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Les partis établissent des stratégies après l'abandon de l'accord-cadre

Le Parti socialiste est-il partisan d'une adhésion à l'UE? Interview de Fabian Molina
Le Parti socialiste est-il partisan d'une adhésion à l'UE? Interview de Fabian Molina / Forum / 3 min. / le 6 juin 2021
Les partis commencent à dévoiler leurs plans d'attaque après l'échec des négociations sur l'accord-cadre avec l'Union européenne. Le PS relance l'idée d'adhésion à l'UE, les Vert'libéraux veulent rejoindre l'Espace économique européen et le PLR souhaite poursuivre dans la voie bilatérale.

Le PS pour l'adhésion à l'UE

La direction du PS entend forcer le Conseil fédéral à ouvrir les négociations d'adhésion à l'Union européenne, selon la SonntagsZeitung. Le groupe parlementaire socialiste discutera mardi d'une proposition de Fabian Molina (PS/ZH), qui a de fortes chances d'être adoptée.

Interrogé dimanche soir dans Forum, ce dernier rappelle que le PS a toujours été le parti de l'adhésion à l'Union européenne, et que cet objectif figure dans ses statuts. "Il n'y a pas beaucoup d'autres alternatives", estime-t-il, alors que "l'érosion des accords bilatéraux a déjà commencé". "D'un point de vie démocratique, l'adhésion à l'UE est la meilleure solution", en conclut le socialiste. Il juge en outre que, sur la question de la protection des salaires, la Suisse aurait "plus de marge de manoeuvre" si elle adhérait à l'union.

Aussi bien la direction du groupe parlementaire que celle du parti la soutiennent, déclare dans le journal alémanique le chef du groupe parlementaire Roger Nordmann. "Nous devons maintenant briser le tabou autour de l'adhésion", ajoute-t-il. "L'adhésion est la meilleure option sur le plan démocratique et de la souveraineté", selon lui. Si les socialistes sont conscients que la demande d'adhésion risque de rencontrer une forte opposition au Parlement, ils veulent avant tout que le Conseil fédéral se positionne.

Dans Le Matin Dimanche, la coprésidente du PS Mattea Meyer estime qu'une "troisième voie critique et pro-européenne" est possible "entre les isolationnistes et les fans absolus de l'accord-cadre". "Nous devons montrer que nous sommes prêts à apporter notre contribution à la construction européenne, avec le milliard de cohésion, mais aussi en participant au 'Green New Deal', en arrêtant le dumping fiscal, en faisant notre part en matière d'accueil des réfugiés", ajoute-t-elle.

Les Vert'libéraux pour l'EEE

Du côté des Vert'libéraux, c'est plutôt une adhésion à l'Espace économique européen (EEE) qui est prônée. Cette organisation, qui comprend outre l'Union européenne, la Norvège, l'Islande et le Liechtenstein, fonctionne bien, déclare le président du parti Jürg Grossen samedi dans les journaux alémaniques du groupe Tamedia. Selon lui, cette option doit être discutée sérieusement.

L'adhésion à l'EEE offrirait un accès complet au marché intérieur de l'UE, la participation à la coopération européenne en matière de recherche et l'approvisionnement en électricité, souligne le chef des Vert'libéraux, qui précise que l'accord contient même des mécanismes de résolution des conflits. Il ajoute que l'adoption des lois européennes n'est pas automatique, mais dynamique.

L'EEE, auquel les Suisses ont refusé d'adhérer en 1992, n'était pas la voie préférée des Vert'libéraux, mais elle est valable, poursuit le conseiller national bernois. "La solution idéale" reste un accord-cadre, car il permet de stabiliser la voie bilatérale pour longtemps. Ecartant l'adhésion à l'UE, Jürg Grossen estime "pas impossible" une résurrection de l'accord institutionnel enterré il y a dix jours par le Conseil fédéral. Il qualifie en revanche de "pseudo-option" l'idée d'adapter ponctuellement et unilatéralement la législation suisse aux règles de l'UE.

Le PLR pour les bilatérales

La présidente du Parti libéral-radical Petra Gössi est aussi revenue sur la question samedi dans l'émission "Samstagsrundschau" de la SRF. Pour elle, cet échec de l'accord-cadre, qui était largement sous la houlette des conseillers fédéraux du PLR, n'est pas un "fiasco" pour le parti, car l'exécutif est un organe collégial. Il est à ses yeux surtout important qu'une décision ait finalement été prise.

La conseillère nationale schwytzoise estime qu'il faut désormais ramener la relation avec l'UE à une relation de confiance. Pour elle, "les bilatérales restent la voie royale". Le parti n'a aucun intérêt à une adhésion à l'UE et ne veut pas non plus uniquement d'un accord de libre-échange. Petra Gössi juge également qu'une adhésion à l'Espace économique européen n'est pas d'actualité. La Suisse ne peut pas fonctionner seule et les avantages des accords bilatéraux ne doivent pas s'éroder.

Et la présidente du PLR d'estimer que le milliard de cohésion est une monnaie d'échange avec l'UE, mais la Suisse doit recevoir quelque chose en retour. Il est également trop tôt pour discuter de l'opportunité d'augmenter son montant. Il s'agit par ailleurs de faire avancer la question du libre-échange.

>> Ecouter aussi le sujet de Forum sur les divergences du Centre face à l'Europe :

Les partis face à l'Europe, le grand écart du Centre: interview de Charles Juillard
Les partis face à l'Europe, le grand écart du Centre: interview de Charles Juillard / Forum / 11 min. / le 6 juin 2021

boi avec ats

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Des premières victimes

La rupture des négociations sur l'accord-cadre a fait ses premières victimes dans l'économie suisse, écrivent la NZZ am Sonntag et la SonntagsZeitung.

Plusieurs entreprises médicales ne peuvent plus exporter leurs marchandises vers l'UE. Leurs produits certifiés en Suisse ne sont plus reconnus dans l'UE et les entreprises européennes les ont refusés cette semaine par crainte d'enfreindre les règles européennes.

Une des sociétés touchées est MPS-Precimed à Bienne (BE)i emploie 45 personnes et fabrique des forets à os et des fraiseuses de haute précision. Selon son directeur Rudolf Eggen, l'entreprise a perdu environ un tiers de ses affaires du jour au lendemain, soit plusieurs millions de francs.

L'organisme de certification suisse SQS estimait que ses certificats resteraient valables dans l'UE pendant une période transitoire jusqu'en 2024. Le Secrétariat d'État à l'économie a entamé des discussions avec Bruxelles sur ce dossier.