Le collectif Némésis, du nom de la déesse de la vengeance, dit vouloir lutter contre l’impact de l’immigration sur les femmes et attire l'attention sur le harcèlement de rue. Ses membres défendent ce qu'elles appellent un féminisme "identitaire".
"Nous mettons l’accent sur la culture européenne qui est protectrice de la femme. On se rapporte à une identité culturelle européenne", explique sa porte-parole Sarah dans le 19h30. "On ne nie pas que la plupart de nos harceleurs de rue sont issus de culture étrangère. C'est ce qui nous différencie des autres groupes. Je ne comprends pas pourquoi il y a un tabou autour de ça", ajoute Léa, une autre membre.
A contre-courant des groupes féministes romands
Le mouvement a été créé en 2019 en France sous l’impulsion d’Alice Cordier, une jeune française régulièrement invitée sur les plateaux de la chaîne C8. En Suisse, la section a vu le jour l’été dernier et depuis, le collectif est très actif sur les réseaux sociaux ainsi que dans la rue. Il regroupe à ce jour une vingtaine de membres et s’oppose aux mouvements féministes traditionnels, ce qui ne va pas sans heurts.
Le 25 novembre à Lausanne, lors de la marche contre les violences faites aux femmes, le collectif a ainsi été pris à partie. Les militantes portaient une pancarte où était écrit "Violeurs suisses: prison. Violeurs étrangers: expulsion". Des échauffourées ont éclaté et la police a dû intervenir.
Entre Némésis et les mouvements réunis autour de la Grève féministe, le fossé est grand. "Nous nous opposons fermement et sans ambiguïté face à l’idéologie raciste, homophobe, transphobe et capitaliste du groupe Némésis", déclarent par écrit les représentantes de la Grève féministe. "Ce groupe surfe sur la vague violette et l’instrumentalise pour promouvoir non pas l'émancipation des femmes, mais bien la discrimination envers ceux qu'il cible, notamment les étrangers", ajoutent-elles.
Une instrumentalisation des enjeux féministes
Némésis traîne une réputation sulfureuse. A la fin de l’année dernière, Sarah s'est retrouvée en Une d’un site de gauche anti-fasciste qui l'accusait de faire partie d’un groupuscule d’extrême-droite militant suisse. La Valaisanne reconnaît en avoir fait partie, mais elle affirme avoir pris ses distances. "Dans le passé, j’ai milité pour ce groupe, reconnaît-elle, mais à l’heure actuelle, Némésis n’a aucun lien avec ces groupes et ses militantes non plus."
Pour Janine Dahinden, professeure à l’Université de Neuchâtel et présidente de la Société suisse d'études genre, ce groupe s'inscrit dans un mouvement global: "A mon sens, ce collectif s’insère clairement dans une idéologie ou des argumentations qu'on connaît très bien depuis un moment. C'est quelque chose qu’on a observé dans plusieurs pays européens. Cela veut dire que les partis de droite ont commencé à instrumentaliser la question des femmes, l’égalité des genres et les droits des femmes pour faire une politique anti-migratoire."
"Il y a là une construction assez simpliste, sous-jacente, qui est "Nous sommes les champions de l’égalité des genres pendant qu'eux, les autres, ont une culture où c’est pas possible d’avoir une égalité des genres". Bien sûr, c’est stéréotypé, c’est simpliste, mais c’est très efficace", ajoute Janine Dahinden.
A l’avenir, Némésis espère renforcer sa présence en Suisse romande. Le collectif dit vouloir participer prochainement à de nouvelles manifestations.
gc