Le nombre de personnes hospitalisées pour le Covid-19 en Suisse a plus que doublé ce dernier mois. De 450 il est passé à plus de 1100. Et ce n’est que le début, s’inquiètent les épidémiologistes et les responsables des hôpitaux: "La situation se dégrade", commente Philippe Eckert, directeur du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), vendredi dans La Matinale de la RTS.
"Nous avons une augmentation significative du nombre de patients (atteints du Covid): quatre patients aux soins intensifs il y a cinq jours, douze aujourd'hui. L'augmentation est très rapide dans un hôpital déjà très chargé", précise-t-il.
Des transferts de patients
L’heure est donc aux solutions pour éviter une paralysie du système hospitalier. La cellule de coordination des soins intensifs, pilotée par le CHUV, a été réactivée il y a une dizaine de jours. Elle a d'ailleurs déjà commencé à transférer certains patients, selon Jean-Daniel Chiche, chef de service au CHUV et responsable de cette cellule.
"Pour l’instant, on arrive à se débrouiller. Mais hier (mercredi, ndlr), par exemple, on a admis deux patients au CHUV en provenance de Morges, qui était saturé avec une augmentation du nombre de Covid. Nos collègues de Morges étaient dans l’incapacité de les prendre en charge puisque leurs soins intensifs étaient pleins et sans opportunité de sortie pour les autres patients qui y étaient."
Stratégie de recrutement
Le manque de personnel soignant représente une autre inquiétude. Les hôpitaux observent en effet un certain épuisement et de l'absentéisme au sein de leurs troupes. C'est notamment le cas au CHUV: "On ne peut pas ouvrir toutes nos structures, car nous n'avons pas la flexibilité que l'on avait par exemple lors de la première vague, il y a une année et demie", indique Philippe Eckert.
Face à la pénurie annoncée de personnel, les établissements se préparent à embaucher des renforts. L'Hôpital du Valais s'attend à devoir le faire prochainement: "La stratégie de recrutement consiste d’une part à permettre à des jeunes de se former dans le domaine des soins intensifs. Ensuite, nous reprenons contact avec des personnes qui sont à la retraite pour leur proposer de venir temporairement nous aider dans cette période difficile", explique Eric Bonvin, directeur de l'hôpital du Valais.
Le recrutement classique par le biais d'annonces est plus compliqué: "Le marché de l’emploi est rendu difficile par le fait que tous les hôpitaux sont en train de chercher des compétences", précise Eric Bonvin.
Vers le report des opérations non essentielles
Le report des opérations non essentielles pourrait également être décidée prochainement, notamment à l'Hôpital du Valais: "Il suffit qu'il y ait entre deux et quatre patients supplémentaires aux soins intensifs et nous devrons réquisitionner les compétences médicales et soignantes aux blocs opératoires pour les soins intensifs Covid", précise Eric Bonvin.
Son homologue du CHUV précise: "C'est une phase que nous retardons au maximum."
Qu'en est-il du tri des patients? "C'est la phase de la crise absolue", répond Philippe Eckert. "Nous n'avons jamais dû y avoir recours. Ces mesures de triage se décident au niveau national et sont l'application de la directive de l'Académie suisse des sciences médicales."
Reste que si la situation est préoccupante actuellement, elle n’est pas encore dramatique. Les experts rappellent qu'il y a encore une certaine marge par rapport au pic de 4000 personnes hospitalisées pour le Covid-19 atteint l'an dernier.
Mathieu Henderson