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La stratégie de déconfinement du Conseil fédéral fait une majorité de mécontents

A quelques jours de la réouverture des magasins, des restaurants et des écoles, seuls 36% des Suisses soutiennent le calendrier de déconfinement fixé par le Conseil fédéral, révèle jeudi le troisième sondage de l'institut Sotomo pour le compte de la SSR. Plus de quatre personnes sur dix estiment que le gouvernement va trop vite.

Que pense la population de la situation sanitaire et économique en Suisse, plus de deux mois après les premières mesures de lutte contre le COVID-19? Alors que la principale étape de déconfinement approche à grands pas, la SSR publie jeudi la troisième vague de son enquête sur la crise du coronavirus en Suisse.

L'opinion générale quant à la situation sanitaire et économique en Suisse a fortement évolué depuis le premier sondage réalisé à la mi-mars. A mesure que le temps passe, les Suisses se soucient de moins en moins de la situation dans les hôpitaux et ont, en revanche, de plus en plus de craintes quant à l'état de l'économie.

Désormais, 77% des sondés considèrent la situation dans les hôpitaux comme bonne ou très bonne, contre quelque 30% lors de la première enquête le 22 mars. A l'inverse, la situation économique est jugée mauvaise ou très mauvaise par 57% des personnes interrogées. Ce chiffre a doublé en six semaines. Les différences entre régions linguistiques sont minimes.

Des mécontents dans les deux camps

Qu'en est-il, dès lors, du soutien à l'assouplissement des mesures décidé à partir du 11 mai? La part des personnes entièrement satisfaites par le rythme de levée des restrictions ne représente pas une majorité (36%). On retrouve en effet des gens mécontents dans les deux camps: 42% des sondés estiment que le gouvernement va trop vite, contre 23% qui le jugent trop timide.

Dans l'ensemble, la population a donc tendance à vouloir agir moins rapidement que les autorités fédérales. Le tempo choisi par le Conseil fédéral, bien que soutenu par un peu plus d'un tiers des Suisses seulement, semble néanmoins être un compromis acceptable, notent les auteurs de l'enquête. A noter d'ailleurs que plus de 60% des sondés disent faire confiance au gouvernement.

Les électeurs UDC insatisfaits, les socialistes méfiants

Les critiques dénonçant une réouverture trop rapide de l'économie sont moins fréquentes en Suisse alémanique (38%) qu'en Suisse romande (47%) et, surtout, en Suisse italienne (62%). Les Tessinois, qui figurent parmi les plus durement touchés par le coronavirus, sont ainsi les seuls à être majoritairement défavorables à la levée des mesures.

Les électeurs de l'UDC sont les moins convaincus de la stratégie choisie par l'exécutif (30%). Ils sont toutefois fortement divisés: 29% d'entre eux jugent l'abandon des restrictions trop rapide, tandis qu'ils sont 41% à souhaiter mettre le turbo. Les plus méfiants sont les socialistes. Un sympathisant PS sur deux estime que le Conseil fédéral va trop vite.

Réouverture des restaurants et des écoles controversée

Les Suisses semblent particulièrement impatients à l'idée de pouvoir à nouveau fréquenter leurs enseignes préférées. La fin de la fermeture des magasins est en effet la mesure qui suscite le plus d'impatience au sein de la population. Dans ce domaine, plus de trois sondés sur dix considèrent que le rythme de la détente est trop lent.

Nombreux sont aussi ceux qui veulent aller plus vite en matière de réouverture des restaurants (23%) et des écoles (22%). La levée des restrictions dans ces deux domaines est toutefois très controversée puisque, à l'inverse, le nombre de sondés souhaitant temporiser est encore plus nombreux (39% pour les restaurants et 26% pour les écoles).

Sur ce point, les différences régionales sont particulièrement marquées. Dans le domaine de la gastronomie, plus de la moitié des Tessinois (51%) trouvent l'assouplissement trop rapide, contre 44% des Romands et 33% des Alémaniques. La situation est comparable pour les écoles, même si aucune région linguistique n'est majoritairement opposée à un retour en classe le 11 mai.

Vers une 2e vague?

Malgré l'impatience d'une partie de la population vis-à-vis du semi-confinement et le soutien relatif des Suisses à la stratégie de sortie de crise du Conseil fédéral, une majorité des personnes interrogées s'attend à une reprise du nombre d'infections au COVID-19 dans les prochaines semaines, à la suite de la levée des restrictions lundi prochain.

L'optimisme croît avec l'âge. Dans la catégorie des 15 à 24 ans, près de six sondés sur dix anticipent une légère augmentation (40%) voire une forte hausse (18%) du nombre de cas. Chez les plus de 75 ans - les personnes les plus vulnérables -, une bonne majorité (57%) prédit un tassement de la courbe, contre 35% qui envisagent une seconde vague d'épidémie.

Les différences d'appréciation sont également importantes en fonction du genre et de la région linguistique. Les hommes posent en effet un oeil bien plus positif que les femmes sur l'évolution de la situation. Les Alémaniques sont quant à eux beaucoup plus confiants en l'avenir que les Romands et les Tessinois, qui redoutent fortement une dégradation sanitaire.

A quand la fin des restrictions de mouvement?

Reste que, malgré l'assouplissement des mesures annoncé pour la semaine prochaine, les Suisses s'attendent généralement à devoir vivre encore longtemps avec des restrictions de mouvement. Lors de la précédente enquête réalisée début avril, plus de 60% des sondés pensaient pouvoir se mouvoir librement d'ici juillet 2020. Aujourd'hui, la majorité estime qu'il faudra attendre le mois de novembre, et un Suisse sur cinq pense même que le retour à la normale interviendra après mars 2021.

La stratégie de déconfinement du Conseil fédéral fait une majorité de mécontents, selon un sondage de la SSR
La stratégie de déconfinement du Conseil fédéral fait une majorité de mécontents, selon un sondage de la SSR / Forum / 2 min. / le 7 mai 2020

Didier Kottelat

>> Les précisions de Forum:

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Méthode

Le sondage a été réalisé par l'institut Sotomo pour le compte de la SSR du 2 au 6 mai 2020. Au total, 32'485 personnes dans toutes les régions du pays ont participé à l'enquête en ligne. La marge d'erreur est de +/- 1,1 point de pourcentage.