Casse-tête entre cantons et Confédération pour l'application de l'initiative "anti-burqa"
Pour la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter, c'est aux cantons de régler la mise en oeuvre de l'initiative. Il n'y aura donc pas de loi fédérale "anti-burqa", mais 26 lois cantonales pour régir l'interdiction de se dissimuler le visage dans l'espace public.
Chaque canton pourrait donc interpréter les termes de l'initiative à sa manière, ce qui pourrait conduire à des amendes différentes pour une femme intégralement voilée ou un supporter de foot encagoulé selon le lieu de l'infraction.
Mises en garde des conseillers d'Etat
Certains cantons craignent cette situation. Ainsi, Christelle Luisier, conseillère d'Etat vaudoise en charge des institutions, a tenu à préciser dans Forum "qu'il faut respecter la volonté populaire. La population ne s'attend pas à une partie de ping-pong entre la Confédération et les cantons. On doit maintenant résoudre ces questions dans un esprit de dialogue".
De son côté, Alain Ribaux, conseiller d'Etat neuchâtelois en charge de la Sécurité, a déclaré dans le 19h30 "qu'on pourrait imaginer que les cantons qui ont dit non à l'initiative fixent des peines symboliques. Ce serait contre la volonté populaire".
Mauro Poggia, conseiller d'Etat genevois en charge de la Sécurité, a également relevé dans le 19h30 que "les décisions qui se prennent au niveau national doivent être appliquées par tous les cantons. Il est singulier qu'on se pose la question au lendemain d'une votation de savoir qui va mettre en oeuvre la volonté populaire. Le risque est grand que l'on ait un patchwork de décisions cantonales différentes.
Un certain flou
La règle veut que les cantons soient compétents par défaut, sauf si la Constitution attribue cette compétence à la Confédération. Or, dans le cas de cette initiative, un certain flou règne, a expliqué dans le 19h30 Jacques Dubey, professeur de droit constitutionnel à l'Université de Fribourg: "S'agit-il d'une question de gestion du domaine public? Ou de sanction d'un comportement? Dans le premier cas, c'est de la compétence des cantons, dans le second cas, c'est la Confédération qui est compétente, parce que de manière générale c'est la Confédération qui est compétente en matière pénale."
Il s'agit donc d'une question d'interprétation qui reste à trancher. Si finalement ce sont les cantons qui sont appelés à mettre en oeuvre la loi, la Confédération devra tout de même légiférer sur certains points, notamment la dissimulation du visage aux douanes ou dans les transports publics.
lan avec Valérie Gillioz