Modifié

Le plan de vaccination contre le Covid-19, un véritable défi logistique

Le plan de vaccination contre le Covid-19 de la Confédération, un défi logistique qui s'annonce
Le plan de vaccination contre le Covid-19 de la Confédération, un défi logistique qui s'annonce / 19h30 / 2 min. / le 1 décembre 2020
Deux pharmas ont déjà déposé des demandes d'autorisation pour leur vaccins contre le Covid-19. Alors que les autorités de surveillance comme Swissmedic planchent sur ces dossiers, c'est un autre défi qui s'annonce, celui de la logistique pour vacciner la population. L'OFSP a dessiné sa stratégie.

La stratégie de vaccination de la Confédération a été présentée mardi à Berne pour distribuer les quelque 13 millions de doses pré-commandées chez trois fabricants: Moderna (4,5 millions de doses), AstraZeneca (5,3 millions) et Pfizer (3 millions). Les livraisons sont attendues au premier semestre 2021 et viendront par étape, en fonction de leur mise sur le marché par Swissmedic, l'autorité de surveillance des produits thérapeutiques (lire encadré).

Treize millions de doses, cela représente potentiellement 6 millions de Suisses à vacciner en 2021. Les vaccins seront gratuits et ne seront pas obligatoires, mais tout le monde ne pourra se faire vacciner tout de suite. La commission fédérale pour les vaccinations a défini les groupes prioritaires, parmis lesquelles les personnes à risques, le personnel soignant et le personnel d'encadrement des personnes à risques.

Lorsque les groupes prioritaires auront été vaccinés, toutes les autres personnes qui le souhaitent pourront être vaccinées à leur tour, dans la limite des stocks.

Contraintes logistiques des vaccins

Cette vaccination de masse est inédite et représente un défi logistique immense. Car les premiers vaccins disponibles ont de grosses contraintes. Celui de Pfizer notamment doit être stocké à une température de -80°C. Cela implique la mise en place de mesures de stockage et de transport dans une température constante à -80°C.

Mais ce n'est pas tout. Dans le cas du vaccin de Moderna, il existe aussi des contraintes au niveau des doses elles-mêmes, explique Guiseppe Pantaleo, chef du Département de Médecine de laboratoire et pathologie au CHUV, dans le 19h30: "Dans une ampoule, il y a dix doses. La stratégie était de minimiser la perte de volume associée à une répartition de chaque ampoule. Mais cela implique d'avoir dix personnes disponibles dans les 3 heures pour pouvoir utiliser toutes les doses." Pour le spécialiste, le défi n'est pas la vaccination de masse, mais de vacciner un nombre aussi large dans un temps extrêmement limité.

L'encadrement de l'armée

L'organisation doit donc être réglée comme du papier à musique. Concrètement, la Confédération va acheter les vaccins, qui seront stockés par l'armée dans des lieux sécurisés et tenus secrets.

"Ces derniers mois, nous avons préparé des infrastructures afin d'avoir des entrepôts froids, ou ultrafroids", souligne Daniel Aeschbach, le chef de la pharmacie militaire. L'armée sera également chargée d'acheminer les doses dans les cantons. "Une fois que les vaccins seront délivrés, le stockage et la vaccination incomberont aux autorités cantonales", précise-t-il.

Vaud: 4000 injections par jour

Pour les cantons, l'organisation de la vaccination s'annonce colossale. Il s'agit en effet de volumes inédits. Si l'on considère le canton de Vaud, par exemple, et que l'on table sur une vaccination de 50% de la population, cela représente 400'000 personnes. Chacune devra recevoir deux doses, soit un total de 800'000 injections. Il faudra donc effectuer 4000 injections par jour durant 7 mois.

"C'est du jamais vu, un dispositif totalement inouï", confirme la conseillère d'Etat vaudoise Rebecca Ruiz. Dans le détail, la cheffe du Département de la santé et de l'action sociale évoque les différents scénarios: "Il y aura d'abord une vaccination avec des espaces centralisés. Et lorsqu'on aura à disposition un autre vaccin dont le stockage sera plus facile, nous pourrons faire des vaccinations de masse de manière décentralisée, comme on le pratique aujourd'hui avec la grippe."

"C'est un énorme défi pour les cantons. Aujourd'hui, nous n'avons pas encore assez d'informations pour pouvoir organiser la vaccination", précise de son côté le ministre jurassien de la Santé Jacques Gerber. "Dans le canton du Jura, nous voulons intégrer complètement le personnel de santé dans le plan de vaccination", ajoute-t-il.

>> Les précisions du ministre de la Santé jurassien Jacques Gerber dans le 19h30; :

Jacques Gerber: "Dans le canton du Jura, nous voulons intégrer complètement le personnel de santé dans le plan de vaccination"
Jacques Gerber: "Dans le canton du Jura, nous voulons intégrer complètement le personnel de santé dans le plan de vaccination" / 19h30 / 2 min. / le 1 décembre 2020

Des lieux centralisés et des équipes mobiles

Des lieux centralisés ont déjà été réservés dans les cantons de Zurich et Bâle, qui abritent normalement Art Basel. L'équivalent en Suisse romande serait Palexpo à Genève ou Beaulieu à Lausanne, mais rien n'est encore confirmé de ce côté-là, même si les premiers contacts ont déjà été pris.

Pour les vaccinations dans les EMS, des équipes de vaccination mobiles seront prévues, à l'instar de ce qui se fait pour les tests. A la différence près qu'il faudra mettre en place un système de transport qui assure le maintien de la température.

Toute cette logistique dépendra toutefois d'éléments majeurs qui restent encore inconnus pour l'heure: la date de validation des vaccins par Swissmedic et la date de livraison des doses à la Suisse.

>> Le point sur le plan de vaccination allemand dans le 19h30 :

En Allemagne, les autorités se préparent à lancer au plus vite leur plan de vaccination contre le Covid-19
En Allemagne, les autorités se préparent à lancer au plus vite leur plan de vaccination contre le Covid-19 / 19h30 / 2 min. / le 1 décembre 2020

Delphine Gianora et Feriel Mestiri

Publié Modifié

Vaccins en attente de validation par Swissmedic

Swissmedic ne dispose pas de toutes les informations nécessaires pour délivrer une autorisation pour les trois vaccins contre le coronavirus acquis par la Suisse. Il manque encore des données sur la sécurité, l'efficacité et la qualité.

Selon Claus Bolte, responsable des autorisations chez Swissmedic, des questions ont été posées aux fabricants, qui ont livré les données de leurs études. "Nous manquons de données sur l'efficacité des tests cliniques et sur les sous-groupes importants qui ont participé à ces grandes études."

L'autorité de surveillance des produits thérapeutiques veut par exemple connaître les maladies préexistantes des personnes ayant participé à ces études. "L'acceptation de vaccins aussi rapidement développés exige une grande confiance dans les fabricants et les autorités de contrôle. Il est donc important d'examiner de très près les effets sur les différents groupes de personnes", dit-il encore.

Miser sur plusieurs vaccins représente des avantages du point de vue de son efficacité. Tous ne seront pas aussi efficaces pour tous les sous-groupes de la population. Ne pas dépendre que d'un seul vaccin est aussi moins risqué sous l'angle de la logistique.

La vaccination ne vise pas l'immunité de groupe

La stratégie de vaccination s'articule autour de trois objectifs, a expliqué mardi Virginie Masserey, cheffe de la section contrôle de l'infection de l'Office fédéral de la santé publique (OFSP).

Il s'agit d'abord de diminuer le fardeau de la maladie en réduisant les cas sévères, ensuite de maintenir les capacités du système de santé et de réduire les conséquences sociales et économiques de la maladie.

Dans un premier temps, l'OFSP ne vise pas l'immunité du groupe ou l'élimination du virus car "nous ne savons pas si c'est possible", a précisé Virginie Masserey.