Le Conseil fédéral a annoncé mercredi qu'il mettait un terme aux négociations en vue de la signature de l'Accord institutionnel entre la Suisse et l'Union européenne. Un poids en moins pour le ministre des Affaires étrangères. "Prendre une décision est toujours un acte qui soulage", a-t-il expliqué jeudi dans La Matinale.
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après l'annonce retentissante venue de Berne, Ignazio Cassis assure avoir tout mis en oeuvre pour mener à bien les négociations.
"Cet accord était devenu difficile. Quand vous y avez mis votre âme pendant trois ans, en courant à droite et à gauche, en faisant toutes les alliances possibles, et que vous voyez qu'à chaque pas en avant il y a de nouveaux obstacles, alors vous vous dites que vous n'êtes pas sur le bon chemin", a-t-il lancé.
Un Conseil fédéral pas monolithique
Le Tessinois précise toutefois que ses collègues n'ont pas tous fait preuve de la même abnégation. "J'ai mis toute mon âme, mais je n'ai pas dit que le Conseil fédéral l'a aussi fait. Dès le départ, une partie du Conseil fédéral n'était pas d'accord de faire cette négociation. Cela n'a pas facilité le travail, mais cette particularité appartient à la culture de notre pays: le gouvernement n'est pas formé d'un seul parti", a rappelé Ignazio Cassis.
Interrogé sur l'avenir des liens entre Berne et Bruxelles, le chef du Département des affaires étrangères a appelé de ses voeux des "changements structurels" dans les relations avec l'Union européenne. Il souhaite davantage de contacts politiques et pas uniquement administratifs.
Quant aux conséquences pour la Suisse après l'échec des négociations, Ignazio Cassis a affirmé que la situation aurait été pire en cas de signature de l'accord. "Il y aura bien sûr une situation de réajustement de la part de certains secteurs de l'industrie qui vont se trouver face à quelques difficultés à surmonter. Le Conseil fédéral fera tout son possible pour leur donner un coup de main, mais il est indéniable que c'est un effort que doit fournir toute la Suisse et pas uniquement la politique."
"Pas de responsable"
S'il évoque les effets "toxiques" du Brexit et la pandémie de coronavirus pour expliquer en partie les difficultés de la discussion avec Bruxelles, l'élu PLR rappelle aussi que les interlocuteurs n'ont pas arrêté de changer. "Je suis le troisième conseiller fédéral à m'occuper de ce dossier. La politique suisse fonctionne comme ça. Je pense qu'il n'y a pas de responsable à désigner pour l'abandon d'un tel projet. La décision du Conseil fédéral était collégiale", a relevé Ignazio Cassis.
"Il y aura des leçons à tirer après quinze ans de négociations qui n'ont rien donné. Quand on démarre une négociation, on le fait dans le but d'aboutir à un accord. Mais pas à n'importe quel prix. L'évaluation finale a justement mis un prix sur la table et le Conseil fédéral a jugé qu'il était trop élevé", a conclu le ministre des Affaires étrangères.
Propos recueillis par David Berger
Adaptation web: Guillaume Martinez
David O'Sullivan: "Une très grande déception"
David O'Sullivan, négociateur européen face à la Suisse entre 2012 et 2014, a fait part jeudi de sa "très grande déception" suite à l'annonce de l'abandon de l'accord-cadre.
"Je l'ai entendue avec beaucoup de regret. Je pense qu'on avait fait beaucoup de progrès. L'accord-cadre sur la table me semble très équilibré, en tenant pleinement compte des intérêts des uns et des autres, et aurait été une excellente base pour construire des nouvelles relations", a-t-il déclaré dans La Matinale.
"Le rejet de l'accord-cadre jette maintenant l'incertitude sur les relations. Il y aura certainement des conséquences pas très positives de cette décision", a ajouté le haut fonctionnaire.