Cet appel au vert est une réalité en 2020 et se traduit en chiffres. Selon les professionnels du secteur, la demande de villas a connu une forte augmentation: +14% en Suisse; et même +25% dans les petites et moyennes villes, comme Fribourg, Neuchâtel ou Sion. Exit donc les centres urbains bondés.
Année exceptionnelle pour les agences immobilières
Les agences immobilières parlent même d'une année exceptionnelle. Les biens commencent à être plus rares et les prix pourraient même augmenter dans un avenir proche.
Sur la plateforme immobilière Immoscout, quelque 25 millions de requêtes ont été recensées pour le seul mois de juin, alors que la Suisse se déconfinait. En comparaison, cela correspond à une augmentation de 60% par rapport à la même période l'an dernier.
Alors où achète-t-on désormais? Les Suisse ont privilégié des régions offrant espace et nature. L'Arc jurassien, par exemple, connaît un véritable boom. Le citadin ébranlé par la pandémie cherche aussi des biens avec un jardin et un potager.
"Le Covid? Un déclic"
Selon Joëlle Salomon-Cavin, maître d'enseignement à l'Institut de géographie et de durabilité à l'Université de Lausanne (UNIL), il est toutefois peut-être encore trop tôt pour pouvoir affirmer que nous assistons à un exode urbain engendré par le Covid-19.
"Il est quand même vrai que les chiffres évoqués sont impressionnants. Il y a eu un effet Covid sur un désir de campagne. On peut dire que le coronavirus a fonctionné comme une sorte de déclic", estime la spécialiste des relations ville-campagne.
Une histoire de perception
Joëlle Salomon-Cavin estime dans La Matinale de samedi que les crises sont propices au développement d'une perception négative de la ville, opposée à une campagne perçue comme rassurante.
"Pendant la récente crise sanitaire, on a pu voir un certain nombre de figures condamnant la vie urbaine. La première est celle de l'entassement, de la promiscuité et de la surdensité. Cela a été opposé à l'idée d'une campagne où il y a beaucoup d'espace", développe la chercheuse.
"Cette idée est aussi liée à celle de ville malsaine, insalubre, nuisible à la santé et donc propice au développement des épidémies. Normalement, on en parle plutôt par rapport à la pollution, mais la pandémie a montré que la proximité pouvait diffuser une maladie, en opposition au bon air sain de la campagne", image-t-elle.
Joëlle Salomon-Cavin relève encore la vision d'une cité urbaine ébranlable en termes d'approvisionnement: "Au début de l'épidémie, on se souvient de la ruée dans les magasins. Le spectre du manque a été très fort. La ville est apparue comme vulnérable, dépendante, ne produisant pas elle-même son alimentation".
Des défis pour les centres urbains
Au mois de juillet, l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne et l'UNIL ont sorti conjointement une vaste enquête réalisée pendant le confinement.
Quatre aspirations majeures en ressortent: la recherche d'un meilleur équilibre de vie, le désir d'un mode de vie moins urbain et plus écologique, la quête du bien-être personnel, mais aussi l'envie d'être plus présent pour sa famille et ses amis.
Joëlle Salomon-Cavin abonde dans cette direction: "Ce que cette période met en avant, c'est peut-être le manque en ville de situations qui sont propices à une certaine qualité de vie. On a pu voir que ça a été horrible, par exemple pour les familles, de se retrouver confinées dans des petits appartements. Cela montre que la ville doit aussi offrir un certain nombre d'éléments liés à la qualité de vie, un accès au vert".
Yann Amedro/Didier Bonvin
Adaptation web: Jérémie Favre