Les critères d'autorisation figurent actuellement dans l'ordonnance sur le matériel de guerre. Mais les auteurs de l'initiative dite "correctrice" (Korrekturinitiative) veulent régler ces points dans la Constitution fédérale. Toute adaptation devrait donc être soumise à l'approbation du peuple et des cantons.
Le Conseil fédéral et le Parlement se verraient retirer la compétence de modifier ces critères, déplore le gouvernement vendredi. Les exportations de matériel de guerre dans les pays en guerre civile et les pays qui violent gravement et systématiquement les droits de l'homme seraient interdites sans exception.
Même s'il assure comprendre les objectifs de l'initiative, le Conseil fédéral ne veut pas aller si loin. A l'heure de transmettre le message élaboré par le Département fédéral de l’économie, il propose d'inscrire les critères d'autorisation dans la loi et ainsi "renforcer le contrôle démocratique". Le Parlement pourrait alors adapter les critères d'autorisation légaux et le peuple aurait le dernier mot par le biais du référendum facultatif, explique le gouvernement.
Serrer la vis en matière d'autorisations
Le contre-projet veut aussi durcir la pratique actuelle en matière d'autorisation. Il prévoit de supprimer l'exception pour les pays qui violent gravement et systématiquement les droits de l'homme. La Suisse irait ainsi beaucoup plus loin que les dispositions du Traité sur le commerce des armes ou les instructions de l'UE à ses Etats membres, affirme le gouvernement.
Les exportations dans les pays en proie à la guerre civile demeurent exclues. Avec ces trois mesures, le Conseil fédéral assure qu'il prend en considération les trois objectifs principaux du comité d'initiative.
Champ libre à de possibles dérogations
Le gouvernement se réserve toutefois une compétence dérogatoire lui permettant de s'écarter des critères d'autorisation lorsque des "circonstances exceptionnelles" le justifient. Cette mesure doit cependant être nécessaire à la sauvegarde des intérêts du pays en matière de politique extérieure ou de politique de sécurité.
Le contre-projet comporte enfin une exception pour les exportations de matériel de guerre nécessaire aux interventions visant à maintenir la paix. Elle concerne principalement les opérations de maintien de la paix sur la base d'un mandat des Nations unies ou de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
ats/oang
Récolte de signatures en six mois
L'initiative de la Coalition contre les exportations d'armes vers les pays en guerre civile a été déposée en juin 2019 auprès de la Chancellerie fédérale, après une récolte de signatures effectuée en à peine six mois.
Le texte reviendrait sur un assouplissement décidé par le Conseil fédéral en 2014.
Les entreprises suisses ont exporté pour 728 millions de francs de matériel de guerre vers 71 pays en 2019, soit une hausse de 218 millions par rapport à 2018.
Sur les neuf premiers mois de 2020, ces ventes ont atteint 690 millions de francs, contre 500 millions un an plus tôt.