Même si elle obtient la majorité, une initiative peut trébucher, faute de convaincre dans plus d'un canton sur deux. Si ce scénario est rare, les sondages laissent néanmoins penser qu'il pourrait se réaliser le 29 novembre - une catastrophe pour les initiants, et une planche du salut pour les opposants.
De chaque côté, on cherche ainsi à aligner douze cantons pour gagner. Certains sont déjà acquis, ou déjà perdus. D'autres se trouvent encore entre deux. Durant cette fin de campagne, les deux camps mettent les bouchées doubles - en toute discrétion - sur ces régions stratégiques, un peu à l'instar des "swing states" lors des élections aux Etats-Unis.
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"Nous travaillons comme d'habitude dans tous les cantons", explique Vincent Simon, directeur de la campagne romande des opposants pour Economiesuisse. "Mais il est possible qu'on mette un peu plus d'intensité à des endroits où l'efficacité sera peut-être plus grande." Le responsable reste en revanche muet sur ces endroits, qui font partie "d'une stratégie, qu'on ne dévoile pas". D'autant plus que le camp adverse "jouit d'important moyens financiers, qui lui permettraient d'agir là où nous le souhaitons aussi", pointe Vincent Simon.
Miser sur les Eglises et les partis bourgeois
Même discrétion chez les partisans de l'intiative: aucun détail ne filtre sur les plans ou les budgets. Mais les deux camps l'admettent, l'enjeu se situe dans les cantons plutôt conservateurs comme, côté romand, Fribourg et le Valais. D'où la stratégie des initiants de miser sur les Eglises et de recruter dans les partis bourgeois qui dominent ces régions.
Parmi les recrues, le PDC Georges Mariétan, ancien président du Grand Conseil valaisan, note que les différences supposées dans les pronostics se resserrent. "On a actuellement des opposants qui sont assez engagés. Et du côté des partisans de l'initiative, nous poursuivons un travail d'information, en distribuant des documents de manière soutenue auprès de notre entourage ou de gens qui sont encore dans l'expectative."
Deux types de cantons
En Suisse alémanique, si les "swing states", ou cantons qui hésitent, sont nombreux, certains sont plus faciles à retourner que d'autres. "Il y a deux types de cantons", explique le politologue Claude Longchamp. Le premier est celui des grands cantons très proches de la moyenne suisse, comme Berne et Zurich, très difficiles à influencer. "Alors on s'intéresse aux petits cantons, assez proches de la moyenne, qu'on peut influencer, notamment par les médias ou par la campagne spéciale de certains acteurs", détaille-t-il. Uri, les Grisons, Schwyz ou encore Glaris sont des cantons souvent évoqués par plusieurs observateurs.
Un refus par la majorité de cantons reste toutefois assez exceptionnel. La plupart du temps, les initiatives sont rejetées par la majorité du peuple, et les réussites sont rares. Un refus par les cantons n'a eu lieu qu'à 9 occasions, dont 8 portaient sur des référendums populaires. Le seul rejet d'une initiative par la majorité des cantons a eu lieu en 1955, et portait sur "la protection des locataires et des consommateurs".
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Etienne Kocher/kkub