Mercredi 18 mars 2020. Des lieux habituellement désertés en semaine connaissent un afflux exceptionnel. Les parcs publics, les rives des lacs et même les cimetières deviennent soudainement les espaces les plus fréquentés des villes. Les travailleurs s'activent depuis leur domicile, du moins ceux qui le peuvent. Les écoles sont vides. Le semi-confinement décrété par le Conseil fédéral est en vigueur depuis trois jours.
Les données de densité de population fournies par Swisscom à la RTS et au Temps dans le cadre de l’Initiative pour l’innovation dans les médias (IMI) montrent un bouleversement complet de l'utilisation de l'espace citadin durant ce mois de mars 2020.
En raison d'une correction des données de Swisscom, cette carte a connu une importante mise à jour le 22.01.2021.
Durant ce printemps, à l'instigation des mesures strictes édictées par le gouvernement, les Romands limitent drastiquement leurs déplacements. Les sorties en plein air se font à proximité du domicile et la pendularité professionnelle est suspendue. Les mouvements entre Genève et sa banlieue verniolane diminuent de moitié. Idem entre Lausanne et Renens, Neuchâtel et le Val-de-Ruz, ou Fribourg et Villars-sur-Glâne.
Durant l'été et après les vacances, une certaine normalité s'installe à nouveau. La carte de la densité des villes ressemblent à ce qu'elle était en février, avant le Covid-19. Pourtant, dès fin septembre, la deuxième vague prend de l'ampleur.
Alors qu'en mars, la réponse du gouvernement avait été très ferme, les mesures sont cette fois bien plus légères. Selon les services du médecin cantonal valaisan, "les mesures décidées (à l'automne) par le canton et la Confédération ont davantage pour objectif de réduire les concentrations de personnes dans des espaces clos que de réduire la mobilité", car l'expérience a démontré que "le virus se propage tout particulièrement dans le cadre privé. Si bien que fin octobre, au pire de la pandémie, les déplacements tendent vers ce qu'ils étaient en février.
Selon Aglaé Tardin, médecin cantonal à Genève, cette mobilité n'a pas modifié la propagation géographique du virus. Elle rappelle par contre que " les personnes qui se déplacent se rendent quelque part où un échange a lieu - commerce, travail, vie sociale, loisirs, sport. Les déplacements sont aussi des indicateurs de la densité des interrelations et des échanges entre les personnes."
Dans tous les cantons romandes, les centres urbains connaissent une fréquentation très élevée, presque normale.
Entre les deux vagues, le bilan suisse du coronavirus s'est considérablement alourdi, passant d'environ 1700 décès à 8200, proche d'un décès pour mille habitants. La mobilité importante des Romands est-elle le signe que les autorités fédérales et cantonales ont failli à contenir l'épidémie? Interrogé, l'Office fédéral de la santé publique considère que "d’après les données de mobilité dont nous disposons, celle-ci a continuellement diminué depuis la mi-octobre". L'office concède néanmoins que "rétrospectivement on peut faire des hypothèses sur l'effet protecteur qu'aurait pu avoir un maintien de la mobilité à des valeurs plus basses que la normale."
Tybalt Félix, avec la collaboration de Paul Ronga du Temps
À propos des données
Cet article a été conçu à partir des données «Mobility Insights» de Swisscom. Ces données anonymisées contiennent des estimations de la densité de population dans des carrés de 100 mètres par 100 mètres et des statistiques de déplacements (par exemple le nombre moyen de kilomètres parcourus depuis une localité donnée). Pour estimer la densité, Swisscom calcule la probabilité qu’un utilisateur de carte SIM Swisscom (60% des parts de marché de téléphonie mobile en Suisse) se trouve dans une zone donnée. Cependant cette localisation a une différence médiane de plus de cent mètres avec la localisation réelle. Si moins de 20 utilisateurs ont été enregistrés durant une heure, une valeur de 0 est donnée au carré pour cette période pour des raisons de protection des données.
Les données concernant les villes s’arrêtent aux limites géographiques de la commune, celles concernant le canton de Genève s’arrêtent aux limites du canton.
Les données de déplacements, basées également sur les données de géolocalisation, recensent tous les déplacements d’utilisateur entre deux positions statiques d'au moins vingt minutes. Sont pris en compte tous les trajets débutant, aboutissant ou passant par une région définie, en l’occurrence le territoire des villes romandes étudiées.