Près de 10'000 Ukrainiens et Ukrainiennes ont déjà été enregistrés en Suisse, alors que les cantons se préparent à en accueillir beaucoup plus d'ici la fin de l'année (fourchette allant de 60'000 à 300'000 personnes dans un scénario extrême). Face à cet afflux de réfugiés, certains centres d'accueil sont débordés.
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"Ce sont des chiffres élevés, sur une période très courte", a noté Etienne Piguet, vice-président de la Commission fédérale des migrations, dimanche dans le 19h30.
Cette situation inédite pose la question des capacités d'accueil de la Suisse. Selon le spécialiste, "la Suisse a des infrastructures qui peuvent parfaitement faire face de manière rapide et efficace" à un afflux de réfugiés "jusqu'à 60'000 personnes". Au-delà, "on entre dans un système d'accueil d'urgence, et là il faudra improviser, ce sera un peu plus compliqué", a-t-il estimé.
Une proximité particulière avec le conflit
Alors que plusieurs mesures ont été mises en place en faveur des réfugiés ukrainiens partout en Europe, la population civile fait elle aussi preuve d'un grand élan de solidarité, y compris en Suisse. Un phénomène qui n'étonne pas Etienne Piguet: "Si l'on regarde l'Histoire, on voit qu'il y a un certain nombre de conditions réunies pour qu'il y ait une grande ouverture de la population suisse: la soudaineté, la proximité et la lisibilité de ce qu'il s'est passé (on sait qui a attaqué qui)".
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Mais cette générosité européenne sans limite est aujourd'hui critiquée, à la lumière de l'accueil réservé à d'autres réfugiés de guerre venant notamment de Syrie ou d'Afghanistan. "C'est vrai qu'il y a quelque chose de choquant dans la fermeture de l'Europe à travers la Méditerranée, mais la situation est très différente", a relativisé le vice-président de la Commission fédérale des migrations.
C'est vrai qu'il y a quelque chose de choquant dans la fermeture de l'Europe à travers la Méditerranée, mais la situation est très différente avec l'Ukraine. On a une proximité beaucoup plus grande
Avec cette guerre en Ukraine, "on a une proximité beaucoup plus grande". "Dans de nombreux cas de pays plus éloignés, il y avait des possibilités d'accueil à proximité pour lesquelles on a développé des modes d'assistance", a ajouté le spécialiste, en soulignant que l'Europe a accueilli ces dix dernières années plus de réfugiés qu'elle n'en a jamais accueilli. "Faire le procès de l'Europe en disant qu'elle est raciste parce qu'elle accueille les Ukrainiens, je trouve que c'est problématique."
Une adaptation nécessaire de l'enseignement
Les personnes qui fuient l'Ukraine sont principalement des femmes et des enfants, les hommes ayant l'obligation de rester sur place pour défendre leur pays. En Suisse, les écoles font ainsi face à une situation inédite. Au total, 200 enfants ukrainiens ont déjà intégré des classes romandes et une hausse de 5 à 10% du nombre d'élèves est attendue dans certains cantons.
Pour Etienne Piguet, cela représente un défi pour l'enseignement. Il va falloir s'adapter et "avoir peut-être moins l'objectif des scores PISA" durant la période de crise, estime-t-il. "Je crois qu'on peut aussi tirer un enrichissement de cette situation pour les élèves des écoles suisses, mais effectivement ce sera une période un peu troublée."
Propos recueillis par Fanny Zürcher
Adaptation web: Isabel Ares