Selon l’OFS, en 2020, la fréquentation des EMS a baissé de 4% alors que les prestations à domicile ont augmenté de près de 7%.
Le vieillissement entraîne son lot de réflexion, y compris chez les personnes concernées: comment vieillir en évitant la solitude? Comment ne pas représenter une charge pour son entourage? Est-ce que, à terme, l’EMS est un incontournable?
L'union fait la force
Ces questions, les quatre membres de la colocation des Tripet se les posent. Dans cette grande maison familiale, il y a Renaud, son frère Jean-Michel, sa soeur Véronique, ainsi que sa femme Jocelyne.
Septentenaires, ils sont tous en bonne santé: "On paie une pension de 1500 francs par personne. On est nourri, logé, blanchi, transporté et on a accès à internet. Lorsque vous êtes seul, vous n'avez pas forcément ces conditions", explique Renaud.
Mais l'avantage de la colocation n'est pas que financier: "Etre quatre à table, ce n'est pas la même chose qu’être deux ou tout seul. On peut notamment discuter de nos problèmes. Du point de vue de la dynamique psychologique, c'est excellent", rapporte le Neuchâtelois.
Jean-Michel, lui aussi, y trouve son compte: "Pour moi qui suis célibataire, c'est très stimulant. Il y a tout le temps du monde, pas seulement mon frère et ma soeur, mais aussi mes neveux et nièces, ainsi que mes petites-nièces."
La vie communautaire ne comporte toutefois pas que des avantages. "Il faut trouver un accord sur certains sujets", indique Renaud.
Et d'ajouter: "À quatre, on ne peut pas décider qu'il y a une majorité lorsque trois personnes sont d'accord. Cela ne fonctionne pas comme ça."
Plusieurs générations sous le même toit
Cette maison a aussi abrité d’autres membres de la famille: "On a aménagé un petit appartement au rez-de-chaussée. Cela nous a permis d'accompagner ma maman jusqu'à la fin de sa vie, puis la maman de mon épouse. Finalement, c'est une tante qui a franchi le cap des 100 ans et qui a fini ses derniers jours ici."
Cette projection dans l'avenir n'est d'ailleurs pas évidente pour tout le monde. Car si tous les colocataires sont pour l’heure en bonne santé, quelle sera la situation dans dix ans? "Je ne cherche pas forcément à me dire qu'il faut que je trouve une solution quand j'aurai 80 ans. Je comprends la réflexion, mais j'attends de voir. Et j'y suis prête", dit Véronique.
Renaud, lui, y réfléchit davantage: "Ma solution idéale serait de convaincre naturellement une personne de la génération suivante de rejoindre notre groupe et d'y apporter l'énergie et les capacités que l'on peut avoir à 30 ou 40 ans."
La peur de l'EMS
La maison de retraite est perçue par beaucoup comme une solution de dernier recours. Gilbert Philippin est un ancien directeur d'EMS. À l’heure du café, il passe voir Renaud Tripet. Tous deux font partie de la Fédération neuchâteloise des retraités.
"On a créé des logements protégés, des foyers de jour ou encore des séjours temporaires au niveau des EMS. Toutes ces solutions-là répondent à la peur d'entrer définitivement dans un établissement médico-social", estime Gilbert Philippin
"On ne discute pas de ça au sein de la population. Les enfants sont par exemple sensibilisés à la nature ou autre. Pourquoi on ne le ferait pas avec les familles concernant l’entrée éventuelle d’un des leurs dans un EMS?"
Coraline Pauchard et Guillaume Rey