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L'idée d'un "passeport covid" avance dans les milieux sportifs et culturels

Un passeport sanitaire sera-t-il nécessaire pour assister à un match ou un spectacle en Suisse? [Keystone - Jean-Christophe Bott]
Un organisateur d’évènement culturel ou sportif a-t-il le droit de favoriser l’accès aux personnes vaccinées? / Le 12h30 / 2 min. / le 31 décembre 2020
Un passeport sanitaire sera-t-il nécessaire pour assister à un match ou un spectacle en Suisse? Depuis quelques jours, le débat agite les milieux sportifs et culturels. Si la démarche serait légale, des points doivent encore être éclaircis.

La campagne de vaccination donne de nouvelles perspectives aux clubs sportifs professionnels, contraints d'évoluer à huis clos depuis mi-novembre. L'Association professionnelle des organisateurs de concerts, de spectacles et de festival a émis l'idée d'introduire une sorte de "passeport sanitaire" ou de "passeport covid" qui permettrait aux personnes vaccinées d'accéder aux manifestations sportives et culturelles.

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Il y aurait ainsi une différence de traitement entre vaccinés et non vaccinés. Une idée assumée dans la presse alémanique notamment par Giorgio Behr, président du Kadetten Schaffhausen, club champion suisse de handball, qui plaide pour une séparation des supporters, dès l'entrée au stade, avec potentiellement des tribunes différentes, pour que les deux populations ne se côtoient pas. Les personnes vaccinées seraient privilégiées, dans la vente des billets notamment. Pour Giorgio Behr, un organisateur a des responsabilités et ne peut pas accorder à tout le monde les mêmes libertés.

Protection des données en question

Selon plusieurs avocats, cette différence de traitement est légale dans la mesure où la vente de billets est assimilable à un contrat de droit privé, entre un organisateur et un participant. Il est envisageable de l'assortir de règles particulières. Reste à éclaircir la problématique de la protection des données. Les ligues de football et de hockey sur glace attendent des expertises avant de se prononcer. Ce qui est sûr, c'est qu'une base légale serait la bienvenue pour fixer des règles à l'échelle nationale.

La Suisse n'est pas la seule à envisager ce passeport covid. En France, la loi sur les urgences sanitaires proposait de conditionner les déplacements et l'accès aux transports publics, et à certains lieux, à des tests covid, et subsidiairement à la vaccination. L'idée a provoqué un tollé.

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De son côté, Israël a déjà franchi le pas. Dans trois semaines, l'Etat hébreu va lancer son "passeport vert". Il sera délivré aux personnes vaccinées deux semaines après l'administration de leur deuxième dose. Ce passeport leur permettra d'accéder aux événements culturels et aux restaurants, et d'éviter la quarantaine lors des retours de l'étranger.

Jérôme Jeannin/asch

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Une question éthique délicate

L'idée de rendre la vaccination contre le coronavirus obligatoire pour accéder à certains services est une question délicate, estime la médecin bioéthicienne Samia Hurst-Majno.

"L'accès à des prestations publiques est garanti" par la loi et ne peut être restreint, assure la vice-présidente de la task force Covid-19 du Conseil fédéral dans un entretien diffusé mercredi par plusieurs journaux romands, dont L'Express et Le Nouvelliste. "En revanche, l'accès à des prestations privées ne l'est pas. Si l'Etat voulait empêcher que les acteurs privés agissent de manière différenciée avec les personnes, il faudrait légiférer", ajoute-t-elle.

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La directrice de l'institut "éthique histoire humanités" à l'Université de Genève remarque cependant qu'il y a des limites à la liberté de contracter, notamment "le fait que la prestation réponde à un besoin fondamental". "Si tous les magasins d’alimentation demandaient d'être vaccinés pour faire ses courses, nous aurions un problème", relève-t-elle.

À l'opposé, il sera plus difficile d'empêcher une compagnie aérienne d'imposer la vaccination pour prendre l'avion, constate-t-elle. "Les Etats ont le droit de demander la preuve d'une vaccination contre une maladie comme condition d'entrée".

L'organisation de grands événements se trouve entre deux, poursuit-elle. "C'est une question de droit des personnes, délicate". La commission nationale d'éthique se penche actuellement sur ces aspects-là, selon elle.