge de l'instruction publique. Les autorités sanitaires nous disent que les enfants sont peu malades et peu vecteurs du virus, a-t-elle ajouté. "Et le fait de garder ses enfants à la maison risque d'être un mal plutôt qu'un bien, car l'école à distance ne remplacera jamais le présentiel, en raison notamment d'un risque de décrochage."
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Et la conseillère d'Etat socialiste de rappeler que l'école recommence à mi-temps, avec des mesures de protection. Les premiers jours seront consacrés aux gestes d'hygiène et à la distance sociale.
Pas de menace d'amendes à Genève
Formellement, on peut forcer les enfants à retourner à l'école, car elle est obligatoire. "Mais nous avons choisi, à Genève, d'avoir un peu de souplesse et de pragmatisme dans les jours qui vont venir, et surtout de dialoguer avec les familles pour essayer de recréer ce lien de confiance". Et les enfants et les enseignants vulnérables continueront l'enseignement à distance.
Alors que certains cantons, comme le Valais et le Jura, menacent de donner des amendes, Anne Emery-Torracinta mise sur le dialogue, pour éviter de braquer les familles.
Adrien Krause, Romaine Morard
Adaptation web: Jean-Philippe Rutz