L'annonce de son décès a été confirmée en soirée par le conseiller fédéral Ignazio Cassis. "J'ai pris connaissance avec beaucoup de tristesse de la mort de Flavio Cotti. Son esprit politique continue de souffler sur le Département des affaires étrangères", a tweeté le Tessinois.
Selon La Regione, l'ancien conseiller fédéral serait décédé en raison de complications liées au Covid-19.
Main de fer
Durant les 12 ans passés au gouvernement, le démocrate-chrétien tessinois a dirigé deux départements d'une main de fer. On se souvient surtout du ministre des Affaires étrangères.
Juriste de formation, mais politicien depuis toujours, Flavio Cotti a siégé au Conseil fédéral de 1987 à 1999. Il a été président de la Confédération à deux reprises, en 1991 et 1998.
A la tête de la diplomatie helvétique dès 1993, Flavio Cotti s'est efforcé de consolider la position de la Suisse dans le monde en menant une politique d'ouverture. Il y a connu son apogée en 1996, avec la présidence suisse de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.
Européen convaincu
Le Tessinois a eu la satisfaction de pouvoir fêter peu avant sa démission l'aboutissement des négociations bilatérales engagées avec l'Union européenne après le non à l'EEE de 1992. Européen convaincu, il a toujours défendu la participation entière de la Suisse à l'UE.
Flavio Cotti a aussi contribué au rapprochement de la Suisse avec des organisations internationales, en soutenant notamment sa participation au Partenariat pour la paix de l'OTAN. Il s'est également engagé pour l'interdiction des mines antipersonnel. Il a plaidé en faveur de l'adhésion de la Suisse à l'ONU, mais le peuple n'a dit oui que trois ans après son départ.
Flavio Cotti s'est employé à préserver et développer le rôle de Genève comme siège européen de l'ONU et de nombreuses organisations internationales. Ces efforts ont notamment abouti à l'installation de l'OMC dans la ville de Calvin. En revanche, Genève a dû renoncer à devenir la capitale mondiale de l'environnement.
Certains ont reproché au Tessinois un engagement insuffisant dans le dossier des fonds juifs en déshérence. Cette crise a connu son paroxysme alors qu'il dirigeait les Affaires étrangères.
Flavio Cotti s'est aussi attiré des critiques pour le peu de ménagement avec lequel il a réformé son département. Les fonctionnaires en poste à l'étranger, en particulier, ne lui ont pas pardonné la baisse de leurs traitements. La nomination de personnalités hors sérail à des postes d'ambassadeurs, comme Ueli Sigg à Pékin ou Gret Haller au Conseil de l'Europe, lui a aussi été reprochée.
Ministre de l'environnement
Auparavant, Flavio Cotti avait dirigé pendant six ans le Département de l'intérieur. Il s'y est surtout fait connaître comme ministre de l'Environnement. Il a créé en 1988 l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage. Lorsqu'en 1992 il a placé à sa tête Philippe Roch, alors directeur du WWF, il a provoqué la colère de la droite.
En matière de politique sociale, Flavio Cotti a essuyé une gifle dès son entrée en fonction, avec le non massif du peuple à la révision de l'assurance maladie et maternité en décembre 1987. Après cet échec, il a jeté les bases de la nouvelle loi sur l'assurance maladie et de la 10e révision de l'AVS. Les deux projets ont été menés à terme par Ruth Dreifuss, qui lui a succédé en 1993.
Conseils d'administration
Après son retrait du Conseil fédéral, Flavio Cotti a été pressenti pour exercer le mandat d'émissaire de l'ONU dans les Balkans. Cette charge ayant été finalement confiée au Suédois Carl Bildt, il a rapidement accepté d'autres fonctions au sein de grandes entreprises.
Président du comité consultatif international du Credit Suisse Group, Flavio Cotti a siégé dans les conseils d'administration de Fiat, Georg Fischer et Think Tools. Il a aussi été membre du conseil de la Fondation Jacobs, organisation philanthropique qui œuvre en faveur du développement personnel et professionnel des jeunes.
Au décès de Nelson Mandela, en 2013, l'ancien ministre des affaires étrangères avait dit son admiration envers l'homme qui a symbolisé la lutte contre l'apartheid. "Sa paix intérieure, sa capacité à considérer le passé sans haine et à regarder vers l'avenir sans volonté de se venger ont permis à l'Afrique du Sud de passer à la démocratie sans conflit", avait-il déclaré.
Premier président tessinois du PDC
Originaire de Prato Sornico, Flavio Cotti est né le 18 octobre 1939 à Muralto, près de Locarno. Il a obtenu une licence en droit à l'Université de Fribourg, puis il a exercé la profession d'avocat et notaire à Locarno.
Flavio Cotti est entré en 1964 au Conseil communal (législatif) de Locarno. Il a été membre du Grand Conseil tessinois de 1967 à 1975, puis du Conseil d'Etat jusqu'en 1983. Il s'en est retiré après son élection au Conseil national. En 1984, il a été le premier Tessinois élu à la présidence du PDC suisse.
jfe avec ats
L'hommage du Conseil fédéral
"C’est avec une profonde tristesse que le Conseil fédéral a appris la disparition de l’ancien conseiller fédéral Flavio Cotti", a fait savoir le gouvernement fédéral dans un communiqué, saluant un politicien qui "restera dans les mémoires comme un maître de la recherche du consensus" et adressant ses condoléances à la famille du défunt.
"Flavio Cotti avait la politique dans le sang : son pragmatisme, son ouverture d’esprit et surtout sa capacité innée à tisser des liens, même entre des groupes opposés, étaient manifestes dès son plus jeune âge", poursuit le Conseil fédéral.
Pour le gouvernement, le mandat du Tessinois au DFAE a été marqué par des dossiers délicats, notamment celui des avoirs en déshérence. "Il a alors eu l’occasion de montrer son courage et sa détermination à faire toute la lumière sur le comportement de la Suisse pendant la deuxième guerre mondiale."
"Qui est Monsieur Cotti?"
Le nom du Tessinois reste aussi lié à celui de Jacques Chirac. "Qui est Monsieur Cotti?", avait demandé le président français, en plein discours au siège du Bureau international du travail à Genève, en 1996.
Son conseiller avait alors dû lui souffler que Flavio Cotti était le ministre suisse des Affaires étrangères et président de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).