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Les cantons alpins accusés de retarder les projets hydrauliques

Le barrage des Toules sur la commune de Bourg-Saint-Pierre (VS). [Keystone]
Bisbille entre cantons alpins et exploitants sur les futures centrales hydrauliques / La Matinale / 1 min. / le 14 avril 2022
Les exploitants des centrales hydrauliques accusent les autorités valaisannes et grisonnes de retarder les nouveaux projets d'installations. Ils leur reprochent de mettre en péril l’approvisionnement en électricité du pays, ce que les cantons réfutent.

En 2020, le Tribunal fédéral retoque le projet de surélévation du barrage du Grimsel après 15 ans de procédures. Pour mettre fin à ce genre de blocages, Simonnetta Sommaruga réunit dans la foulée les cantons, l’économie hydraulique et les associations environnementales.

Il en ressort une déclaration commune, signée en décembre dernier. Celle-ci met en avant 15 projets de centrales hydroélectriques, dont la mise en œuvre a un impact minimal sur la biodiversité et le paysage.

Mais à peine quelques mois plus tard, les cantons alpins sont déjà accusés de mettre en péril le plan Sommaruga. La critique, relayée par la NZZ, émane des exploitants des centrales hydrauliques. Selon eux, les Grisons et le Valais jouent volontairement la montre.

Fin des concessions

Au cœur de la bisbille, les concessions des centrales. Les fournisseurs d’électricité détiennent en effet une autorisation de la commune ou du canton d’implantation pour exploiter les centrales. Elle leur donne le droit d’utiliser l’eau, pendant une période de 40 à 80 ans. Au cours des trente prochaines années, la plupart des concessions arriveront à échéance.

Mais au lieu de les renouveler, les cantons veulent exercer leur droit de retour. La loi les autorise en effet à récupérer gratuitement les parties hydrauliques – ou « mouillées » - de l’installation, par exemple le barrage ou les turbines. Pour le reste – transformateurs, générateurs – une indemnisation est due.

Pour les exploitants des centrales, ce droit de retour retardera le développement de l’hydroélectricité. Car sans garantie d’indemnisations suffisantes, ils disent ne pas oser se lancer dans des investissements massifs pour agrandir les installations existantes, au risque de ne pas avoir le temps de les amortir. Et selon eux, cela arrangerait bien les cantons alpins de ne pas devoir négocier des sommes potentiellement importantes d’indemnisation.

"Une analyse incomplète"

Une analyse absurde, rétorquent les cantons alpins. Mais pourquoi alors le Valais, par exemple, continue d’étudier des projets autres que ceux évoqués dans le compromis fédéral, au risque de mettre en danger le fragile consensus de la déclaration commune ?

Interrogé dans La Matinale, le chef du Service de l'énergie du Valais Joël Fournier s’explique: "Cette déclaration commune est issue d'une analyse qui ne comprenait pas tous les critères légaux."

"C'était un compromis où toutes les organisations non gouvernementales n'étaient pas autour de la table. C'est donc un signal qu'il y a quand même la possibilité de trouver des compromis, mais ça ne veut pas dire qu'il n'y aura pas de recours contre des décisions d'autorisation de construire."

Eviter les recours

Pour Joël Fournier, c’est justement pour éviter des recours que le canton étudie tous les sites potentiels sur son territoire: "On essaie de donner un maximum de chances aux projets, et pour ça, il faut qu'on respecte scrupuleusement la législation du l'aménagement du territoire."

"Actuellement, on est en train d'analyser les différentes potentialités pour pouvoir choisir les projets qui ont un bon intérêt énergétique et qui ont le moins d'impact sur l'environnement. Et il faut faire cela sur l'ensemble du territoire pour avoir des dossier solides." Le canton espère inscrire d’ici la fin de l’année les projets retenus dans son plan directeur.

Interrogée par la RTS, Simonetta Sommaruga ne souhaite pas commenter les accusations des exploitants des centrales. Mais la conseillère fédérale attend de toutes les parties "qu’elles contribuent à ce que nous avancions rapidement, pour assurer notre sécurité d’approvisionnement électrique, mais aussi pour faire face à la crise climatique. Nous ne pouvons pas nous permettre de mettre 20 ans pour rehausser un nouveau lac de retenue ou un barrage."

Valentin Emery/asch

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