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L'OFSP envisage de dépister les enfants de moins de 12 ans

Que faire si un enfant présente des symptômes du virus en classe? [Keystone - Alexandra Wey]
Quel rôle jouent les enfants dans la pandémie actuelle? / La Matinale / 4 min. / le 4 septembre 2020
C'est l'un des mystères dans cette pandémie: quel rôle jouent réellement les enfants dans la propagation ? Jusqu'à présent, l'OFSP recommandait de ne pas les tester les moins de 12 ans au moindre symptôme. La RTS a appris que la pratique pourrait changer prochainement.

Selon plusieurs études publiées, les enfants de moins de 12 ans seraient peu infectés par le coronavirus et également peu contagieux. Des conclusions qui ont amené l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) à ne pas recommander des tests systématiques pour les plus jeunes.

Mais cette pratique comporte des limites, comme on l'a encore vu jeudi avec la mise en quarantaine de deux classes primaires dans le canton de Genève. La situation épidémiologique apparaît également différente de celle de cet été, ce qui pourrait amener plusieurs changements prochainement.

Avoir plus d'informations sur la circulation du virus

Durant les vacances estivales, les cas positifs au coronavirus étaient peu nombreux. Mais depuis quelques semaines, l'épidémie semble gagner du terrain. Vendredi, l'OFSP a annoncé 405 nouveaux cas et dans les pays qui pratiquent des tests systématiques chez les enfants, on constate que la rentrée s'accompagne souvent d'une multiplication des cas en pédiatrie.

Une situation qui pousse certains épidémiologistes à demander de mieux évaluer la circulation du virus en milieu scolaire. C'est notamment le cas de Silvia Stringhini, responsable de l'Unité d'épidémiologie populationnelle aux HUG.

"Les études conduites à l'étranger nous montrent qu'il y a certainement des transmissions entre adultes au sein des écoles et potentiellement entre enfants et adultes. Il y a moins d'évidences sur les transmissions entre enfants, surtout chez les plus jeunes. Du coup, il est important de savoir comment le virus circule au sein des écoles (...) Il est vrai que les écoles ont rouvert mi-mai, mais à ce moment-là et jusqu'à leur fermeture, il y avait une incidence très faible du virus dans la communauté. Il n'y avait pas vraiment de risque de s'infecter à l'école (...) Maintenant, nous avons une augmentation des cas, surtout dans certains cantons, il est donc important d'encourager le test PCR (ndlr. le test nasal)."

"Les recommandations pourraient changer"

Ces appels semblent donc avoir trouvé écho à l'OFSP. Virginie Masserey, la cheffe du contrôle de l'infection et vaccination de l'Office fédéral de la santé publique, a confirmé à la RTS que les recommandations à ce sujet pourraient changer prochainement.

"Notre attitude, c'est de dire que toute personne qui a des symptômes compatibles avec le Covid-19 devrait se faire tester, y compris les enfants. Mais que pour les moins de 12 ans, on peut faire des exceptions parce que les pédiatres nous disent qu'il est parfois difficile de tester un enfant récalcitrant et donc d'obtenir un prélèvement de bonne qualité."

Et d'ajouter: "Mais ce qui est aussi clairement écrit, c'est que selon la situation épidémiologique, ces recommandations pourraient changer."

L'aspect pratique pris également en compte

Au-delà des données purement épidémiologiques, des tests plus systématiques sur les plus jeunes pourraient aussi leur permettre de retourner à l'école une fois que leur résultat est revenu négatif. Car pour l'instant, le moindre symptôme de rhume force l'enfant à rester chez lui pendant dix jours, ce qui peut s'avérer compliqué pour les parents.

Une problématique dont les autorités sanitaires sont conscientes, comme l'explique Virginie Masserey: "Il faut bien se rendre compte qu'on doit aussi faire une pondération. On aimerait éviter toute transmission du Covid-19 mais ça devient difficile pour les crèches et les parents si chaque fois qu'un enfant a des symptômes, il doit rester à la maison. Il faut trouver un juste milieu entre les recommandations qu'on fait et la continuation de la vie sociale."

L'une des solutions envisagées serait d'autoriser des tests moins invasifs, comme les frottis dans la gorge ou le prélèvement salivaire. Le diagnostic est moins précis mais permettrait de dépister plus de cas chez les jeunes enfants et surtout, d'avoir des chiffres. Car en l'absence de chiffres, on ne sait toujours pas réellement dans quelle proportion les enfants sont touchés par la maladie. Une question cruciale pour gérer la suite de l'épidémie.

Sophie Iselin/ther

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"Il n'est pas prouvé que ces dépistages apportent quelque chose"

Invité du 12h30 pour réagir à la possible future décision de l'OFSP sur les enfants de moins de 12 ans, Claude Bertoncini, président du groupement des pédiatres vaudois, n'estime pas ces dépistages nécessaires.

"Jusqu'à maintenant, on ne nous a pas prouvé que ce dépistage systématique changeait quelque chose sur l'épidémie (...) on a bien vu qu'entre mai et juin, et alors qu'on testait systématiquement, on avait des taux de 0,2% de tests positifs chez les enfants et que l'épidémie, avec la reprise des écoles, et malgré toutes les inquiétudes des épidémiologues et des infectiologues, n'a pas vu les cas augmenter".

Le pédiatre juge par ailleurs que le but ne doit pas être celui de "faire des statistiques" à partir du moment où il n'y pas d'incidence sur la santé publique. Il souligne également la souffrance que peuvent infliger ces tests: "On a fait souffrir des enfants avec des frottis invasifs".

Il craint également une surcharge des services si les tests deviennent systématiques, surtout durant la période hivernale: "On est plusieurs pédiatres à tirer la sonnette d'alarme pour dire que si les cabinets doivent passer leur temps à répondre au téléphone et faire des certificats pour que les enfants puissent reprendre l'école ou encore faire des frottis, on risque clairement d'être submergés et de ne pas voir les infections plus graves qu'on repère chaque hiver, et c'est un risque de santé publique pour les enfants."

>> Réécouter l'interview intégrale de Claude Bertoncini, président du groupement des pédiatres vaudois :

Claude Bertoncini. [https://www.lasource.ch]https://www.lasource.ch
L’OFSP pourrait bientôt recommander le dépistage du coronavirus chez les moins de 12 ans / Le 12h30 / 3 min. / le 4 septembre 2020