Lors de la séance du Grand Conseil, le PS a déclaré que Dignitas
«violait les principes éthiques fondamentaux de notre société avec
sa pratique actuelle». Se référant aux récents cas d'assistance au
suicide sur un parking, il a accusé l'organisation «d'utiliser des
personnes gravement malades pour faire pression sur la
société».
Les socialistes ont aussi exigé que le Conseil fédéral «agisse
enfin». «Celui qui aujourd'hui prétend encore qu'il n'est pas
nécessaire d'agir se rend moralement complice», selon eux. Le
gouvernement zurichois attend lui aussi que le Conseil fédéral se
décide maintenant à légiférer, ce qu'il a refusé de faire jusqu'à
présent, estimant que la législation actuelle suffisait à combattre
les abus (lire ci-contre).
Les yeux rivés sur Blocher
«Nous espérons beaucoup que Christoph Blocher changera d'avis»,
a dit à l'ATS le secrétaire général du département cantonal de
justice et police, Christian Zünd. Si ce n'est pas le cas, le
Conseil d'Etat zurichois mise sur la pression du Parlement, qui
tient sa prochaine session en décembre, pour faire bouger les
choses. Deux motions sont pendantes, a rappelé Christian
Zünd.
En dernier recours, le gouvernement zurichois tentera de
convaincre la Conférence des directeurs des départements cantonaux
de justice et police (CCDJP) de s'entendre sur des lignes
directrices contraignantes pour les organisations d'aide au
suicide. Cela fait peu de sens que Zurich légifère tout seul, a
expliqué Christian Zünd. Car si Dignitas ne peut plus pratiquer
comme elle l'entend dans ce canton, elle partira ailleurs, selon
lui. Et le problème se reposera dans un autre canton.
Dialogue difficile
Le Département zurichois de justice et police a déjà élaboré des
standards minimaux, que les organisations d'aide au suicide
s'engageraient à respecter sur une base volontaire. Toutefois, tant
Dignitas qu'Exit ont rejeté ces propositions. De nouvelles
discussions doivent avoir lieu en décembre, mais les autorités
cantonales ne pensent pas qu'elles déboucheront sur une solution.
«Nos positions respectives sont trop éloignées les unes des
autres», a expliqué Christian Zünd.
Les standards porteraient sur la formation du personnel, les
qualifications des médecins examinant les candidats au suicide, le
contrôle des finances ou encore la limitation du nombre de cas
d'assistance par année.
Des voisins de Dignitas déboutés
Les voisins de Stäfa (ZH), qui voulaient
faire interdire à Dignitas d'exercer ses activités d'aide au
suicide dans leur quartier, ont été déboutés lundi par la Cour
suprême du canton de Zurich. La Cour a jugé que des mesures
provisionnelles ne devaient pas être accordées car, de fait,
l'organisation ne peut y poursuivre ses activités suite à une
décision de la commission des constructions.
La Cour suprême zurichoise a également refusé d'accordé 50'000
francs de dommages-intérêts aux plaignants. Toutefois, comme le
recours n'était pas sans objet, les plaignants, même s'ils devront
indemniser la partie adverse, n'auront pas à payer la totalité des
frais de justice, une part étant à la charge de Dignitas.
L'organisation a fait les titres de l'actualité ces derniers jours
en utilisant des véhicules sur une place de parc à Maur (ZH) pour
prendre en charge des candidats au suicide. Elle est en effet
devenue indésirable dans les hôtels et appartements utilisés
auparavant.
agences/sun
L'inaction de Berne ne fait pas l'unanimité
Le suicide assisté fait couler beaucoup d'encre à l'étranger et des politiciens suisses réclament depuis longtemps une législation sur le sujet.
Mais le ministre de justice et police Christoph Blocher l'estime inutile et ne veut pas en entendre parler. Le conseiller fédéral a plusieurs fois déclaré que l'actuelle réglementation libérale a fait ses preuves.
Selon lui, il suffirait d'appliquer toutes les dispositions en vigueur pour éviter les abus. Le Conseil fédéral a toujours soutenu Christoph Blocher, la dernière fois en août, lorsqu'il a refusé de durcir la réglementation concernant le natrium pentobarbital, souvent utilisé comme drogue létale.
Tous les parlementaires ne sont pas de son avis. La nouvelle conseillère aux Etats Christine Egerszegi (PRD/AG) a déposé une initiative parlementaire réclamant une législation complémentaire.
Dans une autre initiative, le conseiller national Ruedi Aeschbacher (PEV/ZH) veut interdire le tourisme de la mort en limitant l'assistance au suicide aux personnes résidant en Suisse.
Au PS, le candidat tessinois au Conseil des Etats Franco Cavalli a également réclamé lundi de nouvelles dispositions légales sur les ondes de la radio alémaniques DRS. Selon l'oncologue, l'aide au suicide devrait être confiée aux médecins et aux hôpitaux.
Dans les hôpitaux, les cas sont rarissimes
Des suicides assistés ont déjà été pratiqués dans des hôpitaux de soins aigus en Suisse, mais ils se comptent sur les doigts d'une main. Ces établissements ont une pratique très restrictive, qui barre la route au tourisme de la mort.
Les conditions posées sont très sévères, révèle un dossier publié par la Société suisse d'éthique biomédicale (SSEB) sur internet.
La réglementation du CHUV, qui tolère le suicide assisté, et celle de l'Hôpital universitaire de Zurich, qui l'interdit en principe, reviennent au même: la pratique doit rester exceptionnelle, a constaté au printemps l'Hôpital de l'Ile à Berne.
Faute de lignes directrices internes - elles sont en préparation -, l'hôpital universitaire bernois étudie les demandes au cas par cas. Il a autorisé un suicide assisté en avril, a révélé la presse dimanche. C'est le seul cas à ce jour