La Fédération suisse de gymnastique est mise en cause après des révélations d'abus, d'humiliations et de mauvais traitements dénoncés par huit anciennes gymnastes de haut niveau. Dans une interview publiée lundi dans le Tages-Anzeiger, la conseillère fédérale en charge des sports Viola Amherd a dit avoir été "très préoccupée" que des jeunes femmes et adolescentes aient été humiliées et que leur dignité ait été attaquée.
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Ce n'est pas acceptable que des enfants et des jeunes en pleine puberté soient soumis à une pression telle qu'ils en perdent totalement leur assurance et leur confiance en eux, dit-elle. "Les médailles ne doivent pas être le seul critère de performance."
Il existe dans certains domaines une culture de la peur qui n'est pas tolérable, assène-t-elle face au constat que la plupart des jeunes femmes n'ont osé parler qu'après avoir arrêté la compétition. Pour la conseillère fédérale, les responsables politiques et des fédérations sportives ont trop longtemps détourné le regard. Il faut désormais revoir le système en profondeur.
Chartes éthiques insuffisantes
Les aspects éthiques devront jouer un plus grand rôle dans la promotion du sport. Une charte de Swiss Olympic existe déjà, mais celle-ci ne suffit pas s'il n'y a pas de suivi de la part des responsables. À l'avenir, les directives devront être prises en compte dans la distribution des fonds. Sinon, la culture et les comportements fautifs perdureront.
Pour l'instant, Viola Amherd dit ne pas vouloir retirer des fonds à la Fédération de gymnastique "pour ne pas punir des milliers de jeunes gymnastes".
Invité lundi soir dans Forum, le président de la Fédération suisse de judo et médaillé olympique Sergei Aschwanden a lui-même été formé à Macolin au sein de l'élite sportive suisse. Selon lui, Viola Amherd a tort de considérer que, dans le sport d'élite, la performance passe avant le respect et l'éthique. Mais "le sport est en train de se professionnaliser toujours plus, et ça entraîne des dérives", dit-il.
Situations "complexes"
"Je me réjouis de constater que le monde politique est en train de prendre conscience de certaines dérives que nous avons dans le sport professionnel, et il faut le saluer", relève le médaillé de bronze des JO de Pékin. "Et il est vrai que certaines fédérations n'ont pas toujours pour première priorité le bien-être des athlètes."
Il note cependant que dans certaines disciplines sportives, la situation est "hautement complexe". "Quand on parle de la gym, vous avez affaire à des jeunes filles principalement mineures qui doivent s'entraîner entre 15 et 20 heures par semaines. Automatiquement, on se retrouve dans une zone grise qui est très délicate", estime-t-il.
Je ne pense pas qu'il y ait une "culture de la peur" qui règne dans les milieux sportifs, réagit-il. Selon lui, la libération tardive de la parole est liée à l'âge des jeunes athlètes. "Quand vous avez des grands objectifs, un rêve olympique, et qu'on vous met une grosse pression, vous n'êtes pas forcément capable de discernement", analyse-t-il.
Pour Sergei Aschwanden, il est désormais important de poser des conditions-cadres pour que les athlètes puissent dénoncer les dérives auprès de personnes de confiance et neutres. À la Fédération suisse de judo, par exemple, il existe des chartes éthiques et une commission disciplinaire auprès de laquelle tout abus peut être dénoncé.
jop avec ats