Les personnes concernées ne pourront plus entrer sur le territoire helvétique. Les intermédiaires financiers, comme les banques et les assurances, ne pourront plus nouer de nouvelles relations d'affaires avec elles. Celles-ci ne pourront donc plus ouvrir de comptes en Suisse. Les relations déjà existantes doivent être immédiatement annoncées au Secrétariat d'Etat à l'économie.
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Le Conseil fédéral a également pris connaissance des autres sanctions prises par l'UE, notamment l'interdiction d'importer des biens de Donetsk ou de Lougansk. Elles seront également reprises par la Suisse, a indiqué aux médias Guy Parmelin.
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Avec ces mesures, la Suisse veut garder la porte ouverte au dialogue avec les pays concernés. "Elle doit pouvoir offrir ses bons offices, si la Russie ou l'Ukraine le demande." La Suisse ne pourrait pas tenir son rôle traditionnel si elle reprenait automatiquement toutes les sanctions de l'UE ou d'autres pays.
Accueil de réfugiés ukrainiens
La Suisse est prête à accueillir des réfugiés d'Ukraine, a indiqué vendredi la conseillère fédérale en charge de la justice et de la police Karin Keller-Sutter devant la presse. "Nous n'abandonnerons pas les Ukrainiens."
L'offensive russe constitue une attaque des valeurs démocratiques, a continué la conseillère fédérale. "La Suisse entend se montrer solidaire." Elle accueillera des réfugiés selon une clé de répartition européenne encore à définir.
La situation est toutefois pour l'instant peu claire, a-t-elle précisé. "On ne peut pas encore dire combien de personnes vont quitter l'Ukraine." Pour l'instant, les hommes semblent vouloir rester sur place pour défendre leur patrie. Les familles s'en vont.
Les flux migratoires s'orientent vers la Pologne, où environ 1,5 million d'Ukrainiens vivent. D'autres mouvements commencent aussi à s'esquisser vers la Slovaquie et la Hongrie.
En Suisse, les permis de séjour d'Ukrainiens devraient être prolongés. Le SEM devrait envoyer aux cantons une recommandation en ce sens, a indiqué Karin Keller-Sutter.
Demandes d'asile suspendues
Le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) a décidé de geler le traitement des demandes d'asile de citoyens ukrainiens. Dans un tweet, il annonce jeudi étudier de près la situation sur place.
Actuellement, 116 demandes d'asile déposées par des Ukrainiens sont pendantes auprès du SEM.La Suisse entend en tout cas faire preuve de solidarité. "Nous ne renverrons certainement personne", a dit devant les médias la secrétaire d'Etat aux migrations Christiane Schraner Burgener. Chaque cas sera étudié attentivement.
Les partis condamnent
Du côté des partis politiques, on se dit sous le choc et inquiets de l'évolution de la situation. Ils invitent la diplomatie helvétique à redoubler d'effort pour trouver une issue pacifique à ce nouveau conflit. Tout en étant très ferme avec Moscou, estime Cédric Wermuth, conseiller national et coprésident du Parti socialiste. Le PS et Les Verts appellent en effet à des sanctions dures contre la Russie.
Dans un communiqué, le PLR a aussi condamné fermement l'attaque russe qui "ébranle la sécurité en Europe et constitue une attaque contre le système libéral d'après-guerre". Pour ce parti, la Suisse doit s'engager au niveau international en faveur de la désescalade et d'une solution pacifique. Elle doit proposer ses bons offices, par exemple afin de pouvoir agir en tant que puissance protectrice".
De son côté, l'Union syndicale suisse (USS) se joint à l'appel de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de la Confédération européenne des syndicats pour exiger la fin immédiate des actes de guerre en Ukraine.
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RTSinfo avec ats
Des liens financiers forts entre la Suisse et la Russie
La Suisse fait partie depuis 2014 des dix principaux investisseurs en Russie, d'après des données de la Confédération. En parallèle, selon des estimations de l'ambassade à Moscou, la Suisse est depuis des années, et de loin, la principale destination mondiale des Russes fortunés pour la gestion de leur fortune.
En 2020, des personnes résidant en Russie ont transféré 2,5 milliards de dollars vers la Suisse et 1,8 milliard pour les deux premiers trimestres de 2021. Cela correspond à un record quinquennal, comme le montre le dernier rapport économique de l'ambassade de Suisse à Moscou publié en novembre.
L'analyse souligne que la place financière suisse est considérée comme attractive pour les Russes, notamment en raison de la sécurité juridique ainsi que de la stabilité et de la neutralité politiques du pays.
La Suisse joue en outre un rôle important pour la Russie dans le commerce des matières premières. Selon le rapport, environ 80% du commerce russe de matières premières passent par les centres de services financiers suisses. Ce qui explique pourquoi les plus grandes entreprises russes du secteur de l'énergie et des matières premières ainsi que des instituts de crédit renommés possèdent une filiale en Suisse.
L'entreprise chargée d'exploiter le nouveau gazoduc controversé Nord Stream 2, censé relier la Russie à l'Allemagne, a par exemple son siège à Zoug. L'entreprise appartient au groupe public russe Gazprom. Le gazoduc, dont la construction est achevée, a été mis en sommeil par l'Allemagne.
Le volume d'investissements suisses en Russie s'élevait à 17,6 milliards de dollars américains fin juin 2021, selon la banque centrale du pays. Cela représentait 3,1 % du total des investissements directs étrangers en Russie.
Les acteurs économiques suisses sont surtout actifs sur le marché russe dans les domaines de la construction, des matières premières, des transports, de la santé et de l'alimentation. De nombreuses entreprises suisses ont récemment développé leurs activités en Russie.
De son côté, le capital d'investissements directs russes en Suisse s'élevait à 22,5 milliards de dollars fin mars 2021. Ce qui représentait 5% de l'ensemble des investissements réalisés par la Russie à l'étranger. Les investissements russes en Suisse représentaient ainsi près de 1,2% de tous les investissements étrangers.
Manifestations contre la Russie
Plusieurs centaines de personnes ont manifesté jeudi à Berne et St-Gall, un millier à Zurich pour dénoncer l'invasion russe en Ukraine. Les rassemblements qui étaient autorisés ont réuni des participants de tous les bords politiques et de simples citoyens.
Un premier rassemblement s'est déroulé dès 16h00 devant l'ambassade russe à Berne. Plusieurs centaines de personnes, des Ukrainiens et des Suisses, arboraient des drapeaux ukrainiens et des banderoles sur lesquelles on pouvait lire "Ukraine needs help" (L'Ukraine a besoin d'aide, ndlr).
A Zurich, environ un millier de personnes se sont retrouvées en début de soirée sur le Rathausbrücke avec des bougies et des lumières pour une "manifestation silencieuse" en faveur de la paix et de la démocratie en Europe. L'attaque russe en Ukraine remet en question la paix en Europe, ont indiqué dans un communiqué les organisateurs.
Certains participants avaient apporté des pancartes sur lesquelles étaient inscrits "Kein Krieg in der Ukraine!" (Pas de guerre en Ukraine), "Peace Peace Peace" ou "Stop the War". Quelques drapeaux ukrainiens flottaient dans l'air.
A St-Gall, quelque 150 personnes se sont aussi réunies en début de soirée près de la gare. Les banderoles affichaient "Stop the War" (Arrêtez la guerre) ou "Krieg führt zu Traumata für Generationen" (la guerre est un traumatisme pour des générations). Le Groupe pour une Suisse sans Armée (GSsA) a appelé à une grande manifestation samedi à Berne.