En deux semaines, le nombre de patients hospitalisés à cause du Covid-19 a plus que quadruplé en Suisse. Cette hausse s'avère nettement plus rapide que celles observées dans les pays voisins, d'après une analyse de la RTS.
La situation se dégrade dans les hôpitaux suisses. Vite, très vite même depuis deux semaines. En 14 jours, le nombre de patients Covid-19 hospitalisés a grimpé de 345%. Il est passé d'environ 500 à plus de 2200, soit plus du quadruple.
"Si la tendance reste inchangée, les capacités des hôpitaux seront dépassées dans les prochaines semaines", a déclaré vendredi le chef de la Task Force scientifique de la Confédération, Martin Ackermann.
La France, l'Italie ou l'Autriche ont aussi vu leurs hôpitaux se remplir de malades du coronavirus. Leur nombre a doublé en deux semaines dans ces régions, voire presque triplé en Italie. Mais cela reste beaucoup moins rapide que la croissance constatée en Suisse.
La flambée des hospitalisations en Suisse est même plus brusque que celles enregistrées dans les deux pays d'Europe les plus touchés, la Belgique et la République tchèque, comme le montre le graphique ci-dessous.
La Suisse rattrape la France et l'Italie
La situation semblait pourtant plutôt calme dans les hôpitaux helvétiques au début du mois, même si certains indicateurs viraient déjà au rouge. Contrairement aux pays voisins, la courbe des hospitalisations n'avait pas décollé. Mi-octobre, la Suisse affichait encore le taux de malade par habitant le plus faible parmi ces régions.
Puis, avec cette croissance exponentielle du nombre de patients, la Suisse a dépassé le Royaume-Uni et l'Autriche, et rattrape désormais l'Italie et la France.
"Mesures pas à la hauteur"
L'épidémie obéit à une logique froide et mathématique. La hausse rapide des hospitalisations à partir de mi-octobre suit, avec environ une semaine de retard, l'augmentation exponentielle des cas.
"La Suisse a été moins stricte dans l'application des gestes barrières, le pays a l'un des taux de reproduction du virus les plus élevés d'Europe", indique l'épidémiologiste Antoine Flahault pour expliquer cette évolution très brutale. "Il y a eu peu de masques dans les commerces, notamment en Suisse alémanique lorsqu'il n'était pas rendu obligatoire, peu d'harmonisation des mesures, mais aussi peu de prise de conscience par le public de la vague arrivante."
Le directeur de l'Institut de santé globale à l'UNIGE regrette le manque d'anticipation des autorités: "Les mesures en Suisse ne sont pas à la hauteur des enjeux depuis la rentrée. Il faut questionner l'ouverture des bars, des restaurants, des salles de sport, des chorales, des lieux de cultes, des établissements scolaires, mais aussi les rassemblements privés. Tous sont des lieux reconnus de propagation dans toute l’Europe."
Baisse timide de la mobilité
Mais l'épidémiologiste ne met pas uniquement la faute sur les politiques. "La population n'a pas encore pris conscience de la gravité de la situation", ajoute Antoine Flahault, citant l'exemple irlandais.
Les Irlandais ont pris de vitesse leurs autorités. Face à l'augmentation des cas, ils ont massivement réduit dès le début octobre leur mobilité, bien avant le confinement ordonné le 21 par l'Etat. Résultat: le pic de la deuxième vague a été atteint le lendemain du confinement, quand celui-ci n'avait pas encore provoqué d'effets.
En Suisse, les indicateurs ne montrent pas de réduction très marquée de la mobilité. Le taux d'occupation des trains diminue depuis la semaine du 12 octobre, mais la baisse reste timide et sans comparaison avec celle enregistrée lors du semi-confinement.
Les données de mobilité de Google, citées dans cet article, présentent la même tendance. Il est donc peu probable que la courbe des hospitalisations fléchissent ces prochains jours.
>> L'interview d'Antoine Flahault sur les nouvelles mesures du Conseil fédéral :
Valentin Tombez
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