En juin 2016, l'Association interprofessionnelle de l'absinthe a déposé une demande d'IGP auprès de l'Office fédéral de l'agriculture (OFAG). Ce dernier a admis son inscription au registre des appellations d'origine et des indications géographiques en février 2017.
L'Association des artisans-distillateurs d'absinthe du Val-de-Travers et 14 particuliers - en majorité des membres de l'association - ont attaqué cette décision en mai 2017. Déboutés par l'OFAG, ils se sont tournés vers le Tribunal administratif fédéral (TAF).
Représentativité
Dans un arrêt publié mercredi, les juges de Saint-Gall rappellent qu'une demande d'AOP ou d'IGP peut être requise par un groupement représentant au moins 60% des producteurs et la moitié du volume du produit. Cette notion de producteurs comprend aussi les transformateurs et les élaborateurs - l'OFAG désigne ces catégories sous le nom général d'"élaborateurs".
Selon la décision attaquée, les membres de l'Association interprofessionnelle exploitent 18 distilleries professionnelles ou à façon sur un total de 29, soit 62% des producteurs. L'OFAG en a conclu que l'association pouvait se prévaloir de la représentativité exigée par la législation.
De son côté, le TAF reconnaît que la distillation joue un rôle déterminant dans la production de l'absinthe. Cependant, les autres étapes prévues dans le cahier des charges - macération, coloration, réduction, aération et filtration - ont également leur importance dans la fabrication.
Marge de manoeuvre
Cette importance est mise en évidence par la description de l'Absinthe du Val-de-Travers, "une boisson spiritueuse élaborée à partir d'alcool éthylique d'origine agricole, d'eau et d'un mélange de plantes propre à chaque élaborateur, dont la recette a été transmise de génération en génération dans le cadre familial".
Pour les magistrats, même s'il ne procède pas lui-même à la distillation, un opérateur donne ses caractéristiques propres au produit par le choix des plantes du mélange, par exemple. L'OFAG lui-même a reconnu "une large marge de manoeuvre" à celui qui souhaite produire de l'absinthe du Val-de-Travers.
La cour rejette également l'argument selon lequel les petits producteurs ne peuvent pas être pris en considération, car ils produisent essentiellement pour leur consommation personnelle et non à des fins commerciales. L'OFAG affirmait que, dans ce cas, il aurait dû tenir compte de toutes les paysannes fribourgeoises qui confectionnent de la "cuchaule" lors de la demande d'AOP pour cette brioche.
Pour le TAF, il est évident que certains acteurs vendent leur production bien qu'ils passent par une distillerie à façon. Ce fait, admis par l'OFAG, ne permet pas de les exclure des producteurs. L'argument selon lequel leur nombre serait "très aléatoire et volatile" ne peut pas être retenu non plus. Le dossier est renvoyé à l'office afin qu'il se prononce sur l'opposition de l'association recourante.
ats/fgn