Basé à Boudry (NE), EP Automation produit des masques chirurgicaux depuis l'été dernier. Grâce à la fidélité de plusieurs hôpitaux, de grandes entreprises prestigieuses et de quelques pharmacies du canton, l'entreprise atteindra une production mensuelle de deux millions de masques dès le mois de mars.
Nicolas Choain, directeur d'EP Automation, aurait toutefois espéré une collaboration différente avec les autorités cantonales, qui ne lui ont passé qu'une seule commande de 500'000 masques.
Qualité supérieure
"On génère de l’emploi, on génère du profit et donc des impôts pour le canton. A cela s’ajoute la qualité supérieure de nos produits. Ce sont des arguments qui compensent le coût légèrement supérieur par rapport aux masques chinois," explique Nicolas Choain dans le 19h30.
Récemment interpellé sur la question par le député PLR neuchâtelois Fabio Bongiovanni, le ministre en charge de la Santé, Laurent Kurth, rétorque que "l’offre neuchâteloise est arrivée après la première vague, après la situation de grande pénurie du printemps et après la reconstitution de quatre à six mois de stock."
Et de préciser: "Une fois que cette offre a existé, elle a été utilisée. On a commandé plus d’un million de masques." Nuance de taille, la moitié de cette commande a été passée auprès d’une entreprise des Montagnes neuchâteloises qui importe ses masques de Chine.
Si la demande suisse n’augmente pas, la production régionale menace de péricliter
La problématique dépasse largement les frontières cantonales. Outre-Sarine également, les producteurs de masques chirurgicaux peinent à obtenir une vision à moyen terme des autorités cantonales. Alors que l’an dernier le fabricant de Rothrist (AG) Wernli AG a décroché d’importants contrats avec diverses collectivités, le directeur s’alarme de voir la demande s’évaporer progressivement.
"Au départ, les autorités ont joué le jeu, elles nous ont commandé de grandes quantités de masques. Désormais, beaucoup retournent se fournir sur les marchés internationaux. Si la demande suisse n’augmente pas, la production régionale menace de péricliter", déplore le directeur Felix Schönle.
Une stratégie des autorités défaillante
Pour les producteurs du pays, seule une volonté politique sera capable de pérenniser un approvisionnement indigène et de contrer la stratégie chinoise qui, selon eux, vise une reprise du monopole après avoir vendu masques et machines à prix d’or puis cassé les prix pour éliminer toute concurrence autour du monde.
"Il n’y a actuellement aucune stratégie de nos autorités pour encourager la production locale, c’est dommage. Si tous les deux à trois ans, les prix flambent à cause d'une pandémie, alors on ferait mieux de payer un peu plus cher maintenant mais de garantir l'approvisionnement à long terme", souligne Felix Schönle.
Fait cocasse, le salut à long terme de ces lignes de production pourrait venir de l’étranger. A Boudry, certains clients ont envoyé des masques à leurs succursales à l’étranger. Le produit suisse a fait des émules: plusieurs pays, dont la Chine, se sont approchés du fabricant neuchâtelois.
Noémie Guignard/asch