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Le rachat de Heidi.news fait grincer des dents au sein du Temps

Les logos du Temps et de Heidi.news. [Keystone - Christian Beutler]
Le rachat de Heidi.news fait grincer des dents au sein du Temps / La Matinale / 4 min. / le 24 mars 2021
Cinq mois après le rachat du Temps par la fondation Aventinus, c'est au tour du site Heidi.news d'être intégré dans celle-ci. Mais ce rapprochement crée un malaise au sein de la rédaction du Temps, révèle mercredi la RTS. La valorisation du média en ligne est notamment sujet d'inquiétudes.

Les tensions entre la rédaction du Temps et les structures dirigeantes s'articulent autour de deux points: la ligne éditoriale en construction et le rachat en cours du site Heidi.news.

En effet, selon des informations de la RTS, le média en ligne pourrait être acheté cinq fois sa valeur de départ par la structure "le Temps SA" et non par Aventinus, la fondation créée dans le but de soutenir une presse autonome et en particulier pour sauver le quotidien Le Temps.

Heidi.news en difficulté

Cette valorisation pose problème car Heidi.news, start-up créée il y a 3 ans, n'a cessé de perdre de l'argent. Selon nos sources, le site a perdu un million en 2019, et également un million en 2020 mais sa perte a été ramenée à 360'000 francs grâce à un don de 700'000 francs de la Fondation Wilsdorf.

De plus, avec ses 4000 abonnés payants, Heidi.news aurait épuisé son potentiel de croissance dans un petit marché comme la Suisse romande.

Les spécialistes des médias contactés par la RTS n'expliquent pas la valorisation de cette start-up, tout en concédant que celle-ci est un exercice difficile.

Une rédaction sous tension

Quant aux membres de la rédaction du Temps, certains ont l'impression d'être l'instrument d'une opération financière qui permettra aux actionnaires fondateurs de Heidi.news de se rembourser, tout en faisant un bénéfice au passage, parce que l'acheteur est aussi en partie le vendeur.

Tibère Adler, directeur et membre du Conseil d'administration du "Temps SA", est aussi actionnaire majoritaire de Heidi.news, comme Serge Michel, rédacteur en chef et fondateur du site, devenu rédacteur en chef adjoint du Temps depuis le 1er janvier.

De fait, cet achat, qui doit encore être validé par le Conseil d'administration du "Temps SA" composé de quatre personnalités indépendantes et présidé par Eric Hoesli, crée un malaise, même si Tibère Adler, selon nos sources, se serait récusé lors de la séance du 10 mars quand la décision de rachat aurait été entérinée.

Résultat: la rédaction du quotidien Le Temps est sous tension. "On est passé d'un monde de chiffres à un monde de relations. Ces gens se connaissent, s'apprécient et travaillent ensemble depuis longtemps", explique ainsi un interlocuteur de la RTS.

D'autres parlent "de maintenir cette fiction pour justifier le rachat" alors que certains, plus critiques, parlent de cooptation "puisque les postes stratégiques ont été répartis entre personnes d'un même cercle qui écartent les autres du processus de décision".

Pas d'élément à communiquer

La RTS a contacté toutes les personnes dirigeantes, notamment la fondation Aventinus, bailleur de fonds de toute l'opération. Celle-ci estime ne pas avoir de nouvel élément à communiquer. Quant à Eric Hoesli et Tibère Adler, ils affirment que le processus de rachat suit son cours et qu'il est trop tôt pour en parler car toutes les instances ne se sont pas encore déterminées.

Trois mois après son sauvetage, la rédaction du Temps traverse une première crise qualifiée par certains de "problème de gouvernance" ou de "hold-up de notre marque".

Xavier Alonso/lan

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