Les débats se sont tout d'abord concentrés sur la nécessité ou non d'une modification de la Constitution pour ouvrir le mariage aux couples homosexuels. Par 22 voix contre 20 et deux abstentions, les sénateurs ont cependant considéré qu'une modification de la loi était suffisante.
Le projet sur la table prévoit une révision du code civil. Pour une partie du camp bourgeois, c'est insuffisant. À leurs yeux, la Constitution se fonde sur une conception traditionnelle du mariage. "La proposition n'est pas conforme à la Constitution", a assuré Beat Rieder (PDC/VS).
Ouvrir le mariage aux couples homosexuels au moyen d'un seul changement législatif reviendrait à affaiblir sa légitimité, a poursuivi le Valaisan. Un sujet de société aussi important devrait être soumis au peuple et aux cantons.
"Il serait politiquement irresponsable de faire autrement", a insisté Beat Rieder. Les débats sur le sujet doivent être menés dans l'espace public et ils peuvent l'être, a abondé Heidi Z’Graggen (PDC/UR).
Aucun perdant
"La formulation de la Consitution est parfaite, limpide, claire. Pourquoi vouloir ajouter des mots inutiles?", a contré Lisa Mazzone (Verts/GE), en citant l'article 14 de la Constitution: "Le droit au mariage et à la famille est garanti".
Ce droit est prévu pour garantir l’accès au mariage contre les obstacles religieux ou économiques du droit cantonal, a souligné quant à lui Carlo Sommaruga (PS/GE) pour la commission. Il n’empêche pas le législateur de modifier les caractéristiques du mariage inscrites dans le code civil, afin d’ouvrir l’institution aux couples de même sexe. C'est même son devoir "d'adapter la loi à la réalité moderne", comme l'ont souligné plusieurs orateurs de gauche.
Une révision de la Constitution n'est pas nécessaire, a également plaidé la ministre de la justice Karin Keller-Sutter. D'autant plus que le peuple s'exprimera de toute manière sur le sujet, un référendum ayant déjà été annoncé. Avec le projet sur la table, "personne ne perd quelque chose. Mais quelques-uns y gagnent", a encore pointé Andrea Caroni (PLR/AR).
Connaître ses origines
Autre pierre d'achoppement: l'accès au don de sperme pour les couples lesbiens. Une partie du camp bourgeois aurait voulu procéder par étapes, en traitant la procréation médicale assistée dans un deuxième temps. La réglementation, ajoutée par le National, laisse de nombreuses questions ouvertes, notamment pour le bien-être de l'enfant, a critiqué Benedikt Würth (PDC/SG).
Un argument balayé par Carlo Sommaruga. La disposition a été précisée en commission pour mieux tenir compte du droit de l’enfant à connaître son ascendance. La présomption de maternité de l’épouse ne sera introduite qu'en cas de don de sperme et non de manière générale. Et la contestation du lien de filiation sera exclue en cas de don de sperme.
Le Genevois reconnaît toutefois qu'une partie des problèmes n'a pas été réglée. Mais elle le sera lors de la procédure d'élimination des divergences entre les deux Chambres. "Un mariage sans famille n'est qu'un demi-concept", a pointé Daniel Jositsch (PS/ZH).
Naturalisation facilitée
Outre le mariage pour tous et l'accès au don de sperme pour les couples lesbiens, le projet prévoit la naturalisation facilitée du conjoint et l'adoption conjointe. Depuis 2018, les partenaires de couples de même sexe sont autorisés à adopter l'enfant de leur conjoint, mais la procédure est longue et risquée.
La réforme doit également supprimer le droit à des dommages et intérêts en cas de rupture des fiançailles, prévu par le code civil. La disposition est jugée dépassée.
Le texte retourne au National.
ats/ebz