Valentina et Oksana ont fui Kiev il y a une semaine. Stressées et fatiguées, les deux amies craignaient l'avancée des forces russes et les bombardements quotidiens pour elles et leur famille.
Elles témoignent de l’horreur vécue dans leur pays natal. "Les dernières semaines ont vraiment été terribles à Kiev, avec des explosions dans différentes parties de la ville. Pendant une semaine, je n'arrivais plus à dormir. J’ai compris que les explosions pouvaient tomber près de ma maison, alors j'ai fait mes bagages et je suis partie", a confié Oksana au 19h30 vendredi.
Valentina poursuit le récit: "Pendant la nuit, je descendais à la cave avec mes amis et mes voisins, car nous entendions les bombes et les sirènes. J'étais stressée, parce que les avions russes auraient pu attaquer l'hôpital à côté de chez nous".
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Cas aigus
Comme beaucoup de leurs compatriotes en situation de guerre, ces Ukrainiennes ont vécu des situations dangereuses et perturbantes, qui risquent d'être complexes à gérer psychologiquement. "Je reçois déjà pas mal de patients avec des traumatismes de guerre. Ce sont des sollicitations quotidiennes, des cas aigus, avec des symptômes physiques d’origine psychologique. La souffrance est sévère et chronique", détaille Anastasiia Avazashvili, psychologue ukrainienne installée en Suisse.
À l’Armée du Salut de Genève, on accueille ces réfugiés, à qui on offre des repas chauds et un peu de réconfort, souvent après des semaines éreintantes de voyage. C’est le cas pour Anna, qui a fui son pays avec ses enfants en bas âge.
"C'était l'horreur, nous étions paralysés. J'ai un enfant de 4 ans et il était très effrayé par la situation. J'essayais de lui changer les idées, de lui mettre des dessins animés… Il n’arrêtait pas de trembler et de pleurer. Je ne savais pas quoi faire car j’étais moi-même terrifiée", témoigne-t-elle.
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Aide d’urgence
Le tableau est sombre. La Fédération suisse des psychologues veut alerter les cantons et les pousser à mettre en place les dispositifs adéquats. Ces deux dernières semaines, la prise en charge est passée de 5 à 80 personnes aux Hôpitaux universitaires de Genève. La courbe risque de devenir exponentielle.
"Il risque d'y avoir des besoins très conséquents. Selon des statistiques d’anciens pays en guerre, 10 à 20% des personnes ayant connu ce genre de situation développent des syndromes post-traumatiques. En Suisse, ce sont des milliers d'Ukrainiens qu'il va falloir soutenir psychologiquement", analyse Stéphane Wenger, coprésident à la Fédération suisse des psychologues. Une tâche qui s’annonce titanesque, le réseau des psychologues étant déjà saturé en Suisse. Sans compter les difficultés logistiques, comme les problèmes de traduction.
Une task force Ukraine a été mise en place aux HUG. Une permanence téléphonique a également été créée, proposant renseignements, aide médicale ou dons aux réfugiés arrivés sur le territoire.
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saje/Chloé Steulet