Les clients ont tout intérêt à fournir leurs coordonnées, rappelle le gouvernement dans un aide-mémoire. Si un employé du service tombe malade, le médecin cantonal pourra contacter les clients qui auront laissé leur nom, prénom et numéro de téléphone.
Mais faute de base légale, les restaurateurs ne pourront obliger leur clientèle à montrer patte blanche. Les clients s'exécuteront seulement sur une base volontaire.
Dans un tel cas de figure, les données récoltées seront conservées au maximum 14 jours, laps de temps durant lequel un médecin cantonal pourrait les réclamer, mais uniquement à des fins de lutte contre la pandémie.
Est-ce nécessaire?
Pour Jean-Philippe Walter, ex-préposé fédéral suppléant à la protection des données et actuel Commissaire à la protection des données du Conseil de l'Europe, "la question n'est pas seulement de savoir si c'est légal, mais de savoir si cette mesure est nécessaire et proportionnée. Et là, j'ai quelques doutes", a-t-il déclaré vendredi dans La Matinale.
Si cette mesure est nécessaire, il faudrait créer une base légale et l'imposer à tout le monde. Et ne pas se limiter aux restaurants: il y a aussi les trains, les bus, les magasins ou les coiffeurs, poursuit Jean-Philippe Walter. Mais à ses yeux, ce serait aller beaucoup trop loin. Selon lui, il y a d'autres moyens pour lutter contre une deuxième vague du coronavirus: que les gens se responsabilisent s'ils sont diagnostiqués positifs, et qu'on lance un appel aux personnes de leur entourage.
Les mesures doivent être encadrées
Pour lutter contre une deuxième vague du virus, des mesures doivent être prises, qui peuvent représenter des atteintes à la sphère privée, admet Jean-Philippe Walter, qui est aussi expert indépendant. "Mais cela doit se faire dans la transparence et en précisant quelles données peuvent être récoltées, qui doit y avoir accès et pendant combien de temps. Et leur finalité doit aussi être déterminée, pour éviter une utilisation par après dans un autre cadre", souligne l'ex-préposé fédéral suppléant.
On doit se montrer attentif, relève l'expert. Et les mesures doivent être limitées dans le temps, pendant la situation extraordinaire. Ensuite, elles devront être abolies. "Le Parlement doit être vigilant et le préposé fédéral à la protection des données doit contrôler que les conditions soient respectées". Et les mesures prises ne doivent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour la lutte contre le coronavirus.
Feu vert pour l'application de traçage
L'application de traçage, à installer sur les téléphones pour permettre un suivi des contacts en cas d'infection, obtient en revanche le feu vert de Jean-Philippe Walter: "On a pris toutes les garanties pour assurer le respect des droits des citoyens: l'utilisation sera volontaire et il y aura une base légale et une phase de test, qui permettra de corriger certains 'bugs'".
S'agissant des opérations de traçage qui seront menées par les service cantonaux, le spécialiste juge que c'est très intrusif: "Là aussi, il faudra voir comment c'est encadré. Les autorités cantonales de protection des données devront aussi surveiller le processus". La participation de policiers aux côtés de personnes soumises au secret médical peut présenter un risque de collusion entre deux fonctions qui ne sont pas les mêmes, s'inquiète Jean-Philippe Walter. Il faut donc faire preuve d'une grande prudence.
Interview: Romaine Morard
Adaptation web: Jean-Philippe Rutz
Beaucoup d'enseignes resteront fermées lundi
Dès lundi, les bars et les restaurants pourront ouvrir s'ils respectent toute une série de mesures de précaution. Dans le canton de Genève, selon les estimations du président de la Société des cafetiers, restaurateurs et hôteliers de Genève, près de 40% des enseignes resteront bouclées et la proportion pourrait être encore supérieure du côté des bars. Des chiffres qui devraient être similaires dans la plupart des autres cantons.
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