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Nicolas Vulliemoz: "Rembourser la fécondation in vitro serait justifié"

L'invité de La Matinale (vidéo) - Nicolas Vulliemoz, médecin spécialiste de la fertilité au CHUV
L'invité de La Matinale (vidéo) - Nicolas Vulliemoz, médecin spécialiste de la fertilité au CHUV / La Matinale / 9 min. / le 9 juillet 2021
Alors que l'infertilité augmente partout dans le monde, pour des causes très variées, les traitements sont de plus en plus efficaces. Mais leur coût est important et la prise en charge par les assurances serait justifiée, selon Nicolas Vulliemoz, médecin-chef du service de la fertilité du CHUV.

Selon les dernières statistiques à disposition, un couple sur six aurait de la peine à concevoir un enfant en Suisse et même un sur cinq en France. Le problème est général sur l'ensemble de la planète, avec entre 8 et 12% de couples concernés.

Les causes peuvent varier d'une région à l'autre, mais il s'agit environ pour 30% d'une cause masculine, 30% de cause féminine, 20% de cause mixte et 20% de cause inconnue, détaille vendredi dans La Matinale Nicolas Vulliemoz, médecin-chef de la médecine de la fertilité et endocrinologie gynécologique au CHUV.

Des causes multiples

Le spécialiste explique aussi que certains facteurs externes peuvent jouer un rôle, notamment les perturbateurs endocriniens sur la qualité du sperme, comme l'ont montré certaines études. "Mais est-ce que cela se traduit sur une diminution de la fertilité? Le chaînon est encore un peu manquant à ce jour."

Il est aujourd'hui démontré que l'infertilité combine plusieurs facteurs, de nombreux petits éléments qui diminuent les chances de conception. Il peut s'agir de diverses lésions des organes de reproduction ou de maladies touchant autant la femme que l'homme. Obésité, dépression, cancer ou prise de médicaments peuvent aussi peser sur la fertilité.

Nicolas Vulliemoz précise que l'âge de la femme joue un rôle important: "La fertilité diminue à partir de 36-37 ans et de manière encore plus importante à partir de 40 ans. De manière concomitante, on a une augmentation du risque de fausse couche, ce qui rend la probabilité d'avoir un bébé moins grande."

L'Organisation mondiale de la santé définit l'infertilité comme l'absence de grossesse après 12 mois d'essai. Le médecin conseille ainsi de consulter après un an de tentatives chez les moins de 35-36 ans et même avant dès 36-37 ans.

FIV ou insémination

Faire un bilan auprès de spécialistes est important, estime Nicolas Vulliemoz. "Pour les couples, il est difficile d'en parler, car cela touche à l'intime, au noyau du couple. Mais ce tabou est en train de diminuer et c'est un bienfait de pouvoir en parler à un médecin, à sa famille, à ses amis." Et cela permet de trouver rapidement la meilleure solution, ajoute le médecin-chef. La fécondation in vitro en est une, mais il existe aussi des traitements plus simples. "On a de multiples options, pas toujours compliquées et avec des chances de succès importantes." Mais le problème peut aussi vite devenir d'ordre financier.

Dans un premier temps, les spécialistes conseillent souvent l'insémination artificielle. Trois cycles sont remboursés par l'assurance-maladie de base. Mais ils ne sont souvent pas suffisants pour générer une grossesse. Payer un cycle supplémentaire revient alors à au moins 2000 francs.

La fécondation in vitro peut ensuite entrer en jeu, mais un cycle coûte entre 8000 et 10'000 francs et il n'est pas remboursé par les assurances, ni la base, ni la complémentaire. "Certains couples ne peuvent pas faire de FIV pour des raisons financières et vont renoncer à un traitement qui leur est adapté", regrette Nicolas Vulliemoz.

Pour le médecin-chef au CHUV, vu que l'OMS dit que l'infertilité est une maladie, "on comprend mal pourquoi la Lamal ne devrait pas rembourser les traitements". Et d'ajouter: "Toutes les maladies ont un coût et on ne doit pas ne pas rembourser un traitement pour une maladie en raison du coût. Ce sont des traitements qui sont bien établis et dont les chances de succès sont importantes. Cela justifierait les remboursements par l'assurance de base."

Propos recueillis par Valérie Hauert

Adaptation web: Frédéric Boillat

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Plus de 2000 enfants naissent chaque année par FIV

Entre 2009 et 2019, le taux de naissances vivantes par fécondation in vitro est passé de 30% à 37% en Suisse, selon les derniers chiffres de l'Office fédéral de la statistique.

En 2019, 5993 couples ont suivi un traitement de procréation médicalement assistée par fécondation in vitro dans les centres autorisés de Suisse. Et 2204 naissances vivantes ont été recensées, soit un enfant sur 40.

La proportion de naissances par femme traitée a progressé de 7% en l'espace de dix ans.

La part des naissances multiples après fécondation in vitro, elle, a nettement reculé ces dernières années, passant de 16% en 2016 à 6% en 2019.

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