Quatre modèles sont en lice pour devenir les nouveaux avions de combat helvétiques, à savoir le Rafale français, le projet Eurofighter proposé par l'Allemagne et les deux Américains: le F-35 et le F/A-18 Super Hornet.
A quelques semaines de la décision finale de la Suisse qui disposera de 6 milliards de francs pour faire cet achat, les avionneurs américains Boeing et Lockheed Martin redoublent d'efforts pour convaincre Berne d'acheter "made in USA". Dans le cadre de cette campagne de séduction, ils ont invité la presse suisse dans leurs usines avec la volonté de démontrer la supériorité technologique américaine en matière d'avion de combat.
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Le F-35 de Lockheed Martin
Les journalistes suisses ont tout d'abord visité l'usine Lockheed Martin au Texas. A l'intérieur, une ligne de production d'un kilomètre et demi de long où travaillent 3000 employés. Tony Wilson, le chef des pilotes de test du F-35 qui a volé en Suisse en 2019 avec cet appareil, se dit étonné par les résultats de l'avion, "qui ont dépassé toutes ses attentes".
Le F-35 est un avion high-tech. Pourtant, aux Etats-Unis, un récent rapport du Congrès a relevé plus de 800 failles techniques dans cet avion de cinquième génération. Jim Robinson, le directeur marketing pour le marché suisse du F-35 s'en explique: "Nous travaillons sur ces failles. Et ce ne sont pas des problèmes qui limitent les capacités de l'avion, ou qui mettent les pilotes en danger. Plus de 70% des problèmes identifiés sont informatiques. Nous sommes en train de les régler pour encore améliorer l'avion. Et toutes ces améliorations seront présentes dans l'avion vendu à la Suisse".
F/A-18 de Boeing
Les journalistes sont ensuite invités à se rendre dans l'usine Boeing qui se situe plus au nord, à Saint-Louis dans le Missouri. Ils y découvrent le F/A-18, un avion que les Suisses connaissent bien mais qui a connu des problèmes d'usure. "Le nouveau modèle est plus robuste", assure Jennifer Tebo, vice-présidente du programme F/A-18.
"Le nouveau Super Hornet est l'avion le plus efficace et le moins cher à l'achat. Nous pensons aussi que cet appareil représente la transition la plus facile pour la Suisse. Pas seulement du point du vue des pilotes - qui sont déjà formés sur des F/A 18 - mais aussi en ce qui concerne les équipements et la maintenance," commente encore Jennifer Tebo.
Et comme chez le concurrent Lockheed Martin, un pilote est présent. Il se nomme Helliot Clemence, possède plus 3000 heures de vol sur le F/A-18 et a aussi volé – fait intéressant – sur le F-35. "Chaque avion a ses spécificités, ça dépend de ce dont vous avez besoin, indique le pilote, mais le nouveau F/A-18 est un très bon avion pour voler dans des conditions difficiles." A la question de savoir si c'est le pilote ou l'employé Boeing qui parle, Helliot Clemence répond sans hésiter: "C'est le pilote. Avec mon expérience sur les deux avions."
La voie diplomatique des Européens
Si les Américains ont opté pour une opération marketing, de leur côté, les Européens n'hésitent pas à utiliser la voie diplomatique. On se rappelle de la visite de la ministre française des Armées à Berne en mars dernier pour vanter les mérites du Rafale. On entend aussi qu'acheter un avion européen pourrait aider la Suisse, au moment où il s'agit de négocier un accord-cadre avec l'Union européenne.
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Aux Etats-Unis, avec deux constructeurs américains dans la course, la Maison Blanche se montre plus discrète et laisse d'abord Lockheed Martin et Boeing se lancer dans la bataille commerciale. Il y a quand même eu un coup de fil du chef du Pentagone à la conseillère fédérale Viola Amherd, mais pas de ministre américain en Suisse.
Chez Boeing, on relève, à demi-mot, espérer que l'administration Biden amène une meilleure image des Etats-Unis en Suisse au moment du choix final. Car si acheter un avion de combat est une question éminemment technique, c'est aussi évidemment un choix politique.
Raphael Grand/aq