Publié

Pas de réforme de l'AVS sur le dos des femmes, clame une pétition

La réforme des retraites des femmes suscite une passion à la hauteur des enjeux. Une pétition fait un tabac en ligne.
La réforme des retraites des femmes suscite une passion à la hauteur des enjeux. Une pétition fait un tabac en ligne. / 19h30 / 1 min. / le 1 février 2021
La pétition "Pas touche aux rentes des femmes!" lancée par l'Union syndicale suisse fait un carton sur internet. Signée par près de 170'000 personnes, elle s'oppose à ce que les femmes fassent les frais de la réforme de l'AVS, notamment en travaillant jusqu'à 65 ans.

Les femmes touchent aujourd'hui un tiers de moins de rente de vieillesse que les hommes, rappelle le texte, signé notamment par plusieurs conseillères nationales socialistes et vertes. Dans un appel lancé aux conseillers aux Etats, les pétitionnaires demandent une hausse des rentes pour les femmes afin de garantir leur sécurité financière et refusent le relèvement de leur âge de départ à la retraite de 64 à 65 ans.

Dans son projet de réforme AVS21, le Conseil fédéral prévoit en effet une nouvelle fois d'aligner l'âge de la retraite des femmes sur celui des hommes, une mesure qui permettrait de réaliser 1,4 milliard de francs d’économies d’ici à 2030. Pour faire passer la pilule, des compensations sont prévues pour les travailleuses les plus touchées par ce changement, sous forme de rentes plus élevées notamment. Elles devraient coûter 700 millions de francs.

>> Lire à ce sujet : L'USS déplore la baisse des rentes des femmes et craint pour le 2e pilier

Une commission des Etats veut raboter les compensations

Lors de son examen de la nouvelle réforme de l'AVS vendredi dernier, la commission de la sécurité sociale du Conseil des Etats a cependant décidé de couper dans les compensations pour limiter les coûts de la réforme, par 6 voix contre 4 et 3 abstentions.

Seules les femmes qui atteindraient 65 ans dans les 6 années suivant l'adoption de la réforme (contre 9 dans le projet du Conseil fédéral) auraient droit à ces compensations. Leur coût serait ainsi ramené de 700 à 440 millions de francs. Autre point qui fâche, une retraite anticipée ne serait possible qu'à partir de 63 ans au lieu de 62 selon le projet initial.

Six propositions de minorités veulent, au contraire, que les femmes touchées par le passage de l'âge de la retraite à 65 ans bénéficient de rentes plus élevées. La plus généreuse demande des compensations à hauteur de 2,65 milliards de francs.

>> Les précisions de Forum :

Une pétition contre l’élévation de l’âge de la retraite pour les femmes cartonne
Une pétition contre l’élévation de l’âge de la retraite pour les femmes cartonne / Forum / 5 min. / le 1 février 2021

44% des femmes sans 2e pillier

"Cette révision de l'AVS se fait sur le dos des femmes", a résumé lundi soir dans Forum la militante de la grève des femmes Geneviève de Rahm. "Tout le long de leur vie, les femmes subissent des discriminations, au travail, à la maison et ailleurs. Il n'y a pas de raison qu'elles paient encore au moment de la retraite", estime-t-elle.

Pour Avenir Suisse, à l'inverse, des mesures d'économie sont indispensables. "L'AVS fait face à des défis financiers énormes. On parle d'un déficit cumulé de 29 milliards jusqu'à l'horizon 2030", a réagi son directeur romand Jérôme Cosandey. Il a rappelé que, lors de l'introduction des rentes AVS en 1948, l'âge de la retraite des femmes était le même que celui des hommes, avant d'être abaissé à 63 puis 62 ans. "Les mauvaises langues disent que les hommes, typiquement plus âgés que leurs épouses, ne voulaient pas se retrouver seuls à la retraite". Un système assez patriarcal, en somme, avec un abaissement décidé "par des hommes" car intervenu avant l'octroi du droit de vote aux femmes en 1971, avance Jérôme Cosandey.

Pour Geneviève de Rahm, toutefois, "ce système patriarcal est aussi celui qui fait que les tâches domestiques et éducatives ne sont pas partagées, celui qui oblige les femmes à travailler à temps partiel, et donc à toucher plus tard des rentes à temps partiel". En 2018, a-t-elle souligné, 44% des femmes arrivées à l'âge de la retraite ne touchaient d'ailleurs même pas de rente du 2ème pilier.

>> Ecouter le débat entre Geneviève de Rahm et Jérôme Cosandey dans Forum :

L’engagement sur l’âge de la retraite des femmes surprend les parlementaires : débat entre Jérôme Cosandey et Geneviève de Rahm
L’engagement sur l’âge de la retraite des femmes surprend les parlementaires : débat entre Jérôme Cosandey et Geneviève de Rahm / Forum / 5 min. / le 1 février 2021

Vincent Cherpillod avec ats/ms

Publié

Les conseillers d'Etat gardent la tête froide

A quelques semaines du vote de la Chambre haute, les quelque 170'000 signatures récoltées en peu de temps exercent une pression inédite sur le Conseil des Etats, qui se prononcera sur les propositions de sa commission lors de la session parlementaire de printemps, en mars prochain.

Interrogé par la RTS, le PLR neuchâtelois Philippe Bauer note que le recueil d'un grand nombre de signatures en peu de temps sur internet n'est pas forcément un indicateur fiable. Il compte prendre sa décision en son âme et conscience, en faisant fi de la pétition. Le discours est un peu plus nuancé chez son collègue de parti Olivier Français, pour qui le texte a tout de même le mérite d'attirer l'attention des sénateurs sur la décision de la commission. Il admet qu'il sera sans doute mieux préparé à voter le jour venu et pense qu'il ne faut jamais ignorer ce genre de réaction populaire.

Nombreux coups de téléphones de proches

Plusieurs conseillers aux Etats déclarent aussi avoir été surpris, le week-end dernier, de recevoir de nombreux coups de téléphones de proches qui s'interrogeaient sur cette décision de commission, la pétition ayant été largement partagée, notamment sur WhatsApp.

La sénatrice socialiste tessinoise Marina Carobbio s'en est réjouie. Pour elle, le Conseil des Etats ne peut pas rester sourd face aux inquiétudes de la population. Si le projet de réforme de l'AVS n'est pas jugé suffisamment équilibré, il ne passera pas la rampe devant le peuple, estime-t-elle.

Légère hausse de l'AVS pour les couples mariés

Si les femmes s'en tirent moins bien que prévu après les propositions de la Commission de la sécurité sociale du Conseil des Etats, c'est l'inverse pour les couples mariés. Ces derniers reçoivent actuellement une rente AVS et demie pour deux. Afin d'atténuer cette inégalité de traitement, elle a décidé de faire un geste et propose de fixer leur rente à hauteur de 1,55 fois celle d'un célibataire, pour un coût de 650 millions.