Selon les chiffres de l’Office fédérale de la statistique, le nombre de catholiques et de protestants a considérablement baissé en Suisse ces cinquante dernières années, alors que le nombre de personnes qui se considèrent sans appartenance religieuse a explosé.
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La transformation du paysage religieux a des conséquences sur la fonction sociale des bâtiments de culte. De nombreuses initiatives fleurissent afin de remplir ces lieux délaissés par les fidèles. Selon Johannes Stückelberger, historien de l’art et spécialiste de la conversion des églises, il existerait en Suisse 200 églises, chapelles et monastères qui ont été utilisés à d’autres fins ces 25 dernières années.
C’est le cas de l’école de musique de Pully, où les cours se donnent désormais au sein de l’Église du Coteau. La commune a investi 700'000 francs pour créer six salles de musique dans le temple protestant. La transformation a débuté en 2009 avec la création d’une garderie dans la cure du bâtiment. "On avait des besoins non satisfaits pour l’accueil de la petite enfance et pour la fanfare de Pully qui cherchait des locaux. Nous avons comblé cette demande en utilisant un espace vide. C est un édifice qui fait partie du patrimoine, lui redonner vie permet aussi de garantir son maintien", explique Gil Reichen, syndic de Pully, au 19h30 de la RTS.
Maison de quartier ou lieu solidaire
Les politiques font le même constat partout en Suisse romande. Peu fréquentées, trop chères à entretenir, de plus en plus d’églises sont réaffectées à d’autres utilités.
À Lausanne, le Temple de St-Luc est devenu depuis 2013 la maison de quartier de La Pontaise. L’espace accueille des jeunes et des manifestations, ainsi qu’un réfectoire scolaire.
À Genève, le Temple des Pâquis s’est transformé en lieu solidaire depuis 2009 et accueille plus de 180 personnes en situation de précarité par jour. L’espace propose des repas, mais aussi de nombreux services comme des ateliers de français, une permanence juridique et des activités culturelles pour les migrants et sans domicile fixe.
Désacraliser le bâtiment
Si la réaffectation des Églises est une réalité, la transition peut s’avérer douloureuse pour les catholiques comme pour les protestants. "Perdre un lieu symbolique peut être perçu comme un deuil pour les fidèles et le processus peut être long. Désaffecter une église ne se fait pas du jour au lendemain", témoigne Bernard Litzler, directeur du centre Catholique des médias.
Pour qu’une Église soit réaffectée, il faut d’abord l’accord de l’évêque. Vient ensuite un processus de désacralisation. "Une dernière messe sous forme d’adieu s'y déroule. Comme pour les obsèques, les prêtres revêtent les habits liturgiques correspondant au deuil. Après la messe, on évacue les objets sacrés, comme les reliques, les calices et les croix", décrit-il.
Eglises converties en surface habitable
Dans d’autres pays européens, les institutions religieuses manquent également de ressources afin de continuer à entretenir la totalité de leurs lieux de cultes. La transformation du paysage religieux dans certains pays du Nord comme les Pays-Bas a donné lieu à une tendance: la conversion d’églises en surface habitable. Loin d’être généralisée, la pratique concerne souvent des clients privés faisant appel à des architectes qui transforment les bâtiments en résidences luxueuses, galerie d’art ou boîtes de nuit.
En Suisse, le phénomène reste rare. Il existe cependant quelques exceptions, à l’exemple de la chapelle Saint-Luc à Berne qui a été reconvertie en espace habitable en 2013 par le cabinet d’architecture Morscher.
Sujet TV: Katia Hess
Adaptation web: Sarah Jelassi