L'industrie du tabac, particulièrement présente en Suisse, perd ainsi une bataille. Seules les publicités adressées aux adultes resteront autorisées. Plus question de distribuer des échantillons gratuits lors des festivals accessibles aux mineurs. Ni de faire la promotion des cigarettes dans les journaux gratuits ou sur les sites Internet et les réseaux sociaux consultés par les jeunes.
L'initiative partait gagnante dans les sondages. Mais elle devait réunir la double majorité du peuple et des cantons. Si la première a rapidement été acquise, la seconde s'est fait attendre.
Ceinture conservatrice
Une ceinture conservatrice, opposée au texte, s'est d'abord dessinée de manière assez floue à travers la Suisse centrale et orientale. Argovie, Glaris et Soleure ont toutefois accepté le texte du bout des lèvres par un peu plus de 50% des votants. Les Grisons et Bâle-Campagne ont réuni à peine plus de partisans.
>> Le suivi des votations fédérales en direct : L'aide aux médias refusée, l’interdiction de la pub pour le tabac passe la rampe, le suivi en direct
Seuls dix cantons ont finalement rejeté l'initiative. Schwytz a mené l'opposition avec plus de 60% de "non". Uri, Obwald, Nidwald et Appenzell Rhodes-Intérieures l'ont suivi de près.
A l'inverse, le "oui" a été porté par les cantons latins et urbains. Genève a plébiscité l'initiative à 74,8%. Il est suivi par Vaud (67,2%) et le Jura (66,2%). Bâle-Ville, Fribourg et Neuchâtel acceptent aussi largement le texte à plus de 60%. Zurich, Berne, le Tessin et le Valais dépassent les 55% de partisans.
Plus de 1,3 million d'électeurs ont approuvé le texte. Environ un million de Suisses ont en revanche glissé un bulletin défavorable dans les urnes.
Tabagisme précoce problématique
Médecins et milieux de la prévention, à l'origine de l'initiative "Enfants sans tabac", ont ainsi réussi à convaincre la population des méfaits de la publicité auprès des jeunes. Elle les incite à tirer leurs premières bouffées de cigarette, ont-ils argumenté lors de la campagne. Or le tabagisme précoce est problématique.
Les arguments libéraux de leurs opposants n'ont pas fait le poids. Pour le Conseil fédéral et les partis bourgeois, le texte est trop restrictif. Les lieux et les médias réservés aux adultes sont rares. Dans la pratique, cela reviendrait à une interdiction totale, se sont-ils insurgés. Et de critiquer une atteinte à la liberté économique et une infantilisation des consommateurs.
ats/gma
Les initiants saluent un "sacré progrès"
Avec l'approbation de l'initiative sur le tabac dimanche, les initiants saluent un "sacré progrès" dans la lutte contre le tabagisme. Les Jeunes Verts veulent même aller plus loin avec une interdiction générale de la publicité. Du côté des opposants, on met en garde contre "d'autres dérives restrictives".
La Ligue contre le cancer, membre du comité d'initiative, salue le résultat du vote, "afin que les enfants et les jeunes ne deviennent pas les malades du cancer de demain". Elle demande maintenant que la décision populaire soit mise en oeuvre "rapidement et efficacement".
De son côté, Grégoire Vittoz, directeur d'Addiction Suisse, a estimé qu'un "équilibre était rétabli" entre une "industrie qui a des moyens colossaux" et des "parents démunis".
Du côté des opposants à l'initiative, on pointe une "campagne sale" de la part des partisans. Les faits que le contre-projet indirect protège aussi les enfants et les adolescents et qu'il contient déjà interdiction de vente de produits du tabac aux moins de 18 ans dans toute la Suisse ont été mis sous le tapis, a déploré le conseiller national Mike Egger (UDC/SG) sur SRF.
"Nous continuerons, du côté des milieux économiques, à nous battre contre d'autres dérives restrictives au détriment de l'économie et des libertés individuelles", a avancé de son côté Patrick Eperon, du Centre patronal, à la RTS.
La 25e initiative acceptée
Depuis l'introduction du droit d'initiative au niveau fédéral en 1891, 225 initiatives populaires ont été soumises au verdict du peuple. L'initiative "Enfants sans tabac" est la 25e à passer la rampe.