"On apprend au fur à mesure de l’épidémie, mais nous sommes maintenant sûrs que ces anticorps restent au moins 6 à 8 mois dans le sang", s'est réjoui dans le 19h30 de la RTS mardi Milo Puhan, coordinateur de Corona Immunitas, un programme de recherche national étudiant la propagation et l'impact de la pandémie de COVID-19 en Suisse et qui regroupe 14 hautes écoles.
Depuis bientôt un an, il passe notamment l'immunité des Suisses au crible en analysant le sang d'une partie statistiquement représentative de la population, à la recherche d’anticorps.
Vaud champion de l'immunité
Les taux d’immunité dernièrement recensés montrent qu'une grande partie de la Suisse romande a déjà atteint ou dépassé les 20%. C'est le cas dans le canton de Vaud (25%), de Genève (21%) et de Fribourg (20%). En Suisse alémanique, en revanche, ce taux est encore bien plus faible, avec par exemple 8% seulement à Zurich.
Cette différence régionale est difficile à expliquer. "Nous regardons le comportement des gens, le port du masque, le respect des distances, mais on ne peut pas voir de différence entre la Suisse romande et la Suisse allemande. Même les frontaliers n’expliquent pas le phénomène: Bâle en a aussi et a des chiffres beaucoup plus bas. Il y a beaucoup d’hypothèses, mais aucune ne s'est vérifiée jusqu'ici", constate Milo Puhan.
Premiers effets de la vaccination observés
Cette étude permet également aux scientifiques d'observer les premiers effets de la vaccination. "Dans le canton de Vaud, on a trouvé une séroprévalence [nombre de personnes ayant été exposées à un virus] chez les plus de 75 ans très élevée, de plus de 25%. Ca doit être un effet du vaccin, parce qu'il n’y a pas eu autant de personnes infectées dans cette classe d’âge", remarque le chercheur.
Même s'ils constituent un pas dans la bonne direction, les chiffres actuels ne sont cependant pas encore assez élevés pour ralentir la circulation du virus et influencer l’épidémie. "Il n'y a pas vraiment de valeur pour arriver à l'immunité collective", a expliqué la cheffe de l'Unité d'épidémiologie populationnelle des HUG Silvia Stringhini sur le plateau du 19h30.
Pas de seuil bien défini
Selon elle, le seuil à atteindre dépend de beaucoup de choses, des choses qui changent au cours du temps, comme les mesures de protection en place ou les nouveaux variants. "Je ne crois pas qu'un 25% [soit l'immunité atteinte dans le canton de Vaud] soit suffisant pour freiner de manière effective la propagation du virus à l'heure actuelle", avance-t-elle toutefois.
Je ne crois pas qu'un 25% soit suffisant pour freiner de manière effective la propagation du virus à l'heure actuelle
Et le fait que les personnes tombées malades possèdent encore des anticorps contre le Covid-19 six mois après l'infection ne la rassure pas outre mesure: "C'est certainement une super nouvelle. Mais à Genève, on a des données préliminaires qui nous montreraient qu'une infection naturelle ne protège pas systématiquement contre les nouveaux variants", prévient-elle. Et le son de cloche est le même si l'on en croit les recherches menées dans d'autres pays.
Silvia Stringhini s'est en revanche montrée plus rassurante envers les vaccins. "Les données de laboratoire confirment que ceux qui sont actuellement homologués en Suisse offrent une protection contre les nouveaux variants", a confirmé la spécialiste.
>> Son interview dans le 19h30 mardi:
Sujet TV: Natalie Bougeard, Thierry Clémence
Adaptation web: Vincent Cherpillod