Gilbert Casasus: "Il faut une mobilisation des chercheurs suisses contre la position antiscience du Conseil fédéral"
Depuis l'abandon de l'accord-cadre avec l'Union européenne en mai 2021, la Suisse est considérée comme un pays tiers, non associé pour la participation au programme de recherche Horizon Europe. Il en va de même pour le Royaume-Uni après le Brexit.
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Face à ce blocage, les écoles polytechniques suisses - EPFL et EPFZ - aux côtés des universités britanniques ont lancé la campagne "Stick to Science" pour appeler les Etats membres de l'UE à une collaboration en matière de recherche.
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Destinataire "mal choisi"
Cette stratégie est "totalement contre-productive", selon Gilbert Casasus, professeur en études européennes à l'Université de Fribourg, invité mercredi dans La Matinale. Selon lui, le destinataire "est mal choisi".
"Si les chercheurs suisses sont aujourd'hui exclus de la recherche européenne, c'est la faute, et uniquement la faute, du Conseil fédéral", souligne-t-il. Et d'imager: "Cela me fait penser à un pompier pyromane qui allume un incendie et qui appelle la caserne pour l'éteindre. Et ensuite, il prend la parole devant les médias pour dire à quel point c'est scandaleux tous ces pyromanes."
Si les chercheurs suisses sont aujourd'hui exclus de la recherche européenne, c'est la faute, et uniquement la faute, du Conseil fédéral
Le professeur en études européennes juge qu'un "coup de pression" contre le gouvernement est nécessaire de la part des chercheurs suisses.
Mais il les appelle à faire une "résistance passive": "Tous les chercheurs devraient refuser de prendre des mandats que leur offre le gouvernement fédéral. C'est une arme à double tranchant, mais il faut qu'il y ait une mobilisation des chercheurs suisses contre la position antiscience du gouvernement fédéral."
Exaspération de Bruxelles
Gilbert Casasus estime qu'à Bruxelles, "c'est l'exaspération qui prédomine vis-à-vis de la Suisse". "Dans une interview accordée au SonntagsZeitung, Ignazio Cassis remet les bilatérales en jeu, alors que cela fait au moins depuis 2008 que l'Union européenne dit que l'ère des bilatérales est terminée", rappelle-t-il.
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Et d'ajouter: "Si on propose des choses qui ne sont pas acceptables, ceux qui en paient le prix, en partie, ce sont les chercheurs suisses par le manque d'ingéniosité et de capacité d'analyse du gouvernement."
Propos recueillis par Valérie Hauert/vajo