Les avoirs du deuxième pilier sont majoritairement perçus sous forme de rente. Or, lorsqu'il s'agit de toucher cette rente avant l'heure, ce sont principalement les homme qui font ce choix: 46%, contre 40% pour les femmes. La différence entre les sexes est moins grande pour les rentes anticipées versées en capital (43% des femmes les touchent en avance, contre 44% des hommes).
Cette différence corrobore ce qui est observé sur le marché du travail. Les hommes, qui travaillent moins souvent à temps partiel, ont cotisé plus longtemps et ont souvent un meilleur salaire, peuvent davantage se permettre de partir plus tôt à la retraite, car leur 2e pilier est sensiblement plus élevé que celui des femmes: 2144 francs contre 1160 francs pour la rente médiane.
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De plus, la rente médiane des hommes qui prennent une retraite anticipée est nettement plus élevée (2702 francs) que celle de ceux qui partent à 65 ans (1785 francs). Autrement dit, les hauts salaires sont nettement majoritaires dans les départs anticipés. La même tendance est observée chez les femmes (1321 francs contre 990 francs).
A 63 ou 64 ans
Toucher une première rente du 2e pilier ne signifie pas forcément qu'on s'arrête complètement de travailler, signale toutefois le professeur d'économie à l'Université de Genève et à la Haute école de gestion Giovanni Ferro-Luzzi, interrogé dans La Matinale de la RTS mardi. Dans certains cas, le retrait du marché du travail est progressif. "Cela souligne la flexibilité qu'on peut avoir dans l'âge de la retraite en Suisse", affirme le spécialiste, qui estime que c'est entre 63 et 64 ans que le gros de ces personnes commencent à toucher tout ou partie de leur rente ou de leur capital.
Ce sont surtout des personnes qui peuvent se le permettre qui partent à la retraite plus tôt
"Ce sont surtout des personnes qui peuvent se permettre de partir à la retraite plus tôt" qui le font, confirme Giovanni Ferro-Luzzi. La rente que touchent les hauts salaires avant l'âge légal est même souvent plus élevée que celle que touchent les bas salaires à l'âge normal de la fin du travail.
Dans la grande majorité des cas, ces départs sont des choix, avance le professeur d'économie, même s'il admet "qu'une minorité, qu'on considère entre 7 et 8%", a été poussée vers la sortie.
Conditions avantageuses pour la génération actuelle
A ses yeux, le fait que près de la moitié des travailleurs cesse le travail avant l'âge légal n'est pas en décalage avec la volonté d'une partie du monde politique de repousser de 65 à 67 ans l'âge de la retraite. "L'espérance de vie va probablement continuer à augmenter et cela va peser sur le système. C'est le revers de la médaille d'avoir une vie plus longue: ça va nécessiter de financer des rentes sur une période plus longue", estime Giovanni Ferro-Luzzi.
C'est le revers de la médaille d'avoir une vie plus longue: ça va nécessiter de financer des rentes sur une période plus longue
Selon plusieurs spécialistes, la génération qui quitte aujourd'hui en avance le monde du travail profite de conditions plus avantageuses que les générations qui suivront. D'ailleurs, la proportion de personnes prêtes à travailler au-delà de la retraite pourrait à l'avenir augmenter, selon une récente étude de l'assureur SwissLife.
Propos recueillis par Romaine Morard
Adaptation web: Vincent Cherpillod