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Les "regrets" du Conseil fédéral sur les adoptions illégales au Sri Lanka

Les regrets du Conseil fédéral quant aux conditions d'enfants adoptés par des familles suisses au Sri Lanka.
Les regrets du Conseil fédéral quant aux conditions d'enfants adoptés par des familles suisses au Sri Lanka. / 19h30 / 2 min. / le 14 décembre 2020
Les autorités suisses ont fait preuve de manquement en n'empêchant pas les adoptions d'enfants srilankais malgré les indices d'irrégularités parfois graves, a reconnu lundi le Conseil fédéral. Les abus s'étendent des années 70 aux années 90.

"Le Conseil fédéral exprime ses regrets sincères envers les personnes adoptées et leurs familles", a déclaré la ministre de la justice Karin Keller-Sutter devant la presse, suite à un rapport publié en réponse à un postulat de la conseillère nationale Rebecca Ruiz (PS/VD). La Confédération et les cantons n'ont à l'époque pas assumé leur responsabilité envers ces personnes adoptées.

Ces manquements sont "manifestes et incompréhensibles", a indiqué la conseillère fédérale. Ils marquent encore aujourd'hui la vie de "ces enfants adoptés qui sont aujourd’hui adultes et veulent savoir d’où ils viennent et ce qui s’est passé", a-t-elle ajouté.

Le Conseil fédéral va prendre des mesures pour soutenir davantage les adoptés dans la recherche de leurs origines. Ces démarches peuvent être longues, compliquées, coûteuses et psychologiquement éprouvantes, sans aucune garantie de succès, souligne le rapport. Il apparaît urgent de développer ce secteur en Suisse.

Commerce international organisé

Malgré des indices manifestes sur des pratiques illégales, les autorités ont traîné à prendre des mesures pour mettre fin à ces dysfonctionnements, comme l'a révélé une étude publiée en février par la Haute école zurichoise spécialisée en sciences appliquées (ZHAW).

Cette enquête indique que près de 11'000 enfants srilankais ont été fournis à des parents dans différents pays européens dans le cadre d'un commerce international organisé, souvent illégal. Les autorités helvétiques ont eu connaissance au plus tard dès fin 1981 d'irrégularités et de cas de trafic d'enfants, révèle l'étude.

>> L'interview de Karin Keller-Sutter :

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L'interview de Karin Keller-Sutter sur les adoptions au Sri Lanka / L'actu en vidéo / 1 min. / le 14 décembre 2020

"Fermes à bébés" avec géniteurs blancs

Au total 881 adoptions ont été accordées entre 1973 et 1997. Les Srilankais adoptés étaient le plus souvent des bébés de quelques semaines ou de jeunes enfants. Ils provenaient de "fermes à bébés", où l'on faisait aussi appel à des hommes blancs pour produire des enfants à la peau la plus claire possible.

Les parents suisses payaient entre 5000 et 15'000 francs pour un enfant. Les mères srilankaises ne recevaient quant à elles que quelques dollars ou même seulement une bouteille thermos. Les intermédiaires au Sri Lanka, parmi lesquels des avocates, étaient eux grassement payés, souvent plus qu'un ministre dans leur pays.

Le Conseil fédéral veut désormais élargir l'étude historique des adoptions illégales en Suisse. Il s'agira notamment d'établir s'il existe des indices d'irrégularités systématiques lors d'adoptions en provenance d'autres pays. Un groupe d'experts passera par ailleurs le système actuel à la loupe.

ats/gma

>> Revoir l'émission Temps Présent sur l'affaire :

Les bébés volés du Sri Lanka, un scandale suisse
Les bébés volés du Sri Lanka, un scandale suisse / Temps présent / 55 min. / le 4 octobre 2018
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