Critiques et réflexions autour de la nomination de Christian Levrat à la tête de La Poste
Christian Levrat en patron, voilà qui peut en surprendre plus d'un, lui qui a été la voix du Parti socialiste pendant plus d'une décennie. Mais passée la surprise, le monde politique, même à droite, partage la réflexion du Conseil fédéral: l'homme a pour lui son réseau politique, la connaissance de la branche, et si l'expérience de management d'une grande entreprise lui fait défaut, c'est un homme qui sait se préparer, déclare à la RTS le conseiller national PLR Christian Lüscher, qui se fait peu de souci pour lui dans cette nouvelle fonction.
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Quelques critiques se sont toutefois faites entendre. Celle du copinage, d'abord. Christian Levrat a aidé Simonetta Sommaruga a être élue conseillère fédérale quand il était président du PS. Aujourd'hui, il bénéficierait d'un retour d'ascenseur.
"Ce sont des places qui se filent entre petits copains. Cette captation des places intéressantes, et qui paient, n'est pas saine", fustige le conseiller national Michaël Buffat (UDC/VD). "Pour des mandats où l'on représente l'Etat, il faudrait une ouverture plus grande aux personnes de la société civile qui auraient le profil pour présider un conseil d'administration de cette envergure", estime le Vaudois.
>> L' interview de Michaël Buffat dans La Matinale:
"Christian Levrat a été élu par l'ensemble du Conseil fédéral, et pas par Madame Sommaruga", rétorque le conseiller national Jon Pult (PS/GR). "Or, chacun sait que le Conseil fédéral compte une majorité UDC et PLR, alors je pense que la critique du copinage est instrumentale", estime l'élu socialiste.
Si la critique de la cooptation est partagée parmi les parlementaires UDC, elle ne l'est pas vraiment dans les autres partis. Il faut dire aussi que c'est induit par le système: d'une manière ou d'une autre, tous les conseillères et conseillers fédéraux se retrouvent à nommer des personnes de leur propre camp à un moment donné. L'exemple n'est pas à chercher très loin: en 2016, c'était la PDC Doris Leuthard qui a proposé comme président du conseil d'administration de la Poste son collègue de parti, le Fribourgeois Urs Schwaller, aujourd'hui démissionnaire. Et là aussi, la proximité a été soulignée.
La procédure ne fait pas l'unanimité non plus. Comment, pour Christian Levrat, rester conseiller aux Etats jusqu'à fin septembre en étant élu président du conseil d'administration de La Poste cinq mois auparavant? Selon le conseiller national Marco Romano (PDC/TI), le conflit d'intérêt est majeur, et Christian Levrat devrait démissionner sans délai.
Quant au vice-président du PLR Philippe Nantermod, c'est le processus qu'il questionne: il manque un vrai système de sélection du bon candidat, selon lui, qui mériterait qu'on prospecte au delà des élus en fin de carrière.
Muriel Ballaman/kkub