Apparus il y a quelques années, les assiettes et autres récipients réutilisables commercialisés sous le nom de "bambou" sont "biodégradables" ou parfois "100% naturels", selon leurs emballages.
Mais ils sont en fait composés de matière plastique. "Ce n’est pas du bambou à 100%", explique mardi dans l'émission A bon entendeur Didier Ortelli, chimiste cantonal adjoint à Genève. "Il y a aussi une grande quantité de résine, qui va donner la structure de l’objet. Et cette résine plastique en polymère est fabriquée à partir de mélamine et de formaldéhyde."
Une migration de produits toxiques vers les aliments
Ces dernières années, le système européen d’alerte rapide pour les denrées alimentaires a enregistré de nombreuses notifications concernant ces produits. Le problème: une migration excessive de la mélamine et du formaldéhyde, deux substances toxiques, vers les aliments.
Un groupe d’experts s’est penché sur la question et a conclu que l’utilisation du bambou comme ingrédient dans la fabrication des plastiques en contact avec les denrées alimentaires n’est pas conforme. L’Autriche, la Finlande, le Danemark, les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg ont ainsi déjà retiré ces produits du commerce.
En Suisse aussi, des limites sont fixées pour la migration dans les aliments. Elles s’élèvent, comme en Europe, à 2,5 mg/kg pour la mélamine et à 15 mg/kg pour le formaldéhyde.
Les autorités cantonales ont procédé à plusieurs contrôles ces dernières années et constaté des dépassements. Le canton de Genève a publié ce mardi ses résultats les plus récents: quatre produits testés sur dix libèrent beaucoup trop de ces deux substances.
La chaleur comme facteur aggravant
"La température est un facteur aggravant", constate Didier Ortelli. "Ces objets ne sont pas faits pour être chauffés parce que la chaleur va favoriser la migration de la mélamine et du formaldéhyde jusque dans l’aliment. Nous avons aussi constaté que, par rapport à des objets qui sont 100% en plastique, la présence de fibres de bambou semble favoriser la migration." Les objets testés non conformes ont tous fait l’objet d’une décision de retrait du marché.
Sollicité par A bon entendeur pour réagir à l’interdiction de ces produits dans plusieurs pays européens et savoir si une telle décision est d’actualité en Suisse, l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires répond: "Nous arrivons à la conclusion qu’en Suisse, les plastiques contenant du bambou entrant en contact avec les denrées alimentaires ne sont pas commercialisables / conformes." L’OSAV examine le délai de mise en œuvre de cette décision.
Respecter les conditions d'utilisation
En cas d’utilisation de vaisselle en fibres de bambou, il faut respecter scrupuleusement les conditions d’utilisation prévues par les fabricants. "Le chauffage, l’utilisation du micro-ondes ou des temps de contact prolongés avec les denrées alimentaires sont déconseillés car cela favorise la migration de contaminants dans les aliments", avertit le service de la consommation et des affaires vétérinaires du canton de Genève.
Il est également déconseillé d’utiliser des objets en fibres de bambou avec des aliments dépassant 70 degrés, comme par exemple du thé chaud.
Viviane Gabriel/boi
Sujet développé dans A bon entendeur le 30 mars