Après plus d'une année de pandémie, la population semble s'impatienter de plus en plus. C'est ce qui ressort du septième sondage sur la crise, réalisé par Sotomo pour le compte de la SSR (lire méthode en encadré).
Plus d'un Suisse sur cinq souhaite une réouverture sans délai des terrasses. En outre, 27% plaident pour une reprise d'ici la fin du mois de mars, alors que 22% se contenteraient du mois d'avril.
Par ailleurs, un tiers des personnes sondées estime que les restaurants et les bars doivent pouvoir reprendre du service tout de suite, 23% à la fin mars et un quart en avril. Notons que ce surtout les sympathisants de l'UDC - à près de 70% - qui soutiennent une reprise directe de ces lieux de restauration. Les autres bords politiques réclament majoritairement une réouverture entre la fin mars et avril.
L'envie de réorganiser des rencontres privées à plus de 5 personnes se fait également de plus en plus pressante. Une large majorité des participants au sondage veut pouvoir le faire avant le mois d'avril, soit 35% sans attendre et 28% d'ici deux semaines.
Soutien à la nouvelle stratégie de test
Depuis le 15 mars, tous les tests de dépistage du coronavirus sont pris en charge par la Confédération. Chaque peut désormais disposer de cinq autotests gratuits par mois. Les coûts de cette campagne de dépistage sont estimés à plus d'un milliard de francs pour 2021. Cette nouvelle stratégie du gouvernement est largement soutenue par la population à en croire le sondage.
En effet, 72% des personnes interrogées se disent pour ou plutôt pour cette mesure qui doit permettre d'interrompre les chaînes d'infection de manière ciblée. Un soutien partagé sur l'ensemble du territoire, avec une légère préférence des Romands (75%) par rapport aux Alémaniques (69%).
Comme pour la réouverture sans délai des restaurants, les sympathisants de l'UDC détonnent sur l'échiquier politique. Ils sont 55% à s'y opposer, alors que toutes les autres sensibilités partisanes affichent un très appui à la stratégie du Conseil fédéral.
Regain de confiance envers les autorités
Le sondage s'est aussi intéressé à la confiance de la population envers le Conseil fédéral concernant sa gestion de la crise. Celle-ci a passablement évolué depuis mars 2020. Après une baisse record en janvier, on observe un regain de confiance. Le taux de personnes convaincues ou plutôt convaincues par le travail du gouvernement a gagné 15 points de pourcentage et atteint désormais 49%.
Les auteurs du sondage expliquent cette évolution par l'effet positif des mesures prises par les autorités en début d'année sur la réduction du nombre de cas.
Une confiance qui se reflète sur l'ensemble des bords politiques, à l'exception des votants de l'UDC. La tendance s'est d'ailleurs inversée chez ces derniers: alors qu'ils étaient 54% à soutenir le Conseil fédéral en mars 2020, ils sont aujourd'hui 69% à déplorer sa gestion de la pandémie.
Le moral de la population se dégrade
Un an après le début de la crise, le moral de la population n’a jamais été aussi mauvais. Même si six personnes sondées sur dix affirment encore aller actuellement bien ou très bien, c’est significativement moins qu’au début de l’année (-9 points) et très nettement moins qu’avant la pandémie (-33 points). Le précédent creux datait d’octobre 2020, au moment de la deuxième vague.
La lassitude à l’égard des mesures de restriction, les incertitudes liées à la situation sanitaire ainsi que les revers de la campagne de vaccination semblent peser fortement sur l’humeur des Suissesses et des Suisses. Au total, 13% des répondants reconnaissent un certain mal-être, contre moins de 2% avant la crise. Toutes les classes d’âge suivent la même tendance, mais les jeunes sont clairement davantage touchés.
Le respect de la distanciation sociale se perd
Signe du ras-le-bol croissant face aux restrictions, la population relâche la pression en matière de distanciation sociale. On comptabilise désormais en moyenne plus de 18 contacts étroits (défini comme un contact à moins de 1,5 mètre pendant au moins 15 minutes) à l’extérieur du domicile par semaine, dont six sans masque. Un quart des Suisses signale avoir plus de 21 contacts étroits par semaine.
Ces niveaux se rapprochent de ceux constatés au début de la deuxième vague en octobre dernier, lorsque les personnes sondées déclaraient quelque 21 contacts étroits hebdomadaires en moyenne. Lors de la première vague au printemps 2020, les Suisses avaient très fortement réduit leurs fréquentations sociales, cet indicateur atteignant un creux à trois contacts étroits par semaine.
La crise comme amplificateur des inégalités sociales
Cette septième enquête permet également de mettre en évidence une des conséquences indirectes de la crise: le creusement des inégalités. En mars 2020, l’angoisse de perdre son emploi était relativement faible au sein de la population. Un an plus tard, les personnes issues des ménages les plus aisés ont moins peur. A l’inverse, la crainte a quasi doublé chez les plus pauvres (de 13% à 25%).
La tendance est encore plus nette si on considère les pertes financières. Il y a une année, plus d’un tiers des répondants redoutaient des conséquences financières négatives. Cette préoccupation touchait particulièrement les plus aisés. Aujourd’hui, la peur a changé de camp et les pauvres (39%, +7 points) sont beaucoup plus inquiets d’une telle issue que les riches (15%, -23 points).
Ce sentiment se matérialise dans la capacité des Suissesses et des Suisses à mettre de l’argent de côté. Depuis le début de la crise, près de la moitié des sondés issus d’un ménage gagnant moins de 4000 francs par mois ont vu leur capacité d’épargne fondre un peu (21%) ou beaucoup (25%). Cette part chute à 10% pour les ménages disposant d’un revenu mensuel d’au moins 10’000 francs.
A l’opposé, les plus riches sont extrêmement nombreux à économiser davantage aujourd’hui qu’il y a une année, alors que seule une proportion minime des plus pauvres sont dans cette situation. L’explication est simple: en termes de rentrées financières, les hauts revenus ont beaucoup moins souffert de la crise que les bas revenus; dans le même temps, les occasions de dépenser se sont faites plus rares en raison des restrictions.
Mathieu Henderson et Didier Kottelat
La vaccination convainc de plus en plus
Plus de la moitié des personnes interrogées ont déjà été vaccinées contre le Covid-19 ou sont prêtes à le faire. En octobre dernier, seuls 16% des sondés disaient vouloir se faire vacciner dès que possible et ils étaient 41% dans ce cas au début de l’année. A l’inverse, à l’heure actuelle, un Suisse sur cinq exclut totalement de se faire inoculer le vaccin, en baisse de 4 points depuis janvier. Un peu moins de 30% de la population est encore indécise ou attend davantage d’informations avant de se déterminer.
C’est en Suisse romande que la résistance est la plus forte, devant la Suisse alémanique puis le Tessin. Les femmes et les jeunes sont plus réticents à se faire inoculer le vaccin que les hommes ou les personnes plus âgées. A peine plus de 40% des 15-34 ans sont décidés à se faire vacciner, tandis que près de trois quarts des seniors sont disposés à le faire ou indiquent avoir déjà reçu l’un des deux produits actuellement autorisés en Suisse.
Mais la plus grande disparité quant à l’acceptation du vaccin se niche dans les affinités partisanes. Parmi les sympathisants des principales formations politiques du pays, tous - sauf ceux de l’UDC - sont majoritairement favorables à la vaccination. Près d’un électeur du plus grand parti de Suisse sur deux refuse catégoriquement de se faire vacciner, tandis qu’un peu plus d’un quart d’entre eux y sont favorables.
Méthode
L'enquête a été réalisée du 9 au 15 mars 2021 par le centre de recherche Sotomo pour le compte de la SSR. Un total de 49'909 questionnaires ont été évalués à cette fin. La plage d'erreur est de +/- 1,1 point de pourcentage.