Les agriculteurs qui renoncent aux pesticides de synthèse montrent qu'il est possible d'être économiquement rentable tout en protégeant la santé publique et l'environnement, ont indiqué Demeter, Bio Suisse et l'Association des petits paysans mardi à Kirchlindach (BE).
Demeter promeut l'agriculture biodynamique, Bio Suisse représente les producteurs bio et l'Association des petits paysans (VKMB) s'exprime au nom de 8000 familles paysannes.
Les pesticides sont partout
Aujourd'hui, les pesticides de synthèse sont partout. Ils réduisent la fertilité des sols, appauvrissent la biodiversité et nuisent à notre santé, a rappelé Christian Vessaz, vigneron et membre de Demeter.
Pour lui qui est passé avec succès à la biodynamie depuis 2013, "il est fondamental que nos sols et nos eaux conservent leur capacité à produire des aliments sains. Cet objectif n'est atteignable qu'en arrêtant d’utiliser la chimie de synthèse".
Comme la politique agricole est actuellement au point mort avec le rejet au Parlement de la réforme PA 22+, l'initiative, en votation le 13 juin, offre l'opportunité d'orienter la politique agricole dans une direction durable, a ajouté le conseiller national Kilian Baumann (Verts/BE).
Dix ans pour changer de pratique
L'initiative prévoit l'interdiction des pesticides de synthèse tant dans l’agriculture que dans l’entretien de terrain comme les jardins privés, les parcs publics ou les voies de chemin de fer. Cette règle s’applique aussi à tous les aliments importés en Suisse, ce qui permet d’éviter une inégalité de traitement pour les paysans suisses, souligne Bio Suisse.
Le texte donne dix ans au monde agricole pour changer ses pratiques, un temps suffisant pour s'adapter et éviter que certaines exploitations restent sur le carreau, selon Regina Fuhrer-Wyss, présidente de l'Association VKMB. La recherche devra également travailler à des solutions pour une production et une industrie alimentaire durables mais rentables.
ats/jpr
L'Union suisse des paysans opposée aux deux textes
L'Union suisse des paysans, qui défend les intérêts de 52'000 familles paysannes, avait de son côté déjà annoncé qu'elle rejetait les deux initiatives, les jugeant "extrêmes".
Celle pour interdire les pesticides de synthèse est incompatible avec les règles de l'Organisation mondiale du commerce. Il faudrait craindre qu'elle ne s'applique qu'à la Suisse, faisant subir un énorme désavantage concurrentiel à l'agriculture suisse. Il faudrait aussi compter avec une hausse des prix des produits sur les étals, les coûts de production bio étant plus élevés.
Quant à celle sur l'eau potable, elle poserait d'énormes problèmes aux exploitations de volailles et de porcs, ces fermiers étant souvent dans l'incapacité de disposer de leur propre fourrage. Les exploitants seraient dès lors devant un dilemme: soit renoncer aux paiements directs pour continuer leur travail, soit renoncer aux filières où ces produits sont indispensables. Il faudrait alors compenser ce manque de production par des importations.
Divisions sur l'eau potable
Les trois organisations ont par contre des positions différentes sur la deuxième initiative "Pour une eau potable propre et une alimentation saine", qui sera aussi soumise au peuple le 13 juin. Alors que Bio Suisse recommande son rejet, Demeter et l'Association des petits paysans laissent la liberté de vote.
"Nous soutenons la direction générale de cette deuxième initiative, mais celle pour l'interdiction des pesticides est la meilleure variante, selon nous", a indiqué Patricia Mariani, co-directrice de VKMB. Elle prend en compte les importations et vise tous les utilisateurs de pesticides de synthèse, des dispositions équitables pour les agriculteurs.