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Le camp rose-vert veut renforcer l'encadrement des sanctions suisses

Le camp rose-vert veut renforcer l'encadrement des sanctions suisses (vidéo)
Le camp rose-vert veut renforcer l'encadrement des sanctions suisses (vidéo) / La Matinale / 3 min. / le 23 mars 2022
Dans le sillage des mesures prises dans le cadre de la guerre en Ukraine, la gauche veut muscler le système qui encadre les sanctions suisses. Socialistes et Verts proposent d'élargir l'éventail d'outils à disposition, un projet qui suscite méfiance et critiques à droite.

Les propositions du camp rose-vert portent sur la situation actuelle, alors que Berne a prononcé des sanctions contre des oligarques et des entreprises russes liées à Vladimir Poutine. Initiées par l'Union européenne, elles ont été reprises progressivement par le Conseil fédéral et visent désormais près de 900 personnes et une soixantaine d'entreprises et d'organisations.

>> Lire : La Suisse élargit ses sanctions contre la Russie, plusieurs banques exclues de Swift

Appel à créer une task force spécialisée

Et pour veiller à leur application, le PS demande la création d'une task force. "Les Etats-Unis, l'Union européenne et les différents pays qui ont pris le même genre de sanctions estiment qu'avec une task force de spécialistes de la criminalité financière, des banques, des placements, des sociétés de capitaux, on peut remonter le fil des fortunes de ces oligarques et on peut les bloquer pour rendre ces mesures plus efficaces", a expliqué le conseiller national Baptiste Hurni (PS/NE) mercredi dans La Matinale de la RTS.

La structure actuelle privilégiée à droite

Mais à droite, l'idée ne séduit pas vraiment. "Actuellement, il y a une répartition des tâches claire entre le Secrétariat d'Etat aux affaires financières internationales, le Seco et la Finma [organe de surveillance des banques]", a relevé le chef du groupe PLR Damien Cottier.

"Ce sont de grosses organisations qui ont l'habitude de faire ça, qui ont des mandats clairs et partagés", a poursuivi le conseiller national neuchâtelois. "Si on voit qu'il y a un besoin accru de coordination et la mise en place d'une task force si nécessaire, le Conseil fédéral pourra le décider. Mais ce n'est pas au Parlement d'expliquer au Conseil fédéral comment s'organiser".

Il faut du reste ajouter à cette liste le Ministère public de la Confédération (MPC). Celui-ci évaluerait actuellement les éventuelles répercussions pénales en Suisse de la guerre en Ukraine, selon le journal alémanique Tages Anzeiger.

Les Verts veulent des sanctions thématiques

Les Verts, eux, proposent des changements de fond. Il faudrait faire en sorte, par exemple, que la Suisse puisse prononcer des sanctions de manière unilatérale, souveraine, disent-ils. Aujourd'hui, la loi ne le permettrait pas.

Le parti écologiste veut aussi ouvrir la voie à des sanctions thématiques. "Notre objectif est aussi de permettre une adoption de sanctions thématiques, qui sont maintenant autorisées au niveau de l'Union européenne et des Etats-Unis", a expliqué le conseiller national Nicolas Walder.

"Elles permettent de sanctionner un Etat, un groupe ou des entreprises privées qui bafouent les droits humains", a précisé le Genevois. "On a besoin de pouvoir reprendre ces sanctions visant les crimes contre les droits humains, et pas uniquement dans le cadre d'un conflit dans un pays ou dans le cadre d'une situation particulière".

Le PLR juge la loi actuelle suffisante

A droite, certains se disent prêts à discuter de cette proposition. "On peut toujours trouver des améliorations. C'est possible qu'il soit intéressant d'avoir une discussion sur les sanctions thématiques, elle viendra certainement", a réagi le PLR Damien Cottier.

"Mais ce que je constate, c'est qu'on a une loi moderne, efficace", a-t-il souligné. "Et lorsque le Conseil fédéral décide de reprendre des sanctions, on a les moyens de les appliquer. A la fin, c'est ça qui compte".

Bons offices plutôt que sanctions, dit l'UDC

L'UDC, en revanche, s'opposera vigoureusement à ces velléités de réformes esquissées par le camp rose-vert au nom de la neutralité. Si la Suisse veut prendre des sanctions, "elle doit aller jusqu'au bout, dire qu'on renonce à notre neutralité", a souligné la vice-présidente du parti Céline Amaudruz. Et si elle ne veut pas renoncer à sa neutralité, "alors elle doit renoncer à prendre des sanctions mais jouer un rôle crucial dans la négociation". Autrement dit, il s'agit de jouer la carte de la médiation, des bons offices.

Le débat sur l'avenir du système de sanctions suisse, en tout cas, est lancé. Les discussions vont se poursuivre ces prochaines semaines dans le secret des commissions parlementaires compétentes.

Marc Menichini/oang

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