L'ancien syndicaliste et ancien président du Parti socialiste suisse, âgé de 50 ans, sera nommé lors de l'assemblée générale du 27 avril 2021 du géant jaune. Le Fribourgeois prendra ses fonctions le 1er décembre 2021. Il devra ainsi faire une croix sur sa carrière politique. Il quittera ses fonctions de sénateur fin septembre.
Christian Levrat siège depuis dix-sept ans sous la Coupole fédérale, d'abord au Conseil national puis au Conseil des Etats. Est-ce qu'il n'aime plus la politique? "Si, j'aime la politique: je l'ai toujours aimée, je vais continuer à l'aimer", affirme-t-il au micro de Forum. "La question qui s'est posée, c'est plutôt une question de priorités, de savoir où était ma responsabilité. Est-ce que c'était d'assumer l'appel du Conseil fédéral et de contribuer au développement du service public et à la sauvegarde des emplois à La Poste? Ou est-ce que c'était de rester sur l'idée première et de servir mon canton au Conseil d'Etat à Fribourg".
Avec sa future nomination à la présidence de La Poste, il renonce aussi à sa candidature au Conseil d'Etat fribourgeois lors des élections cantonales du 7 novembre. Le conseiller aux Etats socialiste s'était lancé dans la course le 21 septembre dernier.
La course à la succession de la conseillère d'Etat Anne-Claude Demierre, qui se retire après quinze au gouvernement fribourgeois, est ainsi relancée. Le PSF choisira en avril la composition de sa liste, qui comprend déjà le ministre sortant Jean-François Steiert.
Bonne connaissance des entreprises
Christian Levrat connaît très bien les entreprises liées à la Confédération grâce à son expérience politique, souligne le Conseil fédéral dans un communiqué. D'abord député, puis sénateur, le Fribourgeois a passé vingt ans sous la Coupole fédérale et de nombreuses années à la commission des transports et des télécommunications. Il officie actuellement comme président de la commission de l'économie et des redevances.
Avant de prendre la présidence du Parti socialiste, qu'il a occupée durant douze ans, le juriste et politologue avait travaillé dans le domaine de l'aide aux réfugiés et occupé des postes de direction dans divers syndicats. Il avait notamment été à la tête du Syndicat de la communication.
Le Gruérien s'est toujours engagé en faveur d'un service public fort, souligne le gouvernement. Il dispose de qualités de conduite avérées et d'un excellent réseau au niveau national et international. Il a aussi une excellente approche de la Suisse avec ses différentes langues et cultures.
Défis à relever
Le Conseil fédéral se dit convaincu que Christian Levrat saura mener à bien le développement nécessaire de La Poste tout en maintenant un service public de qualité.
Le géant jaune est confronté à d'importants défis. Les opérations au guichet et le volume de lettres sont en constante baisse. Malgré l'augmentation des volumes de colis grâce au commerce en ligne, les marges sont faibles et la concurrence s'intensifie. Les recettes de La Poste sont en constante diminution et le financement du service universel par ses propres moyens est menacé.
L'entreprise a déjà pris des mesures dans le cadre de sa stratégie pour les années 2021-2024, précise le Conseil fédéral. Et elle est confrontée à un important processus de transformation.
Successeur d'Urs Schwaller
Le socialiste succédera à Urs Schwaller, 68 ans, lui aussi Fribourgeois. Ce dernier quittera ses fonctions à la fin du mois de novembre. Il a été président du conseil d'administration de La Poste depuis 2016. Le Conseil fédéral remercie d'ores et déjà un homme clairvoyant qui a toujours réagi aux évolutions du marché postal.
Urs Schwaller a également procédé avec beaucoup de professionnalisme dans le dossier des irrégularités comptables chez CarPostal au sein de l'entreprise, rappelle le gouvernement. Il en a tiré les conséquences nécessaires.
ats/Fabrice Gaudiano/jpr
"Garant du maintien du service public", selon les syndicats
Le Parti socialiste suisse et les syndicats saluent la nomination de Christian Levrat à la présidence de La Poste. Celle-ci est garante du maintien du service public, estiment-ils. C'est "une bonne nouvelle pour le service public, les conditions de travail et la sauvegarde des bureaux de poste et autres services postaux de qualité", se félicite le PS sur Twitter.
Christian Levrat est "la personne juste à la bonne place", ajoute la conseillère nationale Greta Gysin (Verts/TI), co-présidente du syndicat Transfair.
De son côté, syndicom part du principe que la stabilité du partenariat social continuera à être garantie avec Christian Levrat. Il se dit ouvert à une collaboration axée sur la recherche de solutions. Parmi les défis à relever, il cite la baisse des recettes de PostFinance, la chute du volume du courrier ou la numérisation, qui a "un impact énorme" sur le modèle commercial du groupe.
Mais ce qui est décisif pour le service public, c’est ce que fait la Confédération, souligne-t-il. C'est elle qui doit définir les garde-fous pour l’avenir postal. "Des solutions durables ne sont possibles que si le Conseil fédéral change sa stratégie", affirme-t-il.
La droite dénonce un "copinage"
Le ton est plus dur à droite. Sur Twitter, le président du groupe UDC aux Chambres fédérales, Thomas Aeschi, accuse la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga de mener "la même politique clientéliste" et la même "politique des petis copains" qu'Alain Berset. Le ministre de la santé avait nommé en 2019 l'ancien conseiller national Stéphane Rossini (PS/VS) à la tête de l'Office fédéral des assurances sociales.
Le vice-président du PLR Philippe Nantermod s'interroge quant à lui "s’il est normal de continuer à nommer les dirigeants" de ces sociétés "sans se soumettre à des procédures de sélection fondées sur les compétences et les besoins de l’entreprise".
Sans vouloir se prononcer sur "les qualités et les défauts" de Christian Levrat, le Valaisan estime "que l’époque où La Poste, Swisscom et les CFF servaient d’outil de réorientation professionnelle pour les anciens élus est dépassée et même incompréhensible pour la population".